C  R  I  T  I  Q  U  E  S
 
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Richard Wagner 

TANNHAÜSER

Jane Eaglen (Elisabeth)
Waltraud Meier (Venus)
René Pape (Landgraf)
Peter Seiffert (Tannhäuser)
Thomas Hampson (Wolfram)
Gunnar Gudbjörnsson (Walther)
Hanno Müller-Brachmann (Biterolf)
Stephan Rügamer (Heinrich)
Alfred Reiter (Reinmar)
Dorothea Röschmann (Hirt)

Staatskapelle de Berlin
Choeur du Staatsoper de Berlin

Daniel Barenboim , direction

3 CD Teldec 8573-88064-2
(sortie : février 2002)


Voyage au bout de l'ennui
 

On devrait décerner une médaille au courageux chroniqueur qui est allé au bout de l'écoute de cet interminable Tannhäuser. Rarement on aura entendu une intégrale wagnérienne aussi désespérément monotone et pesante. Daniel Barenboim a choisi des tempi exagérément lents. J'en veux pour preuve l'ouverture, qui dure près d'une minute de plus que chez Bernard Haitink, et la bacchanale qui nous ferait craindre que Dionysos se soit converti à l'eau minérale. Il nous offre de la partition une lecture prosaïque, privée de sensibilité et de poésie, et pour tout dire franchement ennuyeuse, en dépit de la qualité des pupitres de la Staatskapelle de Berlin. Sa direction disqualifie cet enregistrement qui réunit pourtant quelques chanteurs de talent. Je ne parle pas ici de Jane Eaglen, qui constitue une énorme (dans tous les sens du terme) erreur de distribution. Et pourtant, elle réalise une entrée encourageante en attaquant "Dich, teure Halle" avec beaucoup de fraîcheur, et par moment se révèle même capable de nuances. Mais pour quelques rares moments de lumière et de poésie, il faut supporter une grande mollesse d'expression et surtout un aigu absolument problématique, qui confine systématiquement au cri. Barenboim  a retenu la version de Dresde, à l'exception de la scène 2 de l'acte I, empruntée à la version de Paris. On ne s'en plaindra pas puisque le rôle de Vénus y est davantage développé et que Vénus ici c'est Waltraud Meier, maîtresse de cette tessiture délicate avec un aigu éclatant. Elle campe la plus envoûtante des déesses, tour à tour caressante et véhémente. René Pape est un somptueux Landgrave. Voilà un chanteur qui marche allègrement sur les traces de Kurt Moll, ce qui n'est pas un mince compliment. Thomas Hampson est lui aussi somptueux de timbre en Wolfram mais pêche par excès d'intentions et l'on aimerait parfois un entendre un chant moins policé et plus spontané. La belle voix lyrique de Peter Seiffert, Walther et Lohengrin de premier plan, convient parfaitement au Venusberg. Il y impose son timbre lumineux et une belle expression poétique, notamment dans "Dir töne Lob" abordé avec la délicatesse d'un chanteur de lieder. Tout y est : souplesse vocale, éclat de l'aigu, jeunesse du timbre. Dans les passages dramatiques, l'effort est parfois perceptible mais la prestation dans son ensemble se situe à un très bon niveau dans le paysage vocal actuel. Notons encore un bon Walther et un Biterolf au vibrato envahissant mais l'essentiel est dit : voilà un enregistrement bien ennuyeux, dont on pourra aisément se dispenser.
  


Vincent Deloge

(mise en ligne : 18/3/2002)
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