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Dix perles de la couronne britannique

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Humeur
7 novembre 2016
Dix perles de la couronne britannique

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La Grande-Bretagne, « pays sans musique », vous y croyez-encore, vous ? Pour faire un sort à ce cliché, dix exemples prouvant que le Royaume-Uni a toujours cultivé l’art lyrique sous toutes ses formes.


1. John Dowland, « Weep you no more, sad fountains » (Third Booke of Songes, 1603)

En 1621, Robert Burton publiait son Anatomy of Melancholy. L’excédent de bile noire serait-il un mal typiquement britannique ? A écouter la musique de John Dowland, on serait presque tenté de le croire, tant le compositeur sut trouver un équivalent sonore à ce que, quelques siècles plus tard, les Français baptiseraient d’un mot emprunté, comme par hasard, à l’anglais : spleen.

2. Henry Purcell, « If love’s a sweet passion » (The Fairy Queen, 1692)

Même s’il lui arrivait d’exprimer la truculence érotique de bergers n’ayant rien de bien bucolique (voir le fameux duo de Corydon et Mopsa dans The Fairy Queen), Henry Purcell fut peut-être surtout le chantre des larmes, de la douleur et – again – de la mélancolie. Sur une mélodie fort simple, « If love’s a sweet passion » dit ces tourments amoureux dont l’opéra (ou même le semi-opera) fut toujours friand.

3. George Frideric Haendel, « Bane of virtue » (Theodora, 1750)

Après avoir d’abord régalé les oreilles des Londoniens d’opéras en italien, Haendel s’adressa à leur âme en leur parlant en anglais dans ses oratorios religieux. Theodora prêche les plus sévères vertus protestantes, mais comment ne pas trouver des charmes à l’austérité lorsqu’elle s’exprime par la voix de l’irremplaçable Lorraine Hunt ?

4. Thomas Arne, « The soldier tir’d » (Artaxerxes, 1762)

Tous les Britanniques connaissent Thomas Arne. Ou du moins, s’ils n’ont jamais entendu son nom, ils connaissent tous sa musique, puisqu’il est le compositeur de leur hymne national, Rule, Britannia. Plus de vingt ans après Alfred, le « masque » où figurait ce chant patriotique, Arne livrait un Artaxerxes émaillé d’arias virtuoses, que les historiens présentent comme le premier opera seria en anglais.

5. Michael William Balfe, « When other lips » (The Bohemian Girl, 1843)

Laurel et Hardy ont consacré un film à Fra Diavolo où l’on entend la musique d’Auber, mais ils ont aussi commis une adaptation de The Bohemian Girl de l’Irlandais William Michael Balfe (1808-1870) qui, après avoir chanté le Figaro de Rossini à Paris, travailla notamment pour Julia Grisi et Maria Malibran. Cette Bohémienne reste le plus populaire de ses vingt-neuf opéras, notamment grâce à son air qu’ont enregistré les plus illustres ténors anglophones.

6. James Lynam Molloy, « Love’s old sweet song » (1884)

Dans Ulysse de James Joyce, Molly Bloom a gardé de son passé de cantatrice le souvenir de l’air « O beau pays de la Touraine », des Huguenots. Dans un tout autre registre, elle a aussi inscrit à son répertoire un tube des salons victoriens, « Love’s old sweet song », dû à un compositeur irlandais. Si vous envisagez de participer un 16 juin au Bloomsday, fête joycienne, il est recommandé de connaître par cœur les paroles de cette chanson.

7. Gilbert & Sullivan, « Three little maids from school » (The Mikado, 1885)

Certes, l’opérette peut faire figure de spécialité typiquement française, mais la Grande-Bretagne eut sa réponse à Offenbach, en la personne d’Arthur Sullivan et de son librettiste William S. Gilbert, qui conçurent une quinzaine d’opéras-comiques entre 1871 et 1896. Le plus célèbre est sans doute The Mikado, dont le japonisme de surface masque à peine une satire de l’Angleterre victorienne.

8. Edward Elgar, « Sabbath morning at sea » (Sea Pictures, 1899)

Habitant des îles britanniques, toujours tu chériras la mer. Un demi-siècle avant les sublimes Sea Interludes de Britten pour Peter Grimes, Elgar composait cinq Sea Pictures. Principale différence : ce n’est pas à l’orchestre seul qu’est confié le soin de dépeindre les paysages maritimes, puisqu’un texte chanté par une voix de contralto ajoute sa force évocatrice.

9. Benjamin Britten, « To Sleep » (Sérénade pour ténor, cor et orchestre, 1943)

La voix de Peter Pears, sans être toujours la plus suave au monde, inspira durablement celle de son compagnon Benjamin Britten. Parmi les plus belles pages conçues par le compositeur pour le ténor figure incontestablement sa Sérénade, mise en musique de six poèmes aux atmosphères variées, empruntés à certains des plus glorieux noms de la littérature anglaise. Le sonnet au sommeil de Keats en est un grand moment.

10. Thomas Adès, Air d’Ariel (The Tempest, 2004)

L’art lyrique n’est pas mort en Grande-Bretagne, comme en témoigne le succès remporté par George Benjamin avec Written on Skin ou Thomas Adès, dont le troisième opus lyrique, The Exterminating Angel, vient d’être créé à Salzbourg cet été. Dans son deuxième opéra, The Tempest, le personnage surnaturel d’Ariel est prétexte à un hommage à la voix de soprano colorature, qui plane plus que jamais sur les hauteurs stratosphériques.

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