Jean-Christophe Henry

Faire une analyse vocale de Cosi, le dernier et sûrement le plus abouti des opéras de la trilogie Mozart-Da Ponte, semble chose aisée. Six personnages, trois couples : un couple Seria, un couple Semi-Seria, un couple Buffa, rien que de très classique à l'époque ; nous sommes dans les cadres de l'opéra buffa qui voyait son apogée à la fin du XVIIIe en Italie et à Vienne. Mais si l'on se penche un peu plus sur cette oeuvre nous découvrons l'un des plus beaux détournements des règles dans l'histoire de l'opéra. Dès le début deux des couples sont mal appariés et le troisième n'en est pas un ! Pour servir son propos Mozart a enfreint les règles : Fiordiligi et Ferrando qui obéissent à tous les poncifs des personnages seria sont "mariés" à Guglielmo et Dorabella exemples parfaits des figures semi-seria, inventions du théatre de Goldoni. De plus le couple Alfonso-Despina est uni sous le contrat de la manipulation et du cynisme. C'est sur ces déséquilibres, ces "erreurs" volontaires, que va se construire cette farce pleine de mélancolie, illustration des tours que joue le destin aux pauvres humains.