C  R  I  T  I  Q  U  E  S
 
...
[ Historique des critiques CD, DVD]  [ Index des critiques CD, DVD ]
....
......
Richard WAGNER (1813-1883)


LOHENGRIN

König Heinrich, Manfred Schenk
Lohengrin, Paul Frey
Elsa von Brabant, Cheryl Studer
Friedrich von Telramund, Ekkehard Wlaschiha
Ortrud, Gabriele Schnaut
Herrufer, Eike Wilm Schulte

Chœur et orchestre du Festival de Bayreuth
Peter Schneider

Mise en scène, Werner Herzog
Décors & costumes, Henning von Gierke
Réalisation, Brian Large

2 dvd Deutsche Grammophon, 00440 073 4404




Le petit Lohengrin illustré


On aime bien, malgré tout, les jolis imagiers. On aime bien, parfois, se reposer des interprétations ; des pensées d’auteurs. On aime bien, finalement, se dire qu’un spectacle d’opéra est – doit être – un plaisir sans que l’on sente l’urgence à se glisser dans un moule intellectuel qui peut hélas surexposer… notre incompréhension ! Bref, on aime bien ces productions dont on n’a pas l’impression de ressortir plus bêtes qu’en entrant.

Il y en a – et il y en aura toujours  et moi le premier, en certaines occasions – pour adopter des poses de bon ton devant un néon et un fond noir en disant que l’appareil scénique dévoile l’indévoilé, voire l’indévoilable d’une œuvre. Il y en aura toujours, aussi, pour considérer qu’il n’y a de salut que dans l’épure ; que dans la modernisation. Il y en a qui pleurent le départ de Gérard Mortier de l’Opéra de Paris ; et il y a ceux qui ont depuis longtemps brûlé son effigie en place publique ! Ponnelle versus Chéreau, en somme ; Zeffirelli versus Marthaler.  Il faut de tout pour faire un monde, comme dit ma grand-mère quand elle est à court d’arguments !

Il faut de tout et même des Lohengrin où le héros n’a pas troqué son cygne contre une moto quelconque ; où Elsa n’entretient pas des relations saphiques avec Ortrud ; où elle n’est pas, non plus, victime expiatoire d’une tournante débridée sur un bout de trottoir boueux dans le no man’s land de Berlin Est.

On peut penser a contrario que la vision de Herzog est et reste… une vision justement. Ou plutôt qu’elle donne à voir. Qu’elle donne à voir de beaux clairs de lune, de sensibles ambiances bleutées, d’impressionnants morceaux d’architecture. Qu’elle donne à voir quelque chose comme une toile de Friedrich animée – mais n’est-ce pas trahir Friedrich que d’y mettre du mouvement, justement ?

On peut penser que Herzog ne tire pas vraiment Studer d’une léthargie qui en fait une silhouette un peu fantomatique, parfois molle ; qu’il ne donne pas franchement de distinction à Schnaut qui fait vaguement vulgaire, un peu crapule, un peu gouape ; qu’il n’anime pas les foules ; qu’il ne révolutionne rien, pour tout dire !

Le lui a-t-on demandé ? N’était-ce d’ailleurs pas, déjà, une révolution de faire cela en venant, à Bayreuth, après Chéreau et Kupfer ? L’imagier est beau, c’est tout ce que je vois ; clair ; lisible ; un peu plus même ; et comme on parle tout de même d’un dvd c’est un sérieux atout !

Et musicalement cela se tient. Studer irise, darde ; Schnaut ne s’avachit pas – pas encore – et tient bien les défis d’Ortrud avec un Entweihte Götter assassin chanté dos au public ; Frey est bien tenu, lyrique – sans être Konya – et sans vrai génie… mais sans vrai reproches aussi ! Telramund beugle un peu mais c’est la règle du jeu ; le Roi indiffère, il faut le reconnaître, mais son Hérault est des tout meilleurs. Le chœur excelle – c’est une marque de fabrique sur la Colline Verte - et Schneider fait de la belle ouvrage, à grands coups de brosse certes mais de manière convaincante.

La parfaite version d’initiation.


Benoît BERGER



Commander ce DVD sur Amazon.fr
[ Sommaire de la Revue ] [ haut de page ]