C O N C E R T S
 
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PARIS
Opéra Bastille

10/12/2001

 
La Khovantchina
Modeste Petrovitch Moussorgski

Direction : James Conlon
Orchestre et Choeur de l'Opéra National de Paris
Choeur d'enfants de l'Opéra National de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine

Mise en scène : Andrei Serban
Décors et costumes : Richard Hudson
Chorégraphie : Laurence Fanon

Vladimir Ognovenko : Prince Ivan Khovanski
Vladimir Galouzine : Prince Andrei Khovanski
Robert Brubaker : Prince Vassili Golitsine
Anatoli Kotscherga : Dosifei
Larissa Diadkova : Marfa
Valeri Alexeev : Chakloviti
Konstantine Ploujnikov : Le clerc



 

Lundi 10 décembre à l'Opéra Bastille : première de la nouvelle production de La Khovantchina. L'oeuvre est longue (environ trois heures de musique), aussi le rideau se lève-t-il une demi-heure plus tôt que l'horaire habituel, et les deux entractes sont réduits à un minuscule quart d'heure. C'est un bien, car ainsi le public n'a pas le temps de se déconcentrer, de sortir de cette intrigue aride et tarabiscotée.

La salle n'est pas tousseuse, ce qui est rare pour un soir très froid de décembre, mais c'est encore pire : la salle est renifleuse ! De beaux instants de musique gâchés par des bruits de remontées glaireuses émis par des individus auxquels on prêterait bien un mouchoir, qu'ils cessent une fois pour toutes ce bruit infernal !

Un premier coup d'oeil au programme a de quoi inquiéter : mise en scène d'Andrei Serban, chorégraphie de Laurence Fanon (celle qui faisait se promener des insectes en brouette dans Ariodante l'an passé). Divine surprise, si l'on frôle quelques rares fois la vulgarité ou le ridicule (le feu d'artifice miteux de la fin de l'acte IV, les ménagères qui frappent les streltsi à coup de balai), on ne s'y vautre jamais. Au contraire, la mise en scène est classique, les personnages convenablement dirigés, les mouvements de foule bien montés, Andrei Serban parvient presque à rendre intelligible une intrigue incompréhensible pour le commun des mortels, sauf à être spécialiste de l'histoire de la Russie ! Un travail qui ne valait en tout état de cause ni les huées ni les acclamations dont il a été couvert à l'issue du spectacle (habitude des premières bastillaises ?)

La chorégraphie est tout aussi classique, à base de danse folklorique obligée, de balalaïka et de danseuses de harem. Les costumes sont jolis, et grâce à un code de couleur, on arrive à repérer du premier coup d'oeil parmi les nombreux figurants et choristes qui sont les streltsi, qui sont les Moscovites et qui sont les mercenaires du tsar, ce qui n'est pas si simple, et qui facilite grandement l'intelligibilité des situations. Les décors sont en revanche laids, gris et passe-partout, comme s'il était impossible de concevoir un décor à la fois stylisé et esthétique !

Musicalement, la soirée est particulièrement réussie : visiblement, cette oeuvre convient bien à James Conlon et à l'orchestre de l'Opéra National de Paris, qui livrent une très bonne prestation, et les choeurs, omniprésents, sont excellents.

Le rôle long et difficile de Marfa est tenu par Larissa Diadkova, voix profonde et solide de contralto, qui ne fléchit pas une seconde tout au long de l'oeuvre, pas plus que les deux basses Anatoli Kotscherga et Vladimir Ognovenko, respectivement Dossifei et Ivan Khovanski, basses d'opéra russe comme on les imagine et comme on les aime, véritablement impressionnants.

Le prince Golitsine est interprété par le ténor américain Robert Brubaker, visiblement habitué aux rôles russes, puisqu'il tenait celui du comte Bezoukhov dans Guerre et Paix l'an dernier. Il y est d'ailleurs beaucoup plus à l'aise que dans le récent der Zwerg du Palais Garnier, qui nécessite plus de demi-teintes. Ici la voix est éclatante.

L'autre ténor de la distribution est le splendide Vladimir Galouzine dans le rôle du prince Andrei, et c'est presque criminel de l'entendre chanter si peu, même s'il s'agit du jeune premier ! On voudrait qu'il ne quitte jamais la scène. De plus, scéniquement, il incarne son personnage de façon saisissante.

Les seconds rôles sont à l'aune des rôles principaux, excellemment tenus, sauf pour l'Emma de Tatiana Pavlovskaya, criée, forcée et fausse. Une mention spéciale au clerc plein de relief de Konstantine Ploujnikov, même s'il était temps qu'il arrive au bout de sa dernière scène.
 


Catherine Scholler

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