C O N C E R T S 
 
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MONTREAL
21/03/03

Jami Rogers, la Reine de la Nuit
© Yves Renaud / Opera de Montreal
Wolfgang Amadeus MOZART

Die Zauberflöte

(La Flûte Enchantée)

Tamino : Benjamin Butterfield
Pamina : Karen Driscoll
Papageno : Russell Braun
La Reine : Jami Rogers
Sarastro : Randall Jakobsh
Monostatos : Pascal Mondieig
Papagena : Lambroula Maria Pappas
Sprecher : Sébastien Ouellet
1ère Dame : Marie Simoneau
2ème Dame : Juliana Anderson
3ème Dame : Marie-Nicole Lemieux
1er Prêtre : Phillip Adis
2ème Prêtre : Pascal Charbonneau
1er Garde : Steeve Michaud
2ème Garde : Etienne Dupuis
1er Garçon : Karin Côté
2ème Garçon : Ariana Chris
3ème Garçon : Julie Boulianne

Orchestre Métropolitain du Grand Montréal
Choeur de l'Opéra de Montréal

Mark Flint, direction
Bernard Uzan, metteur en scène

Représentation du 21 mars 2003


C'est au milieu d'une saison un peu morne et après un Rigoletto de sinistre mémoire le mois dernier que l'Opéra de Montréal présentait cette Flûte Enchantée aussi rafraîchissante qu'exotique : de leur séjour à l'opéra de Hawaii, les décors de Keith Brumley ont gardé en effet le cocotier (auquel Papageno essaie de se pendre non sans récolter au passage quelques noix de coco sur la tête) et un aileron de requin qui semble sorti tout droit d'une énième version des Dents de la Mer pour troubler momentanément les amours de Papageno et Papagena. Le reste de la production s'amuse de la même façon à manier les références (Sarastro est ainsi une créature hybride entre le Jésus de South Park et Raël), les Trois Dames sont armées comme de vraies Walkyries, et le serpent (bien actionné par un machiniste un peu trop près de la scène) pourrait être avantageusement réutilisé dans Siegfried. On passe donc de bons moments pendant ces trois heures de spectacle à regarder entre autres Monostatos jouer à la corde à sauter avec ce qui devait servir à capturer Pamina et Papageno et l'on se réjouit, grâce à Bernard Uzan et Carol Bailey, d'avoir une vraie direction d'acteurs et des costumes à la fois beaux et inventifs à l'Opéra de Montréal, pour la première fois cette saison. 


Russell Braun, Papageno et Benjamin Butterfield, Tamino
© Yves Renaud / Opera de Montreal)

Côté vocal, les chanteurs ne déméritent pas (à l'exception peut-être du Sprecher de Sébastien Ouellet à l'accent allemand aussi exotique que les cocotiers déjà évoqués), mais sont cruellement desservis par l'acoustique de la salle Wilfrid-Pelletier qui, jeudi soir, n'a jamais semblé aussi mauvaise ; les dialogues parlés sont d'ailleurs très probablement amplifiés, même si la direction de l'opéra prend bien soin de ne pas le préciser. Cette même direction n'oublie toutefois pas de préciser que pour la sécurité" (sic) des artistes, il ne faut pas essayer d'enregistrer la représentation ! En attendant donc la construction hypothétique d'une nouvelle salle à Montréal (sujet qui n'est pas hélas au centre des préoccupations de la campagne électorale actuelle), il a donc fallu prêter une oreille particulièrement attentive pour entendre Benjamin Butterfield en Tamino qui, malgré des débuts un peu engorgés et barytonant, réussit à faire valoir au fur et à mesure de la soirée une belle voix de ténor lyrique. Son compatriote Russell Braun, bien connu du public parisien depuis qu'il a chanté "Der Vogelfänger bin ich ja" debout sur un seul pied dans la mise en scène de Bob Wilson à Bastille, incarne un Papageno toujours très drôle sans jamais être vulgaire. 

L'acoustique ne semble poser aucun problème à ces dames : Pamina est interprétée avec beaucoup de sensibilité et de musicalité par Karen Driscoll tandis que Jami Rogers, en Reine de la Nuit, s'avère une remplaçante de luxe : si la partie colorature du deuxième air est un peu savonnée, les contre-fa, eux, sont bel et bien là. On aurait pu rêver de graves plus abyssaux de la part de Randall Jakobsh, mais sa prestation est digne de celle de ses partenaires. A remarquer enfin le Monostatos très frais et sémillant de Pascal Mondieig et la présence discrète de Marie-Nicole Lemieux qui, en troisième dame, faisait ainsi ses débuts à l'Opéra de Montréal. Seule vraie déception de cette soirée globalement positive : les choeurs de l'Opéra de Montréal, qui paraissent manquer singulièrement d'entrain alors que le chef, Mark Flint, impose à l'Orchestre Métropolitain du Grand Montréal, une énergie et une fougue qui font mouche. 

Au total, une soirée "pas pire" (comme on dit au Québec), comme on aimerait en voir plus souvent ; espérons que le nouveau directeur artistique, Bernard Labadie, ait des projets de ce genre plein son chapeau !
 
 

Rémi Bourdot
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