L’histoire de l’institution trouve ses racines dans la carrière de la cantatrice. Voix de glace, aigus d’acier, projection phénoménale certes mais Birgit Nilsson voulait plus que chanter : elle voulait transmettre. Dès 1969, elle crée une bourse d’études pour les jeunes chanteurs suédois en mémoire de son maître Ragnar Blennow. Puis, dans les années 1980, elle imagine un prix mondial qui récompenserait l’excellence dans le chant et la musique classique. Après sa mort en 2005, sa Fondation prend vie et concrétise son rêve, dès 2009 en couronnant Placido Domingo, conformément au souhait formulé par Birgit Nilsson dans son testament. Le Festival d’Aix-en-Provence est le dernier récipiendaire de la prestigieuse distinction, remise ce 21 octobre par le roi de Suède, Carl XVI Gustaf, lors d’une cérémonie solennelle.
Remise par le roi de Suède Carl XVI Gustaf du prix Birgit Nilsson à la maire d’Aix-en-Provence, Sophie Joissains, et au président du Festival d’Aix-en-Provence, Paul Hermelin. A droite, la présidente de la Fondation Birgit Nilsson, Susanne Rydén © Yanan Li
Mais la Fondation ne se limite pas à ce prix. Patrimoine, éducation et mémoire sont mis en jeu à travers de multiples initiatives, telles la conversion de la maison natale de Birgit Nilsson en musée – à Svenstad –, des masterclasses de chant, des expositions iconographiques (par exemple à Stockholm en 2018, pour le centenaire de sa naissance) ou encore la publication d’ouvrages et de coffrets discographiques retraçant la carrière de la chanteuse. Le Stipendium Birgit Nilsson continue de soutenir de jeunes chanteurs suédois. Sa bourse annuelle s’élève à la coquette somme de 250.000 couronnes suédoises (un peu plus de 22.000 euros). La dernière lauréate, la jeune soprano Karolina Berngtsson était invitée l’été dernier à Båstