C O N C E R T S 
 
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METZ
14/10/03

Dominic NATOLI
Gustave III 

Opéra de Giuseppe VERDI

Livret d'Antonio Somma

Reconstruction hypothétique de P. Gossett 
et I. Narici (Editions musicales Ricordi)
 

Gustavo III : Dominic NATOLI
Amelia : Brigitte ANTONELLI
Ankastrom : Marc MAZUIR
Ulrica : Patrizia PATELMO
Oscar : Laure BAERT
Cristiano : Marc FOUQUET
Ribbing : Guillaume ANTOINE
Dehorn : Jean-Louis DUVAL
Il Giudice : Paul KIRBY

Choeurs et Ballet de l'Opéra-Théâtre de Metz
Ensemble Mille e tre
Orchestre National de Lorraine
Direction : Janos FÜRST

Mise en scène : Laurence DALE
Décors : Hartmut SCHÖRGHOFER
Costumes : Katrin KÖHLER
Éclairages : Dominique BORRINI
Chorégraphies : Patrick SALLIOT

Nouvelle coproduction avec l'Opéra de Dijon
Opéra Théâtre de Metz, le 14 octobre 2003



GUSTAVE III, LE RETOUR

Pour sa première saison messine, Laurence Dale avait décidé de mettre à l'affiche le rare Gustave III d'Auber, ouvrage pour lequel il avoue une certaine fascination, et de le monter en parallèle avec Un Ballo in Maschera qui exploite la même trame. Puis, apprenant que la partition reconstituée de la première mouture verdienne, Gustavo III, était disponible, il opta pour cette dernière. Je n'entrerai pas dans les détails de cette "reconstruction hypothétique", Yonel Buldrini s'en est chargé avec la culture et le brio que nous lui connaissons. Je ne m'engagerai pas plus dans le débat qui oppose ceux pour lesquels cette partition est une simple supercherie et ceux qui lui reconnaissent un réel intérêt musicologique. Il est certain cependant que le parallèle avec le Grand Opéra historique d'Auber est ici bien plus frappant et que, comme l'affirme Laurence Dale dans le programme du spectacle, "cela sonne plus français ". L'expérience valait donc la peine d'être tentée, d'autant que si elle met en évidence certaines similitudes, elle permet également de mesurer toute la différence qui existe entre l'art agréable d'Auber qui privilégie le rythme et les éléments spectaculaires, et celui de Verdi qui s'attache davantage à l'expression des sentiments de ses personnages.

Ce Gustavo III est présenté dans le même dispositif scénique que son grand frère français, quoique décliné sur une tonalité plus sombre qui donne à l'ouvrage un caractère dramatique plus accentué. Le décor ingénieux permet à nouveau des enchaînements rapides tandis que les costumes respectent le cadre historique. Nous retrouvons l'étrange cylindre dans lequel la sorcière fait son apparition, le grand escalier de la scène du gibet et les animaux légendaires suspendus au dernier acte. Le char doré ne sert plus à Gustave pour faire son entrée, mais réapparaît cependant dans le finale. Laurence Dale écarte à nouveau toute tentation de relecture et utilise cette fois encore des panneaux mobiles pour isoler les scènes intimistes. Il se montre, par contre, un peu moins inspiré dans sa direction d'acteurs, parfois très conventionnelle. La présentation scénique reste très attractive et l'on apprécie en particulier des images d'une grande beauté dans la scène du gibet et le finale.

Laurence Dale a souhaité travailler pour cette production avec de jeunes chanteurs prêts à s'investir réellement dans leurs rôles. Le roi est chanté par le ténor australien Dominic Natoli, pâle Elemer à Nancy la saison passée mais qui affiche ici des qualités intéressantes. La voix est solide et saine, le timbre séduisant, l'artiste a de la prestance, mais l'émission manque parfois de liberté et l'expression de nuances. Brigitte Antonelli apparaît comme l'élément le plus faible de la distribution avec une voix trémulante, à l'aigu extrêmement douloureux. Le registre grave est en revanche bien assumé et l'artiste montre une réelle sensibilité dans sa prière puis dans son grand air du troisième acte. Sans doute mériterait-elle d'être entendue dans un rôle plus conforme à ses moyens. Marc Mazuir donne quelques signes d'engorgement à son entrée, mais se libère rapidement et séduit alors par l'homogénéité et la noblesse du timbre ainsi que par un beau legato. Il est particulièrement convaincant dans son air de la vengeance.

Récente lauréate du concours national des Voix d'or, la jeune Laure Baert campe un Oscar très prometteur et plein de vitalité, avec un physique juvénile et un timbre très frais. Cette voix légère se révèle tout à fait à l'aise dans les passages de virtuosité. Comme dans Gustave III, on retrouve la sorcière de la Sicilienne Patrizia Patelmo avec les mêmes atouts (un timbre prenant et une présence scénique convaincante) et les mêmes défauts d'instabilité de la voix. A l'arrivée, elle nous offre une Ulrica très intéressante, sans ces poitrinages excessifs qui hypothèquent les prestations de beaucoup de ses consoeurs. Enfin, les seconds rôles sont nvenablement distribués.

J'ai apprécié la direction musicale du chef hongrois Janos Fürst, très attentif à la dynamique et qui assure un excellent équilibre entre la fosse et le plateau. Il confère beaucoup d'animation aux ensembles, très enlevés et réussis. La prestation de l'Orchestre National de Lorraine ne nous a, en revanche, pas pleinement convaincus. Il sonne parfois assez pauvrement sans que l'on sache mesurer exactement la part imputable à l'acoustique assez sèche de la salle. L'application et l'implication des choeurs méritent en revanche d'être soulignées, alors que le ballet fait une discrète apparition au dernier acte. Aux saluts, Laurence Dale fait monter sur scène machinistes et instrumentistes. Ainsi tous les participants de cette passionnante double production auront été mis à l'honneur. Il nous faut une fois encore saluer l'engagement, remarquable, de toutes les forces de l'Opéra de Metz, une scène vivante et dynamique qui mérite désormais toute notre attention. Prochain rendez-vous : la Médée de Cherubini.
 
 
 

Vincent Deloge



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Pour aller plus loin, lire  dans la revue Forum Opéra :

* le dossier  de Yonel BUKDINI consacré au Gustavo III de Verdi

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