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ORANGE
31/07/04

Béatrice Uria-Monzon dans Carmen de Bizet
aux Chorégies d'Orange en 1998
© Photo Georges Gobet (AFP/Archives)
Carmen

Georges BIZET

Direction Musicale : Myung-Whun Chung
Mise en scène - scénographie : Jerome Savary
Chorégraphie : Laurence Roussarie
Costume : Michel Dussarat

Orchestre Philharmonique de Radio France
Choeur de l'Opéra de Nice - Toulon - Avignon
Ensemble Vocal des Chorégies
Ballet de l'Opéra-Théâtre d'Avignon
Maîtrise des Bouches-du-Rhône

Carmen : Béatrice Uria-Monzon
Micaëla : Norah Amsellem
Frasquita : Catherine Dune
Mercédès : Karine Deshayes

Don José : Roberto Alagna
Escamillo : Ludovic Tézier
Zuniga : Nicolas Cavalier
Le Remendado : Gilles Ragon
Le Dancaïre : Olivier Grand
Morales : Didier Henry
Lillas Pastia : Jean-Philippe Corre

Orange, Théâtre Antique, 31 Juillet 2004



Pilier du Mur d'Orange depuis 1961, la Carmen 2004 ne laissera pas un grand souvenir. Tout semblait réuni pour avoir un grand et beau spectacle : une distribution de haut niveau, un metteur en scène de qualité, un chef qui aime l'ouvrage.

Que s'est-il donc passé ? Et bien justement, les espoirs mis dans l'équipe en ont déçu plus d'un. Savary aux abonnés absent, un ténor vedette qui n'a pas voulu apprendre les récitatifs et dialogues, des coupures en veux tu en voilà dans la partition (une honte pour tous !), un chef manifestement malheureux... Bref, la mayonnaise n'a pas pris.

Jérôme Savary nous avait habitués à mieux. Là, il se moque carrément du public. Rien, zéro, un vide abyssal consternant dans cette production destinée au Japon : des entrées et des sorties convenues, des clichés, des poncifs, une imagerie naïve d'Espagne de pacotille, des costumes - pourtant fabriqués à Madrid, par souci d'authenticité ? - clinquants et laids sortis tout droit d'un show de travestis, un ballet qui frise le ridicule, des échassiers et feux de Bengale (?), un permanent amateurisme, entre Michou et la Grande-Eugène, des images inutiles pour meubler les entractes musicaux, des contresens inouïs comme ces soldats mutilés et chevaux morts enneigés au troisième acte...Que tout cela sent l'à-peu-près, le manque de travail, de concertation, de professionnalisme. D'amour, tout simplement.

Privé des images, il restait au spectateur la musique et le chant.
Là encore... il fallut bien... déchanter. Le pire était à venir avec d'inadmissibles coupes continuelles dans la partition (choeur des cigarières, des contrebandiers, presque tous les récitatifs) pour avoir droit, finalement, à un défilé d'airs, duos, trios, quatuors sans presque aucun lien dramatique. 

Réduite à un tas de chiffons bleus, Nora Amsellem n'a rien compris au rôle de Micaëla et vocalement sa prestation est indigne. Pas toujours dans la portée, mettant en difficulté son ténor au premier acte, elle a fait de son grand air une bouillie immonde, indigne d'un tel festival. Dans la fosse, le maestro, s'ennuie puis semble surpris des applaudissements du public qui n'y voit que du feu et hurle à tout rompre. Vox Populi, Vox Dei...

Ludovic Tézier a campé, lui, un fort honnête Escamillo. Quel sale rôle tout de même...

Excellents, en revanche,  tous les seconds rôles : Ragon, Grand, Cavallier, Henry, Dune et Deshayes apportaient un peu de soleil dans une soirée bien triste.

Annoncé à grand renfort de publicité, le premier Don José français de Roberto Alagna n'aura séduit que ses inconditionnels. Sans doute fatigué par une longue série de Faust londoniens, on a cherché en vain chez l'artiste un brin de présence en début de soirée. En seconde partie, une défonce totale - les élans véristes lui vont si bien - ne pourra cacher les nombreuses approximations musicales et vocales, un timbre terne, sans attraits.

On ne peut alors que relever le courage et le métier (et elle en a pour avoir accepté de participer à ce gâchis, cette parodie d'opéra) de Béatrice Uria-Monzon. Rien à dire. Le physique et la voix du rôle, une musicalité de tous les instants, aucune once de vulgarité dans le jeu, simplement parfaite. Comme toujours.

Myung-Whun Chung, affichant une mine boudeuse tout au long de la soirée, ne pouvait faire des miracles. Carrément symphonique, sa direction alterne fulgurances et lourdeurs. Comme beaucoup il reçut, aux saluts, une petite bronca toute méditerranéenne.
 
 

Christian COLOMBEAU
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