C O N C E R T S 
 
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MONTREAL
06/04/03

Renée Fleming
© Yves Renaud
Récital Renée Fleming

WOLFGANG AMADEUS MOZART
Le Nozze di Figaro - Ouverture

GEORG FRIEDRICH HANDEL
Samson - "Let the bright Seraphim"

CAMILLE SAINT-SAËNS
Samson et Dalila - Bacchanale

JULES MASSENET
 Manon - "Je suis encore tout étourdie"
Manon - "Allons ! ... Adieu, notre petite table"

CHARLES GOUNOD
Faust - Air des bijoux : "Ô Dieu... Ah ! je ris de me voir si belle"
 

GIUSEPPE VERDI
La Forza del destino - Ouverture

GIACOMO PUCCINI
Gianni Schicchi - "O mio babbino caro"

RUGGERO LEONCAVALLO
I Pagliacci - "Qual fiamma... Stridono lassù"

PIETRO MASCAGNI
Cavalleria rusticana - Intermezzo

FRANCESCO CILEA
Adriana Lecouvreur - "Ecco... Io son l'umile ancella"

ALFREDO CATALANI
La Wally - "Ebben ? Ne andrò lontana"

JOHANN STRAUSS II
Polka "Unter Donner und Blitz", op. 324

ERICH WOLFGANG KORNGOLD
Die tote Stadt - Chanson de Marietta : "Glück, das mir verblieb"

RICHARD STRAUSS
Cäcilie, op. 27/2

Bis :

GIUSEPPE VERDI
Brindisi : "Libiamo ne' lieti calici"
avec Marc Hervieux (et le public !) 

B. HAMMOND
"Over the rainbow"

GEORGE GERSHWIN
Porgy and Bess - "Summertime"

Renée Fleming, soprano

Orchestre Symphonique de Montréal
Direction : Richard Bado

Salle Wilfrid-Pelletier - 06 avril 2003


Quand Renée Fleming chante Renée Fleming...

On sort rarement entièrement satisfait d'un récital, surtout lorsqu'il s'agit d'un récital d'une grande diva internationale au répertoire particulièrement éclectique : ayant acheté votre billet six mois à l'avance sur un programme indéterminé, vous avez bien souvent la désagréable surprise de découvrir au début du spectacle que parmi les oeuvres qui vont être interprétées, il s'en trouve certaines à qui vous avez toujours refusé l'insigne honneur d'entrer dans votre discothèque personnelle. Or, le récital de Renée Fleming donné dimanche après-midi salle Wilfrid Pelletier est un de ces spectacles qui parviennent à vous convaincre exactement du contraire et vous font ressortir malgré tout avec un vague sourire béat aux lèvres. Et pourtant ce ne sont pas les motifs de mécontentement qui manquaient dimanche après-midi : une acoustique funeste qui vient ruiner "Let the bright Seraphim", un chef aux trémoussements comiques et qui dirige (ou tente de diriger) tantôt au ralenti, bien loin de la "Folle journée" mozartienne, tantôt de manière expéditive (dans la polka de Strauss), ou encore avec une grâce éléphantesque dans la bacchanale de Saint-Saëns... 

Mais heureusement, et c'était là l'essentiel, il y avait Renée : son charme physique indéniable bien mis en valeur par une exquise robe mauve, son sourire angélique, son investissement sans faille, sa générosité (3 bis en sus d'un spectacle bien rempli). Femme coquette dans l'air délicieusement kitsch des bijoux, femme fatale dans Manon, femme amoureuse et désespérée dans Gianni Schicchi, femme muse chez Strauss, la "diva Flamby" parvient à être tout ça à la fois. Bien sûr, tout cela a été soigneusement étudié et répété (la belle a médité Diderot et son Paradoxe sur le Comédien), mais cette préparation ne fait qu'enrichir son interprétation. Le tout est couronné par des moyens vocaux exceptionnels qui ne lui font à aucun moment défaut : un timbre crémeux et riche, sans aucune aspérité ni sécheresse, un souffle infini (mais respire-t-elle vraiment !?), des pianissimi filés et langoureux à souhait dans "O mio babbino caro" (le petit Flamby prend 30% de matières grasses supplémentaires d'un coup), qui n'excluent pas la fantaisie et la frivolité dans les extraits de Manon et de Faust. Malgré sa prédilection pour les répertoires italien et français, c'est dans les extraits de Korngold et de Strauss que le talent de Fleming prend toute sa mesure : diction exemplaire (contrairement au Gounod où les consonnes sont toujours un peu avalées), rehaussée de splendides couleurs irisées et mordorées dans la voix... Jamais peut-être on n'a été aussi proche de la perfection... Sensible au triomphe qui lui est fait pour sa première prestation montréalaise, la diva nous donne en autres bis un extrait de La Traviata, rôle qu'elle va aborder pour la première fois à l'Opéra de Houston dans quelques jours avant de le reprendre au Met en septembre. 

Renée Fleming et Richard Bado 
© Yves Renaud

Dans un programme superbement illustré, Bernard Labadie, le nouveau directeur artistique de l'Opéra de Montréal, nous assure que ce concert n'est qu'un début et qu'il entend offrir à la métropole "la vitrine lyrique brillante et bouillonnante de vie qu'elle mérite" : le fait que le concert de dimanche fît salle comble - contrairement à toutes les productions montées cette saison) - et ce malgré le prix des billets, montre qu'il y a au Québec un public jeune, mélomane et enthousiaste, prêt à répondre présent pour autant qu' on lui propose des spectacles de qualité. 

Un des principaux défis de Bernard Labadie, chef issu de la mouvance baroque, et qui veut faire du répertoire baroque et contemporain des piliers de sa nouvelle programmation, sera justement d'attirer ce nouveau public sans heurter sa clientèle traditionnelle aux goûts assez conservateurs, le tout dans une salle à l'acoustique médiocre... Y arrivera-t-il ? C'est tout ce qu'on lui souhaite...
 
 

Rémi Bourdot
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