C O N C E R T S
 
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PARIS
09/05/2005

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RÉCITAL

"Anges déchus et épouses vertueuses"

Dame Felicity Lott, soprano
Graham Johnson, piano

PROGRAMME

Kurt WEILL (1900 - 1950)
Nanna's Lied, prologue (Chanson de Nanna) - texte de Brecht

Franz-Josef HAYDN (1732 -1809)
Die zu späte Ankunft der Mutter (L'arrivée trop tardive de la mère) - texte de Weisse

Wolfgang Amadeus MOZART (1756 - 1791)
Die Alte (La Vieille) - texte de Hagedorn

Robert SCHUMANN (1810 - 1856)
Lieder der Braut II (Chant de la fiancée) - texte de Rückert

Johannes BRAHMS (1833 - 1897)
Mädchenlied (Chant de jeune fille) - texte de Heyse

Hugo WOLF (1860 - 1903)
Ich hab in Penna (J'ai à Penna) - texte de Heyse

Richard STRAUSS (1864 - 1949)
Drei lieder der Ophelia, op 67 :
Wie erkenn ich meinTreulieb von andern nun ?
(Comment puis-je, entre tant d'amours, reconnaître le plus fidèle ?)
Guten morgen, ës ist Sankt Valentinstag (Bonjour, c'est aujourd'hui la Saint Valentin)
Sie trugen inh auf der Bahre bloss  (On l'a porté en bière)

 I know where I'm going  (Je sais où je vais)
chant traditionnel harmonisé par Herbert HUGHES (1882 - 1932)

William WALTON (1902 - 1983)
Wapping Old Stairs

Arthur BLISS (1891 - 1975)
The return from Town (En revenant de la ville)
Sweet Polly Oliver (La charmante Polly Oliver)

chant traditionnel harmonisé par Benjamin BRITTEN  (1913 - 1976)

Kurt WEILL
Und was Bekam des Soldaten Weib ?
(Et qu'a reçu la femme du soldat ?) -texte de Brecht 
Here I'll stay (Je resterai ici) - texte de Lerner 

Gabriel FAURÉ (1845 - 1924)
Une sainte en son auréole - texte de Verlaine

Albert ROUSSEL (1869 - 1937)
Réponse d'une épouse sage - d'après un texte chinois

Henri DUPARC (1848 - 1933)
Au pays où se fait la guerre  - texte de Théophile Gautier

Noël COWARD (1899 - 1973)
Spinning Song (Chant de la Fileuse) - Alice is at it again (Voilà qu'Alice a recommencé) - A bar at the Piccola Marina (Un bar sur la Piccola Marina) - textes du compositeur

Francis POULENC (1899 - 1963)
La dame de Monte Carlo - texte de Jean Cocteau

Reynaldo HAHN (1875 - 1947)
C'est très vilain d'être infidèle 

Oscar STRAUS (1870 - 1954)
Warum soll eine Frau kein Verhältnis haben ?
(Pourquoi une femme n'aurait-elle pas de liaison ?) - texte de Grünwald

Murray GRAND (1919) : What a lady like me doin' in a joint like this (Qu'est-ce qu'une dame comme moi fait dans un endroit comme ça ?) - texte du compositeur

Paris - Théâtre des Champs-Élysées
Lundi 9 mai 2005



LA PROMENADE DOUCE-AMÈRE DE DAME FELICITY...

Voilà plus de trois ans, en janvier 2002, Felicity Lott, déjà accompagnée de Graham Johnson, son fidèle pianiste, avait donné au Théâtre du Châtelet un époustouflant récital, où figuraient vingt-quatre mélodies de vingt-quatre compositeurs différents, intitulé "Night and Day, Love songs around the clock", et dont le DVD a fort heureusement conservé le souvenir (TDK, collection "Voix de notre temps").

Cette fois, au Théâtre des Champs-Élysées, le titre fort savoureux "Anges déchus et épouses vertueuses" laissait augurer d'une soirée tout aussi délectable...

Et en effet, elle le fut, même s'il nous a semblé, surtout au début, remarquer une fragilité accrue dans cette voix pourtant encore radieuse et admirablement menée. Il est vrai que, contrairement à nombre de ses consoeurs, Lott ne "triche" pas et continue à chanter dans la tessiture de soprano qui a toujours été la sienne, avec un médium et un grave qui sont devenus parfois un peu sourds avec les années, mais un aigu encore brillant et lumineux. Par ailleurs, force est de reconnaître que ce programme, pourtant globalement bien composé, comportait un choix de mélodies un peu moins judicieux que le précédent. 

Une première partie plus sombre, plus amère, nous a offert de grands moments : la délicieuse mélodie de Haydn, si libertine et mozartienne en diable ; les lieder de Brahms, Wolf et Schumann ; les trois chants d'Ophélie de Richard Strauss, superbes et rappelant, si besoin était, quelle magnifique straussienne cette artiste demeure aujourd'hui encore, sans oublier, bien sûr, les délicieux "chants traditionnels", en particulier le fameux "I know where I'm going" qui joue un rôle si important dans le formidable et rare film éponyme de Michael Powell (1945).. C'est finalement dans les mélodies de Kurt Weill que Dame Felicity fut la moins convaincante, surtout "Und was bekam des Soldaten Weib" sur un texte de Brecht, d'une noirceur très révolutionnaire, la dernière "Here I'll stay", plus glamour, convenant mieux à sa douceur et à sa grande féminité. 

Changement de ton après l'entracte, Felicity ayant troqué sa jolie robe noire et bleu pâle, sobre et raffinée, pour une tenue plus "fofolle", rose "coq de roche" et emplumée, finalement très en accord avec la deuxième partie, résolument plus légère, à quelques exceptions près. 

Encore une fois, le charme, le style si chic et si délicieusement british de l'interprète firent merveille dans Fauré, Roussel, Duparc, Hahn, Poulenc - sa "Dame de Monte Carlo" est un véritable must - et dans le fameux Warum soll eine Frau kein Verhältnis haben ? d'Oscar Strauss, lequel figurait déjà à l'affiche du récital du Châtelet. 

On pourra, par contre, être plus réservé sur les trois mélodies de Noël Coward, d'une grivoiserie plus ou moins avouée, mais assez savoureuses pourtant, et la dernière, de Murray Grand, plutôt drôle, certes, mais d'un humour un peu lourdingue, à la Benny Hill.

Les trois bis furent à l'image du programme : un délicieux "Im Chambre séparée" qui, certes, ne fit pas tout à fait oublier Schwarzkopf, un "Dis-moi Vénus" de La Belle Hélène outrageusement appuyé de mimiques inutiles et redondantes - ah ! les trémoussements suggestifs et la main de la divine Felicity en forme de bec de cygne ! (Certaines divas ont décidément besoin des conseils d'un metteur en scène, car Felicity lott ne se livrait pas à ce genre de simagrées dans la production de Laurent Pelly au Châtelet....) Mais on pardonnera à Felicity ces dérapages, pour nous avoir offert en dernier un "Waly, Waly", chant traditionnel harmonisé par Britten, tout bonnement sublime de douleur nostalgique.

Graham Johnson fut, comme toujours, le compagnon de route idéal pour ce joli parcours tissé d'humour et de mélancolie, de cocasserie et de langueurs.

Au bout du compte, malgré ces quelques réserves, une très bonne soirée !
 
 
 

Juliette BUCH
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