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Le duel – Cavaradossi : Franco Corelli ou Luciano Pavarotti

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Humeur
22 septembre 2011

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Détails

 

 

Sylvain Fort
Mario Cavaradossi est un idéaliste ; un peintre républicain ; un ennemi des tyrans ; un ami des persécutés. C’est un sensuel, que fait frémir la beauté de la blonde Attavanti et les yeux de la brune Tosca ; que font pleurer les souvenirs et les étoiles. C’est une victime. Il est torturé, incarcéré, fusillé. Puccini l’installe entre extase et élégie. Une seule fois, il ose l’arrogance (« Vittoria ! »). Comme on préfère alors à tous les gosiers héroïques, si électrisants fussent-ils, les ténors qui exaltent la cantilène, font surgir une lumière tendre, savent murmurer et même sourire à travers les larmes. Notre Mario, c’est – plus que tout autre – Pavarotti.

Julien Marion
J’ai voulu être honnête. J’ai réécouté, comparé. J’étais prêt, pour une fois, à me défaire de mon indécrottable tropisme corellien. Eh bien non. En Cavaradossi aussi, je préfère Corelli. Que les grands prêtres du culte pavarottien me pardonnent : je préfère ce Mario vibrant, sincère, écrasé par son désespoir quand il est dans sa cellule à celui plus immédiatement séduisant, peut être de Pavarotti, mais qui phrase « Recondita armonia » de la même manière que « Core ’ngrato ». Les amateurs de frissons majuscules iront écouter les « Victoria! Victoria » de Corelli à l’acte II (à New York ou Parme, peu importe): une décharge électrique. Et, puisqu’on parle de théâtre et que dans les deux cas, des témoignages vidéo existent, reconnaissons que Corelli, avec son physique de rêve, est autrement plus crédible en amant ténébreux que Pavarotti, sa barbiche et son quintal.

Hélène Mante
Au dernier acte, au moment précis où Mario est traversé par les balles de Scarpia et où le pauvre homme voit son corps transformé en passoire, Luciano -au lieu de tomber raide mort- jetait un petit coup d’oeil prudent par devers lui, tendant sa main vers le sol, et ménageant à son imposant derrière une chute amortie. Si la balourdise du ténorissimo l’éloignait dramatiquement d’un certain idéal romantique, la suavité de son organe embrassait à pleines lèvres la moindre triple croche du rôle de Mario. Pas un septolet n’est épargné : tout y est fait à la mesure de l’immortel Luciano et, d’ailleurs, c’est dans ce rôle qu’il donna sa dernière représentation scénique, au Metropolitan.

Clément Taillia
Quand il entonne « Vittoria, vittoria ! », Franco Corelli tient son contre-ut 12 secondes. Pavarotti, seulement 7. Après « E lucevan le stelle », Corelli reçoit généralement deux minutes trente d’applaudissements. Pavarotti, seulement 1 minute 45. Le Mario de Pavarotti est une figure légendaire et barbue, un Dieu grec qui rend muet d’admiration. Celui de Corelli est un rebelle dégoulinant de sex-appeal qui ferait bonapartiste la ménagère de plus de 70 ans aussi facilement qu’il émoustille le mélomane conscient de tout ce que le chant puccinien requiert de physique et d’animal. C’est pour cela que ma préférence va, sans hésiter, à Franco Corelli.

Christophe Rizoud
S’il n’y avait dans le rôle de Mario Cavaradossi que les « Vittoria ! » à projeter comme des javelots au 2e acte de Tosca alors Corelli s’imposerait comme une évidence. Oui mais voilà Cavaradossi, c’est aussi cet adieu à la vie qu’est « e lucevan la stelle », qu’il ne faut surtout pas charger d’effets sous peine d’en rompre le charme. Et là, Corelli n’est pas irréprochable ; Pavarotti montre davantage de sobriété. Cavaradossi, ce sont deux duos d’amour qui ne sont pas les meilleurs écrits par Puccini, peu importe qui les chante. Mais Cavaradossi, c’est d’abord au premier acte de l’opéra le « dammi i colori » qui précède l’exaltation du « Recondita Armonia ». Et quand il s’agit de couleurs et d’éclat, Luciano l’emporte sans hésiter sur Franco.
Laurent Bury
Aux temps bénis de ma quasi-ignorance opératique, j’empruntai à la bibliothèque municipale une intégrale de Tosca en 33 tours (je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans…). Dans les rôles principaux, aux côtés d’une harpie scandinave et d’un perfide teuton que les connaisseurs identifieront sans peine, il y avait un authentique Italien, dont les élans passionnés semblaient infiniment plus convaincants que l’hystérie automatique de son amante ou que le fiel minutieusement dosé du chef de la police. Voilà pourquoi, à tous les ténors obèses qui faisaient craquer les tabourets sous leur poids, je préfère pour ma part la voix gorgée de soleil de Corelli.

 
Jean-Philippe Thiellay
Mario doit être courageux, impulsif, vaillant… Mario doit être… beau et s’il a un léger zozotement, cela n’en ajoutera que plus de charme aux yeux de sa Floria, littéralement dingue de lui. Mario, c’est Franco Corelli. Car, sérieusement, si le timbre de rêve de Pavarotti pouvait charmer la moindre donzelle, peut-on imaginer Big Lulu sauter de son estrade de peintre sans faire tout écrouler ? menacer physiquement Scarpia au II ? Quant à la vaillance vocale, le léger mauvais goût de Corelli se transforme en frissons lorsqu’il tient des heures le si bémol de « Vittoria, Vittooooooriiiiiiiia » (voir « F. Corelli à Parma 1961-1971 », chez Myto Records). Et pour cela, il est le seul. Corelli, 1 point !

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