C O N C E R T S
 
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BREST
25/01/2006
 
Philippe Jaroussky, contre ténor

Première partie :
Antonio Vivaldi (1678-1741)
Sinfonia en do majeur

Georg Friedrich Händel (1685-1759)
« Dover, giustizia, amor », extrait d’Ariodante
« Penna tiranna », extrait d’Amadigi di Gaula

Vivaldi
Sinfonia RV 116

Händel
« Aure deh per pietà », extrait de Giulio Cesare
« Venti turbini », extrait de Rinaldo

Seconde partie :
Vivaldi
« Frema pur », extrait d’Ottone in villa
« Mentre dormi », extrait de l’Olimpiade
Concertos pour deux violons en ré majeur*
« Vedro con moi diletto », extrait de Giustino
« Se in ogni guardo », extrait d’Orlando finto pazzo

Philippe Jaroussky (contre-ténor)
Ensemble Matheus
Jean-Christophe Spinosi (violon et direction)
Laurence Paugam (violon)*

Brest, Théâtre du Quartz, le 25 septembre 2006

Jaroussky est-il versatile ?


A Brest, Jean-Christophe Spinosi et l’Ensemble Matheus jouent, comme toujours, en terrain conquis, devant une salle aussi comble qu’enthousiaste. Pas question cependant de se reposer sur ses lauriers.

La Sinfonia en Do de Vivaldi, Spinosi et Matheus l’ont déjà beaucoup jouée, et même enregistrée, en remplacement de l’Ouverture absente d’Orlando Furioso. Ici pourtant ils la réinventent, arrêtant de privilégier les angles et les nuances rythmiques, ne faisant plus avancer la musique par à-coups, mais la parant de sonorités plus homogènes et rondes – et on comprend que cette évolution est normale pour ces artistes toujours à la recherche de nouvelles expériences. Place ensuite à Händel, où on sent que les musiciens de l’ensemble pourraient bien devenir aussi intéressants que dans Vivaldi, tant les phrases sont amoureusement sculptées, avec un enthousiasme toujours aussi communicatif. Cet écrin est idéal pour le chant versatile de Philippe Jaroussky, aussi à l’aise dans les pyrotechnies de « Dover, giustizia » ou de « Venti turbini » que dans les grandes lignes de « Penna tiranna », le comble de la beauté sonore et de l’expressivité étant atteints dans un « Aure deh per pietà » en apesanteur, peuplé de doutes et de silences éternels, qui laisse… sans voix ! Jaroussky osera-t-il un jour Jules César ? On ne sait, mais s’il se révélait dans tout le rôle aussi captivant que dans ce seul air, nous tiendrons à coup sûr une incarnation anthologique.
   
Malgré tout, on ne souhaite pas voir le contre-ténor délaisser Vivaldi (et heureusement, il ne le fait pas) ! Des extraits d’Ottone in villa, de l’Olimpiade, de Giustino, et d’Orlando finto pazzo, on ne sait lesquels étaient les plus justement interprétés. Ici la tendresse, la rage, l’angoisse, l’autorité, le désespoir et l’euphorie sont tous présents, mais toujours parfaitement à leur place, ne véhiculant de toute façon rien d’autre chez le spectateur qu’une profonde émotion, de celles que l’on ne ressent qu’en présence des grands artistes. Comme dans « Aure deh per pietà », Spinosi aimera à la fin de « Mentre dormi » et de « Vedro con moi diletto », faire durer le silence très longtemps entre la dernière note et le début des applaudissements. On le remerciera de nous faire goûter, en plus des plaisirs de sa direction impliquée, au recueillement de ces précieuses secondes.



Clément TAILLIA
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