C O N C E R T S
 
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PARIS
Théâtre musical du Châtelet
29/11/01

Dawn Upshaw - © Marie-Noëlle Robert 
L'amour de loin

Kaija Saariaho

sur un livret d'Amin Maalouf

Karol Szymanowski
Stabat Mater, op. 53

Direction musicale : Kent Nagano
Mise en scène : Peter Sellars
Décors : Georges Tsypin
Costumes : Martin Pakledinaz
Lumières : James F Ingalls
Technique Ircam

Clémence, comtesse de Tripoli : Dawn Upshaw
Le Pèlerin : Lili Paasikivi
Jaufré Rudel, prince de Blaye et troubadour : Gerald Finley

Choeur Accentus (direction : Laurence Equilbey)
Orchestre de Paris

 


Il est courant de se moquer du public conservateur et réactionnaire du Festival de Salzbourg, surtout depuis que Gérard Mortier a commencé à "ruer dans les brancards" il y a une dizaine d'années en proposant opéras du XXe siècle et mises en scène sulfureuses. Curieusement pour l'Amour de Loin (créé à Salzbourg le 15 août 2000), ce même public est porté aux nues puisqu'il a réservé un "énorme succès" à cette oeuvre. L'affiche est pourtant alléchante : le livret est de l'écrivain (primé au Goncourt 1993 pour le Rocher de Tanios) franco-marocain Amin Maalouf, la musique de Kaija Saariaho (dont les succès au disque et au concert sont loin d'être immérités) et la mise en scène de Peter Sellars (capable du pire dans les opéras du répertoire comme du meilleur dans les pièces contemporaines). La distribution n'est pas en reste, les noms de Kent Nagano, Dawn Upshaw et Gerald Finley étant rarement associés à de la médiocrité.

Pourtant la réunion de grands créateurs et interprètes n'a pas toujours été synonyme de qualité. Quand Debussy et D'Annunzio s'associent pour le Martyre de Saint Sébastien, créé par Ansermet et Ida Rubinstein, la création fut un four et l'oeuvre ne subsiste actuellement au concert que dans une version hybride, entre cantate et oratorio. De même pour Perséphone d'Igor Stravinsky/ André Gide/ Ida Rubinstein, qui n'est que fort rarement jouée. La liste est longue, et s'allonge encore avec cet Amour de Loin.

Que dire de la musique de Mme Saariaho ? Belle, chaude, sensuelle, raffinée, consonante, rassurante, sirupeuse, confortable, répétitive et peu variée. L'auditeur est baigné dans un environnement sonore chatoyant et mélodique, sans tensions... une belle musique d'ameublement. Plutôt décevant, vu la réussite d'autres pièces sorties récemment en CD (Graal Théâtre, Private Gardens,...). Le livret d'Amin Maalouf est en accord parfait avec la musique, dénué de toute action, de tout dramatisme. On se laisse bercer doucement avec ces deux heures de spectacle soporifique, dans une mise en scène que l'on croirait faite au ralenti, malgré de somptueux décors et costumes.

Pour parachever le tout, Mmes Upshaw et Paaskivili, ainsi que M. Finley chantent admirablement bien un sabir incompréhensible qui ressemble fortement à du français. Mention spéciale pour le choeur et l'orchestre, admirables interprètes en précision et en beauté sonore de cette partition -qui a tout de même une grande qualité, celle d'être très bien écrite pour les voix et très bien orchestrée.

Cette nouvelle création parisienne vient comme un cheveu sur la soupe, après les succès des reprises ou créations récentes de Outis (Luciano Berio), K... (Philippe Mannoury), le Conte d'Hiver (Philippe Boesmans) ou Trois Soeurs (Peter Eötvös).
 
 
 
 

Maxime Kapriélian
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