C O N C E R T S
 
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NEW-YORK
20/05/2006
 
Gaetano DONIZETTI (1797-1848)

L’Elixir d’amour

Melodramma giocoso en deux actes
Livret de Felice Romani

Adina : Ruth Ann Swenson, Act I
Adina : Olivia Gorra, Act II
Nemorino : Giuseppe Filianoti
Belcore : Peter Coleman-Wright
Dr. Dulcamara : Alessandro Corbelli
Giannetta : Alyson Cambridge

Direction  : Maurizio Barbacini

Production : John Copley
Dramaturgie : Sharon Thomas
Décors : Beni Montresor
Lumières : Gil Wechsler

Chœurs et orchestre du Metropolitan Opera

New York, le 20 mai 2006
(matinée)

ADINA MANQUE D’ELIXIR

 
Maintes fois repris, le spectacle du Metropolitan nous est également connu par la captation vidéo réunissant Luciano Pavarotti, Kathleen Battle et l’ineffable Enzo Dara.

Pour cette nouvelle édition, on pouvait craindre une représentation de routine mais ce n’est heureusement pas le cas et le spectacle fonctionne parfaitement : un bon dosage entre la comédie, sans ces excès de gags visuels qui gâchent parfois certaines production en les noyant sous un flot de rires. L’Elixir n’est pas en effet un opéra bouffe, mais une sorte de comédie romantique où l’humour côtoie en permanence l’émotion. Les décors du bien nommé Beni Montresor sont dans des tonalités très chaudes, un camaïeu de roses et de jaune. Les costumes sont également colorés mais pas particulièrement inventifs.

Succédant à une impressionnante série de ténors de premier plan (1), Giuseppe Filianoti relève le gant et campe un superbe Nemorino : la voix est puissante, le timbre riche et le chant admirablement maîtrisé, à l’exception de quelques instabilités dans des suraigus facultatifs (2). A peine pourrait-on regretter un manque de vulnérabilité dans un personnage plus timide que fragile. A cette réserve près, son Nemorino emporte l’adhésion et sera accueilli par une véritable ovation au rideau final.

Annoncée souffrante en lever de rideau, Ruth Ann Swenson se donne à 100% mais a du mal à tenir la distance, les aigus des vocalises rapides devenant de plus en plus tendu à mesure que l’acte s’écoule. Finalement, le soprano jette l’éponge pour le second acte, remplacée par la jeune Olivia Gorra. La voix de cette jeune artiste est encore très verte, sans beaucoup de corps et au volume limité ; elle est en revanche déjà techniquement irréprochable. Ce n’est pas la révélation dont on aurait aimé avoir la surprise, mais du aura-t-elle sauvé le spectacle de façon très honorable.

Peter Coleman-Wright est un Belcore de belle allure, compensant un manqué d’italianité par une certaine rondeur dans le chant. Le personnage est bien campé, sans vulgarité, et le tout est bien chanté.

Succédant lui aussi à une série impressionnante de Dulcamara, Alessandro Corbelli n’a pas, lui, la rondeur d’un Enzo Dara ou d’un Gabriel Bacquier. Son personnage est sans doute plus fin, mais il ne convainc pas tout à fait. Vocalement, on pourra apprécier des timbres plus riches et des émissions moins nasales, mais l’artiste reste un habile technicien.

La finesse n’est pas en revanche ce qui étouffe Maurizio Barbacini dont la baguette un peu lourde gomme les légèretés de la partition pour la transformer en musique pour orphéon de province.

La partition comporte hélas toutes les coupures traditionnelles : la récente production de Bastille nous a pourtant démontré tout l’intérêt de donner l’ouvrage avec l’ensemble de ses reprises : Donizetti connaissait mieux son affaire que les pauvres « cisailleurs » de partition  qui s’acharnent à couper 1 à 2 minutes de musique par ci par là, sans qu’on en comprenne la raison.

Une représentation « honnête » mais qui ne restera pas dans les mémoires et qui vaut surtout pour un ténor indéniablement à suivre.



Placido Carrerotti



Notes

(1) Bergonzi, Pavarotti, Kraus, Vargas, Alagna, Araiza pour ne citer que les plus prestigieux ténors qui s’y sont illustrés durant ces 20 dernières années.

(2) Les réserves de Filianoti dans le suraigu étant assez impressionnantes, on peut imaginer un quelconque problème de santé : en effet, lors des représentations précédentes, le jeune ténor avait montré une certaine fatigue


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