OPERAS - RECITALS - CONCERTS LYRIQUES
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PESARO
18/08/2007
 
Tutti
© Studio Amati Bacciardi


Gioachino ROSSINI (1792-1868)


IL TURCO IN ITALIA

Dramma buffo en deux actes
Livret de Felice Romani

Mise en scène, Guido de Monticelli
Décors, Paolo Bregni
Costume, Santuzza Cali
Lumières, Guido Mariani

Selim, Marco Vinco
Fiorilla, Alessandra Marianelli
Geronio, Andrea Concetti
Narciso, Filippo Adami
Prosdocimo, Bruno Taddia
Zaida, Elena Belfiore
Albazar, Daniele Zanfardino

Choeur de Chambre de Prague

Chef de chœur, Pavel Vanek

Orchestre Haydn di Bolzano e Trento

Direction musicale, Antonello Allemandi

Pesaro, Teatro Rossini, le 18 août 2007

1/2

Che bel Turco !


Ce spectacle, reprise d’une production créée en 2002, est une grande réussite, une véritable fête pour les yeux !

Les costumes colorés de Santuzza Cali, les décors esthétiques et ingénieux de Paolo Bregni, la mise en scène inspirée de Guido de Monticelli… tout est drôle, spirituel, enlevé!

On ne sait quelle scène retenir en particulier… Peut-être la scène du thé chez Fiorilla, où le Turc chamarré de Marco Vinco tente de séduire Fiorilla, sous les yeux du mari jaloux mais apeuré, tandis que Narciso, l’amant éconduit, joue les trouble fêtes, sortant tel un coucou des diverses portes d’une armoire, pour rappeler le mari à ses devoirs. Mais on ne peut passer sous silence l’inénarrable séance de crêpage de chignon entre Fiorilla et Zaida, parfaitement chorégraphiée et rythmée, ou encore l’arrivée du Turc sur son bateau, à la fois grandiose et ridicule.

Bref cette production relativement traditionnelle (1) est un vrai petit bijou, qui ne fonctionnerait pas aussi bien si les chanteurs ne jouaient pas le jeu à fond, notamment Marco Vinco, qui campe à merveille un Turc magnifique et pleutre à la fois.

Sur le plan musical, il faut saluer la très vivante et élégante direction d’Antonello Allemandi, qui dès l’ouverture imprime une vie trépidante à ce Turc.
(2)

Nous l’avons dit, l’équipe réunie pour cette reprise est jeune, dynamique, cohérente et très enthousiaste. Les ensembles sont menés tambour battant, et on se laisse souvent emporter par la verve de l’écriture débridée de Rossini.

Pourtant, à y regarder de plus près, sur le plan individuel, le bilan est nettement moins flatteur… surtout lorsque ce concert est le dernier du séjour pésaresque qui a dans l’ensemble enchanté par le haut niveau des distributions réunies !

En effet, aucune individualité ne ressort vraiment.

Bien sûr Marco Vinco est un Turc séduisant, qui maîtrise très bien la prosodie rossinienne… mais il manque un je-ne-sais-quoi pour réellement emporter l’adhésion… peut-être un manque de moelleux dans le timbre ?

L’élément le plus décevant de la distribution reste cependant le Narciso de Filippo Adami, au timbre légèrement nasillard, qui frôle à plusieurs reprises l’accident. Sa contre-performance fait d’autant ressortir le second ténor de la distribution, Daniele Zanfardino (Albazar), qui séduit dans sa courte aria par sa voix claire et de jolis abbellimenti.


Alessandro Marianelli & Marco Vinco
© Studio Amati Bacciardi

Reste le cas d’Alessandra Marianelli, Fiorilla qui aura beaucoup fait jaser. Son premier air « non si da follia maggiore » a été accueilli très fraîchement par le public, qui s’est gardé d’applaudir. Au contraire, son dernier air « Squallida veste, e bruna » a été très chaleureusement salué !

La performance de la chanteuse est à l’image de ces applaudissements : contrastée. Si techniquement le rôle est assumé - toutes les notes sont là - l’on regrette l’absence de vraie pyrotechnie dans l’air final. Surtout, on ne peut s'empêcher de penser tout au long de la représentation aux interprètes prestigieuses qui l’ont précédée dans ce rôle
(3). Son timbre très léger et un peu pointu (4) ne permet pas à la jeune chanteuse de rendre justice à la personnalité complexe de Fiorilla, ici réduite à une coquette, laissant de côté la mélancolie sous-jacente du rôle.

Le reste de la distribution n’a rien d’indigne, mais rien de mémorable non plus… Une Zaida à la voix moyennement stable, un Geronio plus pleutre que de nature, mais un poète plutôt bien chantant.

Pourtant, malgré ces quelques réticences, on sort de cette soirée le sourire aux lèvres, ce qui est la marque d’un spectacle au final très réussi ! Et l’on se prend à rêver de retrouver cette production avec une distribution autrement convaincante…


Antoine BRUNETTO



Notes

(1) Aucune  transposition audacieuse dans le temps ou dans l’espace.
(2) Si l’on s’en arrêtait là, ce spectacle aurait sans hésiter mérité ses quatre étoiles !
(3) De Maria Callas à Cecilia Bartoli (qui était d’ailleurs présente dans la salle).
(4) D’aucun le qualifieraient de type « soubrette »…

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