OPERAS - RECITALS - CONCERTS LYRIQUES
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PARIS
19/09/2007
 
Thomas Hampson
© Pietra Spola
www.hampsong.com


RECITAL
Thomas Hampson, baryton
Wolfram Rieger, piano

Franz Liszt (1811-1886)

Im Rheim, im schönen Strome
Anfangs wollt' ich fast verzagen
Vergiftetsind meine Lieder
Ihr Auge
Es rauschen die Winde
Die drei Zigeuner

Gustav Mahler (1860-1911)

Lieder eines fahrenden Gesellen:

Wenn mein Schatz Hochzeit macht
Ging heut' morgens übers Feld
Ich hab' ein glühend' Messer
Die zwei blauen Augen

Entracte

Gustav Mahler (1860-1911)

Des Knaben Wunderhorn (extraits) :

Der Tamboursg'sell
Lied des Verfolgten im Turm
Wo die schönen Trompeten blasen
Das irdische Leben
Das himmlische Leben
Urlicht

Bis

Gustav Mahler

Phantasie
Bald gras ich' am Neckar
Wer hat dies Liedlein erdacht ?

Paris, Théâtre des Champs Elysées
19 septembre 2007

Jeanine Roze Production

Thomas l'enchanteur


Pour ce récital au Théâtre des Champs-Elysées, Thomas Hampson n'a pas opté pour la facilité en proposant une série de lieder au climat sombre et pessimiste. Ce programme exigeant et remarquablement construit s'ouvre avec six mélodies de Liszt qui annoncent d'emblée la couleur: les trois premières, sur des textes de Heinrich Heine (1), constituent une variation sur le thème de l'absence de l'être aimé, que les deux suivantes reprennent avec, en filigrane, l'évocation du désespoir et de la mort. Le cycle s'achève avec le superbe Die drei Zigeuner, qui évoque le désenchantement de la vie. Ces deux thèmes ainsi posés, seront développés successivement dans les Lieder eines fahrenden Gesellen et les extraits judicieusement choisis du Knaben Wunderhorn de Mahler, musicien fétiche du baryton américain depuis près de vingt ans, à qui est dévolue la part belle de ce concert.

C'est en effet dans les années 80 que Thomas Hampson s'initie auprès de Leonard Bernstein, autre grand mahlérien, à l'univers si particulier du compositeur autrichien. Depuis, Mahler figure régulièrement en bonne place dans les récitals de Thomas Hampson tant au disque qu'au théâtre. On se souvient encore du concert exceptionnel que le baryton a donné avec Wolfram Rieder au Châtelet en 1996, au profit de la Bibliothèque Gustav Mahler, où figuraient déjà les Lieder eines fahrenden Gesellen et quelques pages du Knaben Wunderhorn, cycle qu'il reprendra en octobre 2001, toujours au Châtelet et toujours avec Wolfram Rieder, lors d'un autre concert publié en DVD (2).

Il est intéressant de constater à quel point, avec les années, Thomas Hampson a mûri son interprétation. Le timbre s'est assombri sans rien perdre de ses qualités intrinsèques, ce qui confère aux Lieder eines fahrenden Gesellen une couleur plus âpre en totale adéquation avec les thèmes mortifères du cycle qui trouve ici sa version la plus aboutie.

De même, les différents affects des extraits du Knaben Wunderhorn sont exaltés avec une remarquable acuité. On pourrait multiplier à l'envi les exemples: l'émotion contenue du petit tambour qui quitte son cachot pour aller vers la potence (Der Tamboursg'sell), le cri du prisonnier avide de liberté qui contraste avec les vers insouciants de la jeune fille (Lied des Verfolgten im Turm) , ou la plainte naïve de l'enfant affamé (Das irdische Leben).

On ne sait ce que l'on doit admirer le plus chez cet artiste: la richesse infinie des coloris, la dynamique exceptionnelle, du forte le plus claironnant au plus impalpable pianissimo ("Der Liebe dahin!", exhalé comme un dernier souffle à la fin de Es rauschen die Winde de Liszt), la maîtrise absolue de la voix mixte (dont l'effet est saisissant dans l'ultime vers de Die zwei blauen Augen) ou la perfection insolente de la diction et cette faculté de rendre justice à chaque mot, sans la moindre affectation, sans sophistication déplacée, avec un chant naturel, une spontanéité immédiate qui semblent sortir des tripes. En somme du très grand art.

Trois bis, également extraits du Knaben Wunderhorn complètent judicieusement ce programme sur une note plus légère et c'est avec le charmant Wer hat dies Liedlein erdacht que le baryton, un sourire malicieux aux lèvres, conclura sa prestation.

Plus qu'un accompagnateur, Wolfram Riedel se révèle un partenaire dont l'osmose avec le chanteur est totale. La complicité qui unit les deux artistes depuis tant d'années fait ici merveille; d'ailleurs, au salut final le baryton s'effacera pour laisser seul face au public le pianiste, dont le jeu remarquable d'intelligence et de clarté lui vaudra un succès personnel amplement mérité.

On restera longtemps hanté par ce récital grave et envoûtant.
Chapeau bas, Messieurs !


Christian PETER


Notes
(1) Deux de ces poèmes ont été également mis en musique par Schumann: Im Rhein, im heiligen Strome dans Dichterliebe (Les Amours du poète) et Angfangs wollt' ich fast verzagen dans les Liederkreis opus 24. Ces deux cycles figurent aussi au répertoire de Thomas Hampson.


(2) Un DVD TDK dans la série "Les voix de notre temps".

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