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BRUXELLES
 13/01/04
 
 Paul Agnew
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Marc-Antoine CHARPENTIER
 Les arts florissants,H
487
 Sunhae Im, La Poésie
 Olga Pitarch, La Musique
 Sophie Daneman, La Paix
 Katalin Károlyi,
L'Architecture
 Cyril Auvity, La Peinture
 Jean-Yves Ravoux, tutti
 Nicolas Rivenq, La Discorde
 João Fernandes, Un
Guerrier
 La descente d'Orphée aux Enfers,H
488
 Sunhae Im, Daphné
 Olga Pitarch, Enone et Proserpine
 Sophie Daneman, Eurydice
 Katalin Károlyi,
Aréthuse
 Cyril Auvity, Ixion
 Paul Agnew, Orphée
 Jean-Yves Ravoux, Tantale
 Nicolas Rivenq, Apollon
et Titye
 João Fernandes, Pluton
 Myriam Gevers, Patrick Cohën-Akenine,
 Sophie Gevers-Demoures, Simon Heyerick,
 Catherine Girard, Valérie Mascia,
violons
 Paul Carlioz, basse de violon
 Anne-Marie Lasla, Sylvie Moquet,
 Ariane Maurette, violes de gambe
 Sébastien Marq, Serge Saïtta,
flûtes
 Pier Luigi Fabretti, Michel Fleury,
hautbois
 Claude Wassmer, basson
 Brian Feehan, théorbe
 William Christie, clavecin, orgue
 Les Arts Florissants
 direction William Christie
 Vincent Boussard, mise en espace
 Christian Lacroix, robes
 Palais des Beaux-Arts de Bruxelles
- 18 janvier 2004 
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Une cure de jouvence
 
A la fin de son air, la voix d'Olga
Pitarch tremble, de trac ou d'excitation - allez savoir ! -, on la sent
ou la croit sentir fébrile, émue. C'est peut-être tout
simplement la joie de faire de la musique qui lui arrache un cri de plaisir
aussi vite étouffé, une joie qui se lit aussi dans le sourire
radieux de Myriam Gevers ou sur les lèvres mobiles, mais muettes
de Sébastien Marq qui chante avec les solistes. William Christie
n'imagine pas travailler avec des musiciens blasés, ces fonctionnaires
de l'art qui ont sombré dans la routine et qui, pour cinq minutes
de raccord supplémentaire, en exigent autant de pause. Cet élan,
cette fraîcheur incroyables, les Arts Florissants les cultivent au
contact de très jeunes musiciens qui depuis vingt-cinq ans renouvellent
la sève de l'ensemble. Pour cette tournée qui marque l'anniversaire
de la formation et le tricentenaire de la mort de Charpentier, le chef
n'a pas dérogé à cette règle éprouvée
: des artistes confirmés (Nicolas Rivenq, Sophie Daneman, Paul Agnew)
côtoient de nouveaux espoirs (Cyril Auvity, Sunhae Im, João
Fernandes...), parfois encore verts, mais débordant de vitalité
et de talent.
 Si Les arts florissants n'est
pas un chef-d'oeuvre, la musique de Charpentier, d'une riche invention,
tour à tour voluptueuse et bondissante, transcende la fadeur et
la mièvrerie des vers de Madeleine de Scudéry. D'aucuns jugent
pourtant l'idylle trop sentimentale et déplorent "ses langueurs"
alors que d'autres confondent les manières et les codes d'un autre
temps avec la préciosité. Le raffinement contre toutes les
brutalités : notre époque entend-elle ce langage ? Il est
vrai que Vincent Boussard détourne l'attention du public des grâces
de la musique vers l'afféterie d'une mise en espace dispensable,
à l'agitation souvent futile et aux clins d'oeil appuyés
(des roses luminescentes piquées entre les pupitres des musiciens).
 Il y a neuf ans, William Christie révélait
un sommet de la production dramatique de Charpentier : La descente d'Orphée
aux Enfers, opéra de chambre d'une concision et d'une efficacité
remarquables, d'une tout autre envergure que Les arts florissants.
Lui-même haute-contre - il se destinait d'ailleurs le rôle
secondaire d'Ixion - le compositeur conçut pour le rôle-titre
quelques unes des plus pages écrites pour cette voix rare et tant
prisée du public français, notamment la plainte d'Orphée,
soutenue et prolongée par un trio de violes dolentes à souhait.
A mille lieues des ténors frêles et ultra légers qui
s'illustrent souvent dans ce répertoire, Paul Agnew offre la plénitude
d'une voix sonore et ronde sur toute la tessiture, un timbre pénétrant,
une noblesse d'accent et une intelligence dramatique qui en font la plus
grande haute-contre actuelle. En Eurydice, il retrouve sa partenaire au
disque (ERATO) : Sophie Daneman, épanouie et plus tendre que jamais...
Alors, bien sûr, on pourrait épingler la raideur maladroite
de João Fernandes ou la relative transparence de Katalin Károlyi
(Marijana Mijanovic était initialement prévue), mais ce serait
faire preuve de mesquinerie et passer à côté de l'essentiel.
"Il est charmant d'ouïr de si beaux sentiments", chante le choeur
le plus harmonieux qui soit. Âmes rudes et désabusés
s'abstenir !
  
  
 Bernard SCHREUDERS 
 
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