C O N C E R T S
 
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LILLE
30/03/2004

© DR
L'Histoire du Serpent Blanc

Musiques de Jin Guoxion, Jin Jinshan
Mise en scène : Sun Hongijiang

Mardi 30 mars 2004
Opéra de Lille

Dans le cadre de l'Année de la Chine en France
et de Lille 2004



À Lille, comme partout en France, c'est l'année de la Chine, mais ce que la ville a d'unique en ce moment, c'est qu'elle est capitale culturelle de l'Europe et qu'à ce titre, elle s'offre la reconstitution d'une rue de Shanghaï (rue Faidherbe) ainsi que la réplique du pavillon de thé de Shanghaï juste devant l'Opéra. C'est dire que la venue de la compagnie de l'Opéra de Pékin pour trois représentations uniques en France, a pris à Lille tout son sens. Ici, le passant voyage au coeur d'un des pays les plus énigmatiques du monde et pratique quotidiennement la distorsion de l'espace-temps. 

Des hommes et des dieux

L'histoire de Serpent Blanc appartient à la tradition théâtrale de l'Opéra de Pékin qui remonte au XVIII ème siècle. Il y est question d'un coup de foudre puis d'un mariage contrarié entre un jeune homme et une jeune fille qui se révèle être une immortelle, la fée du Serpent Blanc. Serpent Bleu, Pôle Sud, La Grue, Le vent Limpide, Clair de Lune ou Général Crevette, etc., sans oublier les Deux Fées-Moules ou le Bouddha protège-ciel ... sont aussi de la partie. C'est dire que sur scène, il y a du monde !

On nage dans le mythe et l'imaginaire chinois et malgré les surtitres d'ailleurs plus que succincts, on a du mal à s'y retrouver. Quant à l'aspect symbolique, il nous est complètement étranger. Pour des oreilles occidentales, même habituées aux musiques du monde, la musique de Jin Guoxion et Jin Jinshan sonne de façon très étrange. Tout y est différent, l'auditeur, plongé dans un océan de perplexité et à la recherche de quelques repères, essaye de ne pas perdre pied en se raccrochant à quelques détails comme cette omniprésence, lancinante, voire hypnotique de la percussion qui frise l'obsession.

Impossible pour l'amateur d'opéra de voir spectacle plus étrange

Sur une toile de fond à l'image de la Chine éternelle que nous avons tous imaginée (paysages de montagnes déchiquetées, arbres, pagodes, rochers ...) et avec un très beau jeu de lumières pour tout décor, des personnages aux gestes très codés nous racontent une histoire sans âge qui nous renvoie aux légendes de l'enfance, mais d'une enfance dont il nous manquerait la clé, puisque cette enfance est chinoise. Les voix très aiguës des femmes sont parfois difficiles à supporter et la sonorisation n'arrange rien, mais l'alternance parlé/chanté/dansé, fait du spectacle un vrai divertissement. Les actions sont très imagées et les chanteurs à la voix amplifiée par les micros (dommage !) et au visage impassible articulent peu. Quant aux ballets et acrobatie diverses, on y sent l'influence d'une révolution culturelle pas si lointaine. Une étonnante harmonie de couleurs règne sur le plateau et lors des combats chorégraphiés, les sabres brillent dans la lumière. Toutes les techniques d'expression de l'opéra - chant, musique, théâtre, danse, pantomimes, combats, cirque - sont convoquées par la troupe de plus de 70 artistes (instrumentistes, chanteurs, comédiens, danseurs, acrobates) de l'Opéra de Pékin. La variété des instruments - tambours, gong, cymbales, vièle Erhu, flûte, suona (hautbois), cithare, orgue à bouche - peu familiers à nos oreilles occidentales, assure au public un dépaysement total que renforce les curieux costumes et masques dont les personnages sont habillés. Ce n'est pas un hasard si Charlie Chaplin, Bertold Brecht ou Gérard Philippe ont été fascinés par l'opéra chinois, forme très élaborée de théâtre épique qui refuse le réalisme et l'identification pour s'intéresser au déroulement de l'histoire. La légende du Serpent Blanc, c'est un peu comme un livre d'images visuelles et sonores qu'on ouvrirait devant vous et qui se révèle un enchantement. Une belle découverte, idéale pour faire le plein d'énergie ! Normal pour une musique qui cherche à établir l'harmonie entre le ciel et la terre.
 
 
 

Anna de AYALA
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