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Dix choses à ne pas faire à l’opéra

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Humeur
22 juin 2015

Pour passer une bonne soirée à l’opéra sans accessoirement gâcher celle de ses voisins, mieux vaut éviter de :

  1. débarquer les mains dans les poches

On ne le dira jamais assez : l’opéra est un art exigeant qui nécessite un minimum de préparation avant d’y sacrifier, surtout si l’on est débutant en la matière. A minima, lire le synopsis de l’œuvre que l’on va découvrir, qu’elle soit ou non chantée dans une langue que l’on comprend. S’en remettre à la prononciation – parfois approximative – des chanteurs ou aux surtitres serait une erreur, car il faut aujourd’hui compter avec l’imagination de certains metteurs en scène dont le travail, au mépris du livret, s’emploie à revoir l’histoire jusqu’à en modifier le sens. Le procédé n’est pas toujours sans intérêt, au contraire, mais pour en apprécier la pertinence et mesurer les libertés prises, mieux vaut connaître le scénario original. Jeter une oreille sur les grands airs (quand il y en a), se renseigner sur la durée de l’œuvre, son articulation, éventuellement son histoire, aide aussi à mieux appréhender ce qui se passe sur scène, une fois le rideau levé.

  1. arriver en retard

Contrairement à d’autres formes de spectacle, l’heure à l’opéra, c’est l’heure. La représentation n’attend pas, ne serait-ce qu’une poignée de minutes. Une fois la lumière éteinte, il n’est plus question d’entrer dans la salle. Tout mouvement intempestif romprait un silence qui se doit d’être absolu. Les retardataires sont priés de patienter à l’extérieur jusqu’à l’entracte. Condamnés à suivre la représentation sur un petit écran dans des conditions sonores et visuelles inconfortables, ils ont tout loisir de se dire, mais un peu tard, que la prochaine fois, ils vérifieront, plutôt deux fois qu’une, l’heure du lever de rideau, variable d’un théâtre et d’une œuvre à l’autre. Rageant, voire révoltant, d’être ainsi privé d’une partie du spectacle quand on a payé – parfois cher – l’intégralité de sa place ? Non, normal. Art royal s’il en est, l’opéra a fait sienne la politesse des rois : l’exactitude.

  1. ne pas éteindre son téléphone portable

Systématique, une annonce le rappelle avant le début du spectacle : prière d’éteindre vos téléphones portables. Éteindre et non mettre en mode vibreur, le bruit des vibrations perturbant tout autant que les sonneries la représentation. Devenu smartphone avec l’évolution des technologies, le téléphone portable a encore accru et diversifié sa capacité de nuisance. Au son de l’appareil, s’est ajoutée la lumière de l’écran. Lire ses courriels, rédiger des textos, prendre des photos, consulter la météo, partager ses émotions sur les réseaux sociaux… C’est fou toutes les possibilités de déranger ses voisins durant le spectacle. Afin de ne pas céder à la tentation d’en user, on veillera à couper radicalement le dernier fil qui, dans la salle, nous relie à ce monde auquel l’opéra nous aide justement à échapper.

  1. froisser un papier de bonbons

Parfois salutaire pour apaiser toux et grattements de gorge (voir ci-dessous), le bonbon devient fléau plus redoutable que ceux qu’il tente de combattre dès qu’il faut l’extirper de son papier. Quelle que soit la méthode employée – peu à peu, doucement ou au contraire, violemment d’un coup sec – l’opération, forcément bruyante, met les nerfs de la salle en pelote. D’une manière générale, tout froissement de matières – programme, journal ou pire sac en plastique que l’on piétine inlassablement – est proscrit sauf, à l’extrême rigueur, dans un opéra contemporain où le bruissement peut passer pour effet sonore voulu par le compositeur. Boucles d’oreille, bracelets et autres breloques que chaque mouvement de tête ou de bras transforme en maracas donnent lieu aux mêmes recommandations.

  1. tousser, parler, chanter…

Durant une représentation d’opéra, le silence – on l’a compris – étant d’or, une fois la lumière éteinte, on s’abstiendra d’ouvrir la bouche, qu’il s’agisse d’exprimer son point de vue à basse ou haute voix, de fredonner avec les chanteurs ses airs préférés (si, si, ça arrive), de se racler la gorge ou de tenter d’expulser les glaires de ses poumons. Et téléphoner à sa baby-sitter pour savoir si le petit dernier s’est endormi (histoire vécue) ? Oui, ça aussi, il faut éviter.

