C O N C E R T S
 
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PARIS
02/03/2007
 
Jacques OFFENBACH (1819 – 1880)

LES BRIGANDS

Opéra bouffe en 3 actes créé le 10 décembre 1869
au Théâtre des Variétés à Paris
Version pour 15 chanteurs et 15 musiciens

Mise en scène : Stéphane Vallé, Loïc Boissier
Orchestration : Thibault Perrine
Scénographie : Florence Evrard
Costumes : Elisabeth de Sauverzac
Lumières : Philippe Lacombe
Chef de chant : Nicolas Ducloux

Pipo / Campo Tasso : Jean-Philippe Catusse
Falsacappa : Christophe Crapez
Domino / le caissier : Gilles Favreau
Le prince : David Ghilardi
Fragoletto : Emmanuelle Goizé
Le chef des carabiniers : Matthieu Heim
Gloria Cassis : Olivier Hernandez
Le précepteur / la marquise : Jeanne-Marie Lévy
Pietro : Ronan Nédélec
Fiametta / Le page : Charlotte Plasse
Zerlina / La duchesse : Camille Slosse
Fiorella : Marie-Bénédicte Souquet
La princesse : Ainhoa Zuazua Rubira
Carmagnola : Matthieu Cabanès / François Rougier
Barbavano : Chistophe Grapperon / Jacques Gomez

Compagnie Les Brigands
Direction musicale : Benjamin Levy

Athénée-Théâtre Louis-Jouvet,
Paris, le 2 mars 2007, 20h

 

Retour aux sources


Depuis le temps – 7 ans déjà – et les succès remportés - Ta bouche surtout mais aussi Toi, c’est moi, Le docteur Ox, etc. - la compagnie Les Brigands se devait d'interpréter son ouvrage éponyme.

L’entreprise ne se présente d’ailleurs pas sans risque. Difficile d’une part pour la troupe de Benjamin Levy de rater un tel rendez-vous. Compte tenu de la circonstance, la barre est un peu plus haute qu’à l’ordinaire ; l’attente du public plus forte.

Le format de l’opéra bouffe d’autre part dépasse largement le cadre des productions précédentes. Lorsque Offenbach compose Les brigands en 1869, l’heure des petites opérettes à trois personnages – celles que Jean-Christophe Keck, dans son dernier enregistrement, baptise opportunément « délice »– est révolue. Le compositeur, au faîte de sa gloire, dispose de ressources suffisantes pour concevoir des spectacles dont l’effectif et le style peuvent rivaliser avec le grand répertoire. Il suffit de faire le compte : Les Brigands comportent une vingtaine de rôles et requièrent à chaque acte des décors et des costumes on ne peut plus luxueux (palais du duc de Mantoue, ambassade espagnole…).

Dernier détail et non des moindres, l’œuvre a été mise en scène au début des années 90 à l’Opéra Bastille par les Deschiens avec un brio tel que le souvenir en reste définitivement gravé. Comment alors ne pas faire la comparaison, même si les moyens ne sont pas les mêmes ?



Autant de facteurs qui expliquent sans doute la déception que l’on éprouve à l’issue du spectacle. Avec un seul et unique décor, une partition réduite pour 15 musiciens, Les Brigands de l’Athénée font figure de parents pauvres. Mais, passe misère, c’est surtout la mise en scène, trop conventionnelle, que l’on déplore. L’intrigue de l’ouvrage, au contraire des opéras bouffe plus connus (La Grande Duchesse, La Belle Hélène, Orphée aux enfers, etc.) présente peu d’intérêt ; sa dimension satirique s’avère plus difficile à percevoir. Ce sont là d’ailleurs deux raisons de sa moindre renommée. Il faut alors pour emporter la partie déployer des trésors de fantaisie, ne pas illustrer simplement mais jouer sans limite la carte de la bouffonnerie. La réussite de la production des Deschiens reposait sur cette recette. A côté, Stéphane Vallé et Loïc Boissier paraissent bien sages. Il ne s’agit pas de rythme – la partition est suffisamment brillante pour que l’on ne s’ennuie jamais et, bien que l’orchestre sonne un peu maigre, Benjamin Lévy sait, à travers la musique, maintenir le mouvement - mais d’humour et d’humeur ; comme si les metteurs en scène avaient été intimidés par l’œuvre. Dommage…



Musicalement, comme toujours, l’esprit d’équipe prévaut. Et c’est tant mieux car Les Brigands proposent quantité d’ensembles (les finales des deux premiers actes mais aussi la grande scène d’entrée, le superbe « canon » des mendiants, le trio des marmitons, etc.) dans lesquelles la compagnie trouve matière à démontrer la qualité de son harmonie. Comme toujours aussi, au niveau individuel, l’interprétation d’Emmanuelle Goizé se détache du lot. Le jeune Fragoletto ne lui permet malheureusement pas d’user de ses charmes – sensualité et féminité – appréciés dans les productions précédentes mais, en reprenant un rôle qu’Offenbach composa pour l’affriolante Zulma Bouffar, elle répond sans nul doute aux intentions du compositeur. Elle est aussi la meilleure tant au niveau de la voix intrinsèque que de la technique vocale. Le reste de la troupe n’appelle pas les mêmes éloges. Curieusement même, les chanteurs se mettent au diapason de la mise en scène en se montrant plus ternes qu’à l’habitude, jusque dans leur jeu d’acteur.

En guise de consolation, on note que le spectacle se donne à guichet fermé ; preuve qu’il existe une véritable demande de la part du public pour ce type de répertoire. Forts de ce constat, Les Brigands doivent continuer, bon an, mal an, de défendre la musique légère. Puissent aussi les directeurs d’opéra à venir – Nicolas Joël, Jérôme Deschamps… – entendre le bruit de leurs bottes et reprendre à leur tour le combat.



Christophe RIZOUD

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