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Renée FLEMING

HAUNTED HEART

Haunted heart
River
When did you leave heaven ?
You’ve changed
Answer me
My chérie amour
In my life
The moon’s a harsh mistress
Wozzeck / Improvisation / The midnight sun
 Liebst du um Schönheit
 My one and only love / This is always
 Cançao do amor
 Psyché
 Hard times come again no more

Fred Hersch, piano
Bill Frisell, guitar

1 CD Decca




Mojito à l'ananas rose

Renée Fleming, on le sait, possède l’une des plus belles voix que notre bonne vieille planète ait eut l’honneur de porter ces dernières années. On sait qu’elle fait, sur toutes les grandes scènes du monde, une carrière jalonnée de triomphes, de prix du disque, d’honneurs. Que, plus jeune, Renée Fleming s’était plutôt destinée à chanter du jazz, cela aussi on le sait.

Ce disque devrait alors être pétri de joie et de nostalgie, comme le sont toutes retrouvailles avec un premier amour. Hélas ! il n’en est rien. Nous entendons une heure durant un timbre certes superbe, riche en sonorités charnues et sensuelles (mais pauvre en expressivité), évoluant dans un bien curieux programme mêlant jazz, soul, chansons en espagnol ou en français, et arrangements d’airs classique d’un goût douteux. Parfois, l’on se croit lové dans ce fauteuil de cuir, celui placé à gauche du piano quart de queue laqué blanc dans le lounge de l’hôtel cinq étoiles au Mexique où nous nous sommes tous imaginés, un jour ou l’autre, locataire de la suite royale – en particulier après avoir regardé, une matinée de déprime, « Dallas », où l’on a bavé pendant une demi-heure devant la Cadillac rose fluo de l’avocat. On est assis là, les cheveux blonds et brushingués, l’œil lubrique, la chemise blanche ouverte sur de magnifiques abdominaux que Renée Fleming, robe décolletée et fendue, allongée sur le piano, regarde avec gourmandise, tout en chantant « River », « When did you leave heaven ?», ou « The moon’s a harsh mistress », et l’on se fait servir un cocktail, sans alcool et trop sucré, mais que l’on boira quand même jusqu’à la dernière goutte, avec une délectation coupable.

Lorsque viennent « Haunted heart » ou « My chérie amour », nous voici subitement au cœur d’une comédie romantique américaine, le premier morceau étant celui au cours duquel Julia Roberts, toute larmes et lamentations, imagine avec effroi son Hugh Grant dans les bras de Sandra Bullock cependant qu’elle déambule sans sembler s’en rendre compte en plein Bronx à trois heures du matin sous une pluie glaciale, le second étant censé accompagner les retrouvailles des deux premiers acteurs nommés ci-dessus, dans un New-York soudain radieux (nous rappelons qu’une véritable tempête le ravageait moins d’un quart d’heure plus tôt), tandis que défilent les premiers noms du générique. On rallume la lumière et on va se coucher.

Bien sûr, tout cela est soyeux, confortable, luxueux. Il ne gâche rien, au fond, ce petit disque que voilà, mais il n’embellit pas grand-chose non plus. Là est son problème : il ne sera jamais que le faire-valoir, que la musique de fond d’une soirée entre amis.


   Clément TALLIA

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