  1. battre la mesure

Certes, il y a en chacun de nous, un chef d’orchestre qui sommeille, un dieu méconnu de la baguette qui, à défaut de pouvoir, depuis l’estrade, diriger chanteurs et musiciens, se donne depuis son fauteuil l’illusion de le faire en battant la mesure. Rien de bien méchant mais à l’opéra, la main qui va, vient, brasse l’air en rythme et marque les instants les plus lyriques d’un geste plus large a tôt fait d’agacer ses voisins, jusqu’à les priver d’une partie de leur plaisir. De même qu’il est malvenu de chanter en même temps que les chanteurs durant la représentation (voir plus haut), il est déconseillé en dehors de sa salle de bain ou de l’intimité de son salon de se prendre pour le maestro.

  1. applaudir trop tôt

Savoir applaudir au bon moment durant une représentation d’opéra n’est pas si évident. Combien d’artistes déconcentrés et de coïts émotionnels interrompus par des manifestations prématurées ou inopportunes d’enthousiasme. Certes, il n’est pas toujours aisé de repérer, dans une partition que l’on ne connaît pas, la fin d’une scène ou d’un air (celui de Manon de Massenet, « Je marche sur tous les chemins » en fait régulièrement les frais). S’il n’est pas toujours facile de réprimer ses élans de satisfaction, une règle, simple, doit être gardée en mémoire : à la fin de l’opéra, attendre plusieurs secondes après la dernière mesure pour applaudir, car il faut élargir à tous les compositeurs ce que Sacha Guitry n’appliquait qu’à Mozart : le silence qui suit leur musique est encore musique.

  1. huer

Huer ou ne pas huer ? Le point se discute. Certains arguent du prix de leur billet pour justifier l’opprobre dont ils n’hésitent pas à couvrir bruyamment chanteurs, chefs d’orchestre ou metteur en scène s’ils estiment qu’ils ont desservi l’œuvre interprétée. Nous pensons pour notre part qu’aucune vérité n’est absolue (voir ci-dessous), que la cruauté et l’inélégance de la sanction en disqualifient l’usage, qu’un silence poli suffit à exprimer sa désapprobation, qu’une salle d’opéra n’est pas une arène de cirque et qu’au martyr des premiers chrétiens à l’époque romaine, ne saurait se substituer aujourd’hui celui des artistes.

  1. partir dès le rideau tombé

Nombreuses sont les raisons de vouloir partir parmi les premiers à la fin de la représentation, dès le rideau tombé : éviter la bousculade dans la salle, l’attente au vestiaire, l’affluence au parking ou à la station de métro, se coucher le plus tôt possible afin de prévenir une fatigue préjudiciable le lendemain à ses occupations… Quel que soit le motif invoqué pour gagner ventre à terre la sortie, il ne peut prévaloir à ces deux mamelles de la vie en société que sont civilité et respect. Civilité exigeant de ne pas déranger des voisins qu’un départ, prématuré, en les obligeant à se lever, importunerait tout comme la partie de la salle placée derrière eux. Respect dû à des artistes ayant amplement mérité par leur travail et leur engagement – vocal, musical, théâtral – qu’on les applaudisse.

  1. prononcer un avis définitif

Non, à l’opéra, il n’y a pas d’un côté les experts, les tenants d’une vérité définitive, imbus de leurs connaissances, et les autres, les novices, les spectateurs occasionnels, les dilettantes. Trop souvent, les derniers sont remis à leur place par les premiers – d’un regard méprisant ou d’un exposé scientifique, peu importe – pour avoir osé formuler un avis contraire à ce que des années assidues de pratique lyrique donneraient à penser. Pareille attitude pourrait décourager nos amateurs moins éclairés de franchir à nouveau le seuil d’un temple dont on a pris soin de leur faire comprendre qu’ils ne maîtrisaient pas les codes. C’est dommage. Qu’importe le flacon – mise en scène, direction musicale, interprétation vocale –, pourvu qu’on ait l’ivresse. Plus que réfléchir, l’opéra veut donner à ressentir et nous sommes tous égaux devant l’émotion.

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