C O N C E R T S
 
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STRASBOURG
14/03/2004

Soile Isokokski
© Ondine
Récital Soile Isokoski
 

Soile Isokoski, soprano
Marita Viitasalo, piano
Anna-Maija Korsimaa, clarinette
Riita Pesola, violoncelle
 

Johannes Brahms
Liebestreu
Der Tod, das ist die kühle Nacht
Das Mädchen spricht
Junge Lieder I

Toivo Kuula
Sinikan laulu
Paimenet
Marjatan laulu

Olli Kortekangas
Täùä hetki - Dieser Augenblick
pour soprano, piano, clarinette et violoncelle 

Franz Schubert
Auf dem Strom pour soprano, violoncelle et piano
Mignon I
Lieder der Mignon
Sehnsucht
Mignon
Der Hirt auf dem Felsen
pour soprano, clarinette et piano

Opéra de Strasbourg, 14 mars 2004



Les pays nordiques ont le secret de ces voix amples et généreuses. De ces voix d'une richesse inépuisable qui ont grandi sous le soleil de minuit. Sigrid Onegin et Kirsten Flagstad hier, Karita Mattila, Anne Sofie von Otter et Soile Isokoski aujourd'hui sont les éblouissantes ambassadrices de cette tradition. 

Bien que très présente à l'opéra, c'est bien dans le cadre intimiste du récital que Soile Isokoski se dévoile totalement, jouant de sa stature et de son autorité scénique avec une économie d'effets qui donne sens au moindre de ses gestes. Le matériau vocal n'a a priori rien d'exceptionnel, mais l'artiste finlandaise le transcende et allie à un médium riche des aigus solaires. Le chant est d'une grâce et d'une sûreté sans faille, la palette de couleurs et d'émotions d'une diversité remarquable.

Le programme, sans avoir une thématique musicale ou poétique particulière, se révèle néanmoins d'une grande cohérence : univers de désolation où les larmes se joignent aux adieux, parfois éclairés par la chanson d'une jeune fille (Junge Lieder de Brahms) ou la berceuse rassurante d'une mère (Marjatan laulu de Kuula). Les figures féminines s'y succèdent sans jamais se ressembler.

On aurait pu croire que les mélodies finlandaises, entourées de celles de Brahms et Schubert, n'étaient là que pour populariser un répertoire méconnu en France. C'est avec bonheur que l'on découvre qu'elles constituent au contraire le coeur du programme. Les trois mélodies de Toivo Kuula n'ont rien à envier mélodiquement à un Tchaïkovski, et ne sont pas sans évoquer par leur univers harmonique et poétique le symbolisme de Böcklin (au-delà du rapport évident entre La Chanson de Sinikka et l'Ile des Morts). La pièce d'Olli Kortekangas, Cet Instant, constitue par son effectif (soprano, piano, clarinette et violoncelle) et sa durée le point culminant du récital. Du cri au chuchotement, l'oeuvre demande beaucoup des interprètes mais aussi du public. Le sentiment qui naît à l'écoute de ces pages est une inquiétude mêlée de fascination, due en partie à la combinaison des timbres des différents instruments.

Le cycle Schubert réserve également quelques surprises : autour de la figure mythique de Mignon, les lieder avec violoncelle ou clarinette sont des joyaux d'une infinie beauté. Der Hirt auf dem Felsen atteint une plénitude et une intensité remarquables, et fait écho à l'oeuvre de Kortekangas sur un mode plus jubilatoire.
Envoûtant comme une aurore boréale.
 
 
 

Sévag TACHDJIAN
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