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MILAN
15/01/2008
- Retransmission de la R.A.I -
 
Atto I
Fotografie di Marco Brescia
Archivio Fotografico del Teatro alla Scala


TEATRO ALLA SCALA DI MILANO
Saison lyrique 2007/2008


En direct du Teatro alla Scala de Milan
mardi 15 janvier 2008



Gaetano DONIZETTI

MARIA  STUARDA


« Tragedia lirica » en trois actes de Giuseppe Bardari,
d’après la tragédie homonyme de Friedrich von Schiller

Maria Stuarda : Mariella Devia
Elisabetta Tudor : Anna Caterina Antonacci
Roberto, conte di Leicester : Francesco Meli
Sir Giorgio Talbot : Carlo Cigni
Lord Guglielmo Cecil : Piero Terranova
Anna Kennedy : Paola Gardina

Orchestra e Coro del Teatro alla Scala di Milano
Maestro del Coro : * *
Maestro Concertatore e Direttore : Antonino Fogliani
Mise en scène : Pier Luigi Pizzi


- Retransmission de la R.A.I - 
Une Maria Stuarda plus lyrique que dramatique


Affiche de l’illustre Théâtre, avec la petite notification du remplacement, pour la représentation en question et dans le rôle de Sir Giorgio Talbot, de Carlo Cigni, brusquement indisposé, par Simone Alberghini.


C’est l’édition critique établie d‘après la partition originale qui a été choisie pour cette production. Les principales différences par rapport à la version exécutée depuis la première reprise moderne (au Teatro Donizetti de Bergame en 1958) sont un nouveau chœur pour l’Introduction et un motif différent de la strette terminant le Finale II°. Des variantes proposées en appendice de l’édition critique, la Scala a retenu précisément les remaniements que Donizetti exécuta pour elle : la version Malibran de la cabalette d‘entrée, et l’ouverture si rarement exécutée.

Anna Caterina Antonacci est enfin une reine Elisabetta Tudor élégante et même séduisante, de son beau timbre aussi agile dans le grave que dans l’aigu. On note ses belles variations dans le « da capo » de sa cabalette. Précisons à ce propos que les  da capi ou reprises de toutes les cabalettes sont faits, on n‘a coupé que les reprises des strettes des duos Maria-Roberto et Maria-Talbot. En revanche on exécute complètement les strettes du duo final I Elisabetta-Roberto, du finale II et du trio Elisabetta-Leicester-Cecil.

 
Anna Caterina Antonacci


Francesco Meli est un Roberto di Leicester surprenant par l’éclat de son timbre. On est impressionné d’entendre ainsi claironner la cavatine animée du personnage. La voix est en effet claire mais également puissante et agile comme le démontre sa cabalette, où les capacités de colorature et les nuances atténuent quelque peu une tendance à chanter à gorge déployée, c’est le cas de le dire. Les limites apparaissent plus tard, lors du duo avec Elisabetta : le malheureux a une défaillance au moment d’un aigu qui s’étrangle et sa voix vacille dangereusement. On note en revanche une belle colorature dans le da capo de la strette finale du trio avec Elisabetta et Cecil, car rares sont les ténors qui s’en préoccupent.

Le Sir Giorgio Talbot de Simone Alberghini possède un timbre noir à souhait pour ce sage courtisan se révélant prêtre catholique consolateur plus que juge.

Mariella Devia est une splendide Maria Stuarda, on le savait, et le temps qui passe n’a prise sur ses éblouissants moyens vocaux. La cabalette de son air d’entrée est un exemple de chant intelligent, où le goût de l’artiste lui dicte une extraordinaire colorature, non seulement possible à sa grande technique, mais ne nuisant pas à l’expressivité du morceau et coupant le souffle à l’auditeur, se demandant précisément quand elle respire !  La grande Artiste est superbe également quand elle combine rêverie et angoisse, parsemant de suraigus ajoutés à bon escient « l’aria della confessione », qui aurait fait évanouir la reine de Naples assistant à une répétition, et provoqué l’interdiction de la création !

 
Mariella Devia


Piero Terranova prète un timbre aigre et autoritaire, idéal pour ce mufle implacable de Lord Guglielmo Cecil.  Le rôle encore plus en retrait d’Anna Kennedy était bien tenu par Paola Gardina au chant élégant et chaleureux.

Le « Coro del Teatro alla Scala », instruit par Bruno casoni, servit l’ouvrage avec sensibilité, d’autant que Donizetti élève le chœur au rang de personnage avec le grand morceau ouvrant le dernier tableau.

Le jeune chef Antonino Fogliani ne fait certes pas vibrer son bel orchestre ni comme Carlo Felice Cillario (lors de la précédente édition scaligère en 1971) et encore moins comme Francesco Molinari Pradelli, dramatique au possible dans la production qui devait décider du retour de l’œuvre au répertoire (Florence 1967). Au lieu de cela, des ralentissements (dont on se demande s’ils aident les chanteurs) et pire, des moments de mollesse amorphe… Enfin, il est proche de ses débuts, en 2003, à l’occasion de Ugo conte di Parigi du même Donizetti, gala final de l’« Accademia della Scala » avec ses jeunes interprètes qu’il nomme (au micro de la RAI) encore avec une tendresse respectueuse : « Les chanteurs de la Signora Gencer ». Soyons donc patients avec ce jeune maestro qui n’est pas au moins atteint de cette terrible frénésie actuelle des chefs, brûlant les ailes à la musique dans la croyance erronée selon laquelle diriger précipitamment rend dramatique. On apprécie alors ses tempi posés et rendant les passages plus mordants, comme l’impressionnante cabalette d‘entrée de Maria Stuarda, qui n’est plus la rêverie de la cavatine immédiatement précédente.
Interrogé par la présentatrice radio de la soirée, Pier Luigi Pizzi explique comme son dispositif scénique est fondé sur une grande prison, car Elisabetta est elle-même également prisonnière, de son pouvoir !  Son palais est « un faux palais, en réalité plus prison que l’autre ». Les costumes sont « d‘époque, des costumes élisabéthains, même s’ils renoncent à une reconstruction historique pédante ».

Quant à nous, passionnés restant un peu sur notre faim, tentons de limiter notre nostalgie des interprétations donizettiennes dramatiques des années 60, car en ces débuts de la Donizetti Renaissance, peut-être « tirait-on » Donizetti vers Verdi ?…



Yonel BULDRINI
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