C O N C E R T S 
 
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BERNE
21/11/04
© Opéra de  Berne
Vincenzo Bellini (1801-1835)

I PURITANI

Opéra en trois actes
Livret de Carlo Pepoli

Corinna Mologni (Elvira),
Mario Zeffiri (Lord Arturo Talbo),
Zeljko Lucic (Sir Riccardo Forth),
Francesco Ellero d'Artegna (Sir Giorgio),
Jan-Martin Mächler (Sir Bruno Roberton),
Richard Ackermann (Lord Gualtiero Valton),
Maria Riccarda Wesseling (Enrichetta di Francia).

Berner Symphonie Orchester
Choeur et choeur auxiliaire de l'Opéra de Berne

Alberto Zedda, direction musicale

Lech-Rudolf Gorywoda, chef des choeurs
Lorenzo Mariani, mise en scène
William Orlandi, décors et costumes
Jacques Battocletti, lumières

Berne, 21 Novmbre 2004


Mettre en scène le belcanto... Vaste programme !
 

Mettre en scène le belcanto ! Vaste programme qui semble n'être l'apanage que des seuls grands metteurs en scène. A Berne, défavorisés par une mise en scène (Lorenzo Mariani) conventionnelle et sans grande invention, une direction d'acteurs quasi inexistante, les chanteurs sont souvent livrés à eux-mêmes. On comprend mal le choix du réalisateur de transposer son action au temps de la Première Guerre Mondiale, d'autant plus que seules les deux premières scènes se réfèrent à cet instant de l'Histoire. Le décor étriqué (William Orlandi) de tranchées boueuses du début de l'opéra frise le ridicule. Plus tard, la scène s'ouvre heureusement sur un plateau légèrement incliné, traversé d'une inexplicable rigole (piège à entorses des chanteurs !) Un plateau qui sera tour à tour le salon d'un château ou un champ de bataille sur lequel la neige tombe. C'est dans une ambiance de blessés rampants et sanguinolents pathétiquement comiques, qu'Elvira et Arturo vont finalement se retrouver. Ces retrouvailles donnent alors lieu à une résurrection miraculeuse de tous les mourants qui, joyeusement, célèbrent la réunion des amants sous une incongrue pluie de pétales de roses tombant des cintres. Sans commentaires !

Les références tant discographiques que scéniques de I Puritani ne manquent guère. C'est donc un immense défi que de programmer une oeuvre aussi magistrale au sein d'un opéra de troupe. Principalement à cause de la faiblesse du plateau vocal, la production bernoise ne s'élève jamais au niveau de ses espérances. Si l'Opéra de Berne avait fait appel à quelques "renforts" pour les rôles principaux, ils se sont avérés pour la plupart mal préparés. A commencer par Francesco Ellero d'Artegna (Sir Giorgio) au chant et au phrasé approximatifs. Souvent en décalage avec l'orchestre, sa grande expérience des plateaux d'opéra le sauve de l'accident musical. Dommage, parce que la voix est fort belle.


© Opéra de  Berne

Contrairement à son collègue, Zeljko Lucic (Sir Riccardo Forth) tient bien son rôle. Il offre de bons moments de belcanto, quand bien même un certain manque de sensibilité musicale l'empêche d'approfondir son personnage. Excellent quand il peut chanter en force, il s'est taillé un succès mérité auprès du public à l'issue de la scène finale du second acte, alors qu'il lance son vigoureux "Suoni la tromba". Les contre-ut et autres prouesses vocales demandées à la partie de ténor dès les premières mesures de la partition semblent paralyser Mario Zeffiri (Lord Arturo Talbo). Ainsi, son "A te, o cara" ne jouit-il pas de toute la décontraction vocale auquel l'auditeur aspire dans cet air de bravoure. Il faudra attendre le troisième acte pour que le ténor grec se sente libéré des contraintes que lui imposent son rôle et exprime de belle façon son amour retrouvé.

Vocalement, la vedette revient à la soprano Corinna Mologni (Elvira) qui occupe la scène avec brio. Digne des plus grandes sopranos qui, actuellement, osent s'attaquer à ce rôle mythique, elle empoigne crânement chaque instant de cette partition avec une aisance étonnante. Se donnant sans compter à son emploi, elle n'arrive néanmoins pas à le dominer jusqu'aux dernières mesures de l'opéra. En effet, la probable fatigue d'un rôle exigeant restreint ses ardeurs vocales et elle termine sa prestation avec des suraigus quelque peu forcés et détimbrés. Toutefois, sa grande scène de la folie du troisième acte reste saisissante d'engagement théâtral et lyrique.

Il serait vain de fustiger les réserves émises sur le plan vocal sans relever la désastreuse direction d'orchestre d'Alberto Zedda. Elle contribue grandement aux problèmes des chanteurs. En effet, dès les premières mesures, la nervosité et l'inefficacité gestuelle du chef italien font "flotter" l'orchestre, souvent en décalage avec les solistes. De plus, l'extrême lenteur de quelques tempi déstabilise les interprètes qui ne retrouvent plus la ligne du chant bellinien si naturelle à la respiration.
 
 

Jacques SCHMITT
Prochaines représentations : les 11, 15 et 22 janvier et les 19 et 22 mars 2005
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