C O N C E R T S
 
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VIENNE
25/05/2006
 
Rolando Villazon & Anna Netrebko
dans Roméo et Juliette à Los Angeles - 2005
© Robert Millard

Charles GOUNOD

ROMEO ET JULIETTE

Mise en scène : Jürgen Flimm
Lumières : Patrick Woodroffe
Costumes : Birgit Hutter
Chef de choeur : Ernst Dunshirn
chorégraphie : Renato Zanella

Juliette : Anna Netrebko
Roméo : Rolando Villazón
Stéphano : Michaela Selinger
Gertrude : Janina Baechle
Tybalt : Marian Talaba
Benvolio : Meng-Chieh Ho
Mercutio : Eijiro Kai
Paris : Hans Peter Kammerer
Grégorio : Marcus Pelz
Capulet : In-Sung Sim
Frère Laurent : Johannes Wiedecke
Duc : Janusz Monarcha

Chœur et orchestre du Staatsoper
Direction musicale : Bertrand de Billy
(33e représentation de cette production)

Staatsoper, Vienne, 25 mai 2006

Rolando et Annette

Soirée d’affluence  : toutes les places debout ont été vendues et un grand nombre de personnes repartiront bredouille avec leur affichette « cherche une place ». Cette production est pourtant maintenant bien rodée à Vienne  : nous avons déjà vu les couples Shicoff-Bonfadelli, Alvarez-Rost, ainsi que Villazon-Lascarro l’an dernier. Et nous attendons pour décembre Sabbatini-Massis. Mais cette fois-ci LE couple médiatique Villazon-Netrebko est réuni et il draine un public venu parfois de très loin et qui a fait des pieds et des mains pour obtenir une place.

Rappelons d’abord que la partition est donnée avec les habituelles coupures que nous avons toujours entendues dans cette production viennoise  : disparaissent par exemple un couplet de Capulet, le milieu de « Nuit d’hyménée », le mariage de Juliette…

Le parti pris de la mise en scène de Jürgen Flimm est connu  : des comédiens en costume contemporain, une fête dans une ambiance plutôt disco, un plateau vide à l’exception de la demi-lune vitrifiée éclairée de l’intérieur sur ou autour de laquelle les amants chanteront leur duos de l’acte II, IV et V. A défaut de décor, un intéressant travail de lumière permet, à certains moments clés, des coups de projecteurs, soulignant par exemple la première rencontre des amants ou l’arrivée de Roméo devant le tombeau de Juliette.

La troupe entourant le couple-vedette est d’un bon niveau. Chœur, petits rôles et rôles secondaires jouent avec conviction et la représentation s’écarte de la routine somnolente. A l’exception d’un frère Laurent avare de graves et vocalement terne, les autres solistes nous proposent une interprétation solide et homogène, ce qui est déjà bien. Le problème est que tous chantent une langue rarement identifiable. De temps en temps surgissent du brouillard des bribes de français. Le public dans son immense majorité suit le sur-titrage anglais ou allemand et ne sera pas perturbé outre mesure de la bouillie qu’on lui sert, mais le mélomane francophone, lui, reste plus réservé…

A la tête d’un orchestre en bonne forme, Bertrand de Billy offre une lecture équilibrée de l’oeuvre. Lyrique aux moments requis, attentive aux chanteurs, fougueuse quand il le faut (l’ouverture, les affrontements de l’acte III), voilà comme on aime entendre Gounod. Du contre-chant des alti pendant la ballade de la reine Mab aux détails d’orchestration de la romance de Stéphano, Bertrand de Billy aime cette musique et cela s’entend.

Et le couple dont tout le monde parle, me direz-vous ? Villazon est égal à lui-même  : le timbre agréable, l’acteur convaincant et l’interprète musical. Le ténor dessine un Roméo juvénile et ardent. Son ardeur va jusqu’à multiplier les baisers à Juliette  : nos tourtereaux se bécotent fréquemment, beaucoup plus que tous les autres couples qui ont défilé sur cette scène auparavant ! La Juliette d’Anna Netrebko est elle aussi parfaitement crédible en jeune fille éprise, séduisante et spontanée. La voix sonne pleine, du grave à l’aigu et la comédienne brûle les planches. Il est difficile de rester insensible face au couple qu’ils forment.

Une oreille attentive ou pointilleuse aura décelé toutefois que le volume du ténor est parfois limite et qu’il force pour mieux passer la rampe ; et que la soprano accommode parfois la partition à sa manière  : le trille n’est pas bien battu à l’acte I ; il disparaît même tout simplement à la fin de l’air du poison (« je bois à toi »). Ces réserves étant faites, le bilan est positif et les différents artistes seront ovationnés par un public enthousiaste.


Valéry FLEURQUIN


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