OPERAS - RECITALS - CONCERTS LYRIQUES
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PARIS
03/04/08


Jesus Lopez-Cobos
© DR




Concert RESPIGHI - ROSSINI

Ottorino Respighi (1879 -1936)

METAMORPHOSEON MODI XII
Créé à Boston en novembre 1930

Gioacchino Rossini (1792-1868)

STABAT MATER
Créé a Paris en janvier 1842

Alexandrina Pendatchanska Soprano
Sophie Koch Mezzo
Matthew Polenzani Ténor
Giovanni Battista Parodi Basse

Chœur de Radio France
Matthias Brauer

Orchestre National de France
Jesus Lopez-Cobos

Théâtre des Champs-Élysées
3 avril 2008

Rencontre au royaume des ombres


Respighi et Rossini n’auraient eu aucune chance de se connaître en ce bas monde puisque le premier est né onze ans après la mort du second. Mais quoi de plus naturel à deux artistes inspirés des dieux que de se rencontrer dans un théâtre dont le nom rappelle le lieu réservé aux âmes des héros ? (1)

Composée en 1930, l’œuvre de Respighi Metamorphoseon modi XII que nous donne ce soir l’Orchestre National de France est constituée de variations sur un thème. Le programme nous apprend qu’il s’agirait des douze modes ecclésiastiques de la Renaissance sans qu’il y ait toutefois de lien avec le langage musical de cette époque. Bien au contraire, Respighi explore ce que l’harmonie tonale moderne peut apporter aux formes anciennes. Il en résulte une orchestration subtile d’une grande variété de styles. L’ouvrage commence par une immense phrase qui se déroule en longues vagues enchaînées, puis les instruments dialoguent avec vivacité, individuellement ou par pupitre. Chacun prend et reprend la parole, soutient son point de vue avec des notes tenues pour finalement se fondre dans une fureur collective. Le chef espagnol, Jesus Lopez-Coboz conduit ces changements d’humeur et de rythmes avec une fluidité élastique qui les épouse sans effort apparent. Le résultat est fort convaincant.

Après l’entracte, le Stabat Mater de Rossini s’ouvre dans la tonalité de sol mineur qui nous plonge d’emblée dans une atmosphère de deuil. C’est le Rossini de Guillaume Tell que l’on entend dans cette musique d’église. Les rythmes syncopés, la descente chromatique sur « dum pendebat filius », l’alternance des parties chorales et des vibrants appels du ténor « 0 quam tristis et afflicta » sont admirables. L’émouvant duo de voix de femmes, ponctué et délicatement soutenu par les instruments, tout comme l’aria de basse « Pro peccatis suae gentis » et son somptueux dialogue avec le chœur, nous envoûtent. Et, l’on admire sans réserve l’extraordinaire finale « In sempiterna sæcula. Amen », si poignant avec sa fugue qui met le feu au ciel avant d’enflammer la salle — quand le chef le veut comme c’est généralement le cas d’Alberto Zedda à Pesaro.

Assez plate, en regard de son potentiel, l’interprétation de Jesus Lopez-Cobos semble se méfier de tout excès. Les accents rossiniens sont comme atténués. L’orchestre est bien présent, mais sage. Peut-être, du fait que les choristes sont relégués au fond de la scène, les impressionnants chœurs a capella paraissent en retrait au lieu de jouer pleinement leur rôle. Cet écueil est évité quand l’orchestre est dans la fosse.

Parmi les solistes, la mezzo Sophie Koch, avec sa voix de Falcon et son élégante présence scénique, tient sans peine la vedette — quoiqu’elle ne s’investisse vraiment qu’au moment de sa cavatine « Fac ut portem Christi mortem ». Le ténor Matthew Polenzani a un timbre suave dans les passages délicats, mais qui se durcit de manière moins agréable à l’oreille dès qu’il doit lancer des éclairs. Malheureusement, la soprano Alexandrina Pendatchanska a une voix bien tremblée et la basse Giovanni Battista Parodi peu de consistance.

De cette soirée, on retiendra davantage la découverte intéressante de la première partie que l’exécution un peu fade du Stabat Mater.



Brigitte CORMIER


(1) Notons le ballet La boutique fantasque d’Ottorino Respighi, basé sur des thèmes de Rossini, qui a fait l’objet d’un enregistrement du Cincinnati Symphony Orchestra dirigé par Jesus Lopez-Cobos.
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