C O N C E R T S 
 
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NANCY
14/09/06
Bianca - Diana Axentii - Simone - Vincent Le Texier
et Guido Bardi - Chad Shelton

© Ville de Nancy
Alexander ZEMLINSKY (1871-1942)

UNE TRAGEDIE FLORENTINE

Opéra en un acte

Livret d’Oscar Wilde d’après la pièce homonyme (1894)
Créé le 30 janvier 1917 au Hoftheater de Stuttgart

Mise en scène : Carlos Wagner
Décors, costumes : Rifail Ajdarpasic, Arian Isabell Unfried
Lumières : Norbert Schmell
Assistant mise en scène : Benoît Benichou
Maître d’armes : Claude Duprez

Bianca : Diana Axentii
Guido Bardi : Chad Shelton
Simone : Vincent Le Texier

Orchestre Symponique et Lyrique de Nancy

Direction musicale : Kirill Karabits

Nancy, le 14 septembre 2006

Le Texier maître du huis-clos

A la suite du mémorable Roi Candaule proposé récemment par la même scène, le périple Zemlinsky se poursuit à Nancy par la brève Tragédie florentine, composée à partir de 1915 par Zemlinsky sur une pièce posthume inachevée d’Oscar Wilde. De Wilde, on retrouve le texte intégral, magnifique de rutilance et de poésie, aussi violent qu’onirique. L’étude acérée des psychologies des trois personnages est adossée à une structure formelle rigoureuse en trois parties constituant un acte simplement ponctué par la sortie du personnage principal, Simone. Sorties qui sont autant de fugaces respirations dans le huis-clos du magasin de Simone, manipulateur efficace. Les quelques sifflets adressés à Carlos Wagner le soir de la première paraissent sévères : est-ce la transposition du quinzième siècle vénitien de Wilde dans un environnement contemporain indéterminé ? Il nous a plutôt semblé efficace de désolidariser ainsi le drame de toute référence précise, au profit d’un conflit de personnages intemporels : le mari négligent bafoué, la femme délaissée, le bellâtre séducteur pris au piège… Les quelques conflits sémantiques entre livret et réalité scénique, sont peu de choses en regard de l’essentiel : la maîtrise du jeu subtil de chat et souris entre trois êtres qui s’observent, se défient, cèdent pour mieux vaincre, ou tombent dans les pièges tendus. Belle idée en tout cas de reprendre à l’identique, avant que les amants ne tombent définitivement dans les rets de Simone, le décalque scénique de la scène d’amour initiale.


Simone - Vincent Le Texier et Guido Bardi - Chad Shelton
© ville de Nancy

Le marchand Simone est un deus ex machina omniprésent, pervers, insidieux, maître de sa stratégie. Il tisse sa toile jusqu’à engluer et tuer son rival, et ramener à lui sa femme, Bianca. Souverain scéniquement et vocalement, Vincent Le Texier recueille une ovation méritée. Le rôle presque décoratif, tissé de banalités, de Bianca, rejoint celui de son amant, Guido : personnage et allure  musicale volontairement stéréotypés, déclarations d’amour conventionnelles et plates, trop lyriques pour être honnêtes, ne trouvant de vérité que face à la mort. En face, la froide détermination de Simone trouve des traductions musicales beaucoup plus complexes, qui par leur violence rendent perceptible au spectateur le piège que l’amant ne voit pas encore. L’orchestre de Zemlinsky est éloquent, le langage dense, nerveux et ironique, comme dans la valse du second épisode, opulent quand Simone décrit ses brocards, étouffant quand la haine le submerge, et demande une baguette fermement rivée aux méandres psychologiques des personnages : mission accomplie par Kyrill Karabits.


 
Sophie Roughol


Enregistré par France Musiques, Une Tragédie florentine sera diffusé le samedi 16 décembre à 19 h 30
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