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GENES
26/11/04

James Valenti
© www.jamesvalenti.com
Leonard BERNSTEIN

CANDIDE

Opéra Comique en deux actes
Livret : Richard Wilbur
Textes chantés : John La Touche, Dorthy Parker, Stephen Sondheim
Lillian Hellman, Leonard Bernstein, John Wells, 

Candide : John Valenti
Cunégonde : Leah Partridge
Maximilian/C apitaine : Fabio Maria Capitanucci
Pangloss/Martin : Stefano Antoniozzi
La vieille dame : Tichina Vaughn
Vanderderdur/Gouverneur : Vittorio Grigolo
Paquette : Daniela Pini
Voltaire : Ugo Dighero
Baron/Cacambo/Grand Inquisiteur : Aldo Ottobrino

Direction Musicale : Giuseppe Grazioli

Mise en scène : Giorgio Gallione
Décors et costumes : Ivan Stefanutti

Orchestre et Choeurs du Teatro Carlo Felice
Chef des Choeurs : Ciro Visco

Vendredi 26 novembre 2004



Bernstein, l'Offenbach américain ? Et pourquoi pas. Mais combien nous semble plus proche le livret de ce Candide sauce Broadway (immortalité de Voltaire et des problèmes qu'il soulève dans son conte philosophique !) que toutes ces allusions salonardes Second Empire ! Et pourtant, à la création en 1956, un four complet pour celui qui avait déjà à son actif des musiques de film, West Side Story en gestation, des symphonies, des quatuors, et dirigeait rien moins que la Callas à Milan... 

L'oeuvre est hybride. Le texte joué et les interventions de Voltaire himself suivent assez fidèlement le roman. Font toujours mouche les allusions au fanatisme, à l'intolérance, aux malheurs de la guerre, à l'exploitation de l'homme par l'homme, à la cupidité et à la bêtise humaine. Bref, la substantifique moelle des volontés du Patriarche de Ferney est respectée. 

Musicalement, dès l'ouverture claquante, clinquante comme un grandiose feu d'artifices, on prend son pied. Un bain de lait continuel. Pas une seconde d'ennui, pas un temps mort. Les influences (des références admiratives pour le compositeur) sont nombreuses : Mahler, Chostakovitch, Puccini même dans les airs du ténor. L'oratorio pointe même son nez dans la scène de l'autodafé ou dans les choeurs mystiques.

On reste bien sûr dans le musical de pure souche américaine. Pour une "comédie musicale" jubilatoire, finalement inclassable dans son genre.

Candide demande un vrai ténor lyrique ou un chanteur de variété endurant. Le rôle-tire ne peut se satisfaire d'à-peu-près. Ses trois airs, sensuels, hyperboliques - donc communicatifs -, lents, truffés d'un sentimentalisme du meilleur aloi, font chavirer le public. James Valenti (habitué du grand répertoire) a mis, dès le premier, le public dans sa poche. Voix sans une once d'aspérité, aigu lumineux, timbre pur... à l'image du héros.

Très attendue - "Glitter and be gay" est désormais le tube que tout soprano colorature se doit d'avoir à son répertoire -, Leah Partridge n'en a fait qu'une bouchée... de bon pain. Bien en place, sa Cunégonde a tout pour séduire. 

Elle est solide, d'ailleurs, la distribution féminine génoise. La Old Lady de Tichina Vaughn (physique et voix alla Shirley Verrett) est désopilante et semble péter les plombs dans "I'm easily assimilited", la Paquette de Daniela Pini toute de sucre et de miel.

Côté masculin, on nage dans le luxe. Stefano Antoniozzi (vraie basse bouffe qui promène ses Don Pasquale, Melitone e tutti quanti... sur la planète) dessine et chante un Pangloss irrésistible de verve et de vis comica. 

Rien à jeter donc dans le reste de la distribution. On sent l'esprit de troupe, le plaisir de défendre une partition qui nous change de toutes ces âneries - certaines trouvent pourtant leur public - style Star Ac' ou Gladiateur...

Ajoutez à tous, en plus de leur talent de chanteurs, une réelle présence scénique, des dons de danseurs, acrobates et mimes... Un bonheur de tous les instants.

Il est vrai que Giogio Gallione joue à fond la carte du show à l'américaine et ne lésine pas sur les moyens mis en place : décors amovibles agréables, costumes luxueux, allusions politiques, pastiche d'opéra... Tout y passe dans ce spirituel et déjanté spectacle en perpétuel mouvement. Ca vole, virevolte, les gags abondent, on sourit, rit à gorge déployée. En dépit de la gravité des sujets abordés au fil de l'action et qui restent d'actualité. Un comble !

Au pupitre, le bondissant Giuseppe Graziole fouette, cravache l'Orchestre et les Choeurs du Carlo Felice et nous convainc que le musical risque bien d'être une forme d'opéra contemporain. En tout cas plus sympathique et moins rébarbatif que certaines créations subventionnées.
 
 

Christian COLOMBEAU
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