OPERAS - RECITALS - CONCERTS LYRIQUES
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LYON
18/12/2007
 
voir extrait vidéo sur le site www.opera-lyon.com


Jacques OFFENBACH (1819-1880)

LA VIE PARISIENNE

Raoul de Gardefeu, Jean-Sébastien Bou
Bobinet, Marc Callahan
Métella, Maria Riccarda Wesseling
Le Baron de Gondremarck, Laurent Naouri
La Baronne, Michelle Canniccioni
Gabrielle, Marie Devellereau
Frick, Jean-Paul Fouchécourt
Le Brésilien, Jesus Garcia
Prosper, Christophe Mortagne
Pauline, Brigitte Hool
Urbain, Jean-Louis Meunier
Léonie & la Voix de la Gare, Claire Delgado-Boge
Albertine, Sharona Applebaum
Augustin, Marie Cognard
Clara, Marie-Eve Gouin
Louise, Maki Nakanishi
Charlotte, Alexandra Guérinot
Gontran, Gérard Bourgoin
Alphonse, Jérôme Avenas

Orchestre et Chœurs de l'Opéra de Lyon
Sébastien Rouland

Mise en scène et costumes, Laurent Pelly
Adaptation des dialogues et dramaturgie, Agathe Mélinand
Décors, Chantal Thomas
Lumières, Joël Adam
Chorégraphie, Laura Scozzi

Lyon, Opéra, le 18 décembre 2007

C'est ça Paris !


Lyon est devenu, presque, une seconde patrie pour Offenbach ; pas une saison, quasiment, où son nom n'apparaisse dans la programmation.

Cette année : réveillon au champagne avec La vie parisienne. Dans sa version de 1874, expurgée d'un acte par le compositeur. La vie parisienne dont l'histoire est restée dans les annales : objet de toutes les passions, de toutes les inquiétudes de ses auteurs dès les répétitions et triomphe à sa création. C'est l'œuvre la plus subversive du trio Offenbach/Meilhac/Halévy ; celle où la critique sociale, affranchie du masque de la fable, s'affiche, s'assume, caustique et cruelle, désabusée, aussi, parfois – mais Meilhac l'était.

Pelly, avec sa sauce à la fois bien connue, attendue et cependant toujours surprenante, reprend le tout et, forcément, se vautre dans cette verve aux petits oignons, dans ce tourbillon qui vaut, finalement, autant pour 1874 que pour 2007. Il égratigne avec humour – et c'est bien le pire pour ceux qui sont visés – scrute tous nos petits défauts ordinaires et nos grandes turpitudes. L'actualisation passe dans sa moulinette scrupuleuse les mouvements sociaux, la SNCF, la presse people – impayable diaporama de douzième zone à la fin du III – la politique d'immigration et le racisme "banal". Drôle de miroir aux alouettes que ce Paris de faux-semblants où la remise à niveau des dialogues est peut-être un petit plus poussive, un peu moins réussie. Dessay remplace Patti dans le Panthéon de la baronne de Gondremarck. C'est de bonne guerre mais un rien d'esprit s'est perdu en cours de route…

Mais, surtout, Pelly fait tout cela avec le talent qu'on lui connaît. Dix détails à la minute ; de la gaudriole facile aussi, parfois gauloise, vaguement triviale mais qui fonctionne… même très bien. Sans parler des interludes dansés, chorégraphiés au geste près, qui touchent au génie : une poésie noire, cynique, un humour décapant entre Méliès, Freaks et le Splendid des grandes années. Vous ne regarderez plus jamais un éboueur, ni une poubelle un lendemain de fête, comme avant !

Côté chant, c'est l'esprit d'équipe qui domine. Les noceurs (Bou et Callahan) sont irréprochables, félins, hormonaux; ils vivent et vitupèrent, jouent et jouissent… et tout le plaisir est pour nous. Devellereau, en meneuse de revue déjantée – faussement prude ou vraiment salace – incendie les planches, sans hystérie, "juste" présente avec la voix qu'on lui connaît. Contre-emploi – encore que – génial, Wesseling fait une Métella vamp de boulevard désabusée, affûtée comme une lame meurtrière… C'est le Venusberg sur l'Ile-Saint-Louis.

Naouri, en Suédois, fait de chaque mot un exploit, de chaque note aussi, tordant, tout en finesse, faussement lourd, quasi schizophrène – le dessus et le dessous de la ceinture – comme si Golaud avait bu un coup de trop !

Et puis il y a Fouchécourt et le Brésilien "bling-bling' de José Garcia, décalé – dans tous les sens du terme – fou furieux étonnant et détonnant. Et encore l'équipe – la volière, la ruche, le lupanar – des servantes. Toute une équipe, c'est bien ce que je disais.

Equipe brillamment emmenée par son chef qui détaille, cisèle cette musique nettement moins légère qu'il n'y paraît. Peut-être lui manque-t-il juste un peu de l'emphase bouffie de second-degré de la valse de Métella au IV… Mais c'est une paille, presque rien, car c'est lui, le premier, qui distribue les cadeaux à profusion de cette fête qui annonce Noël.

Benoît BERGER


NDLR : Diffusion sur France 3
Samedi 5 janvier 2008

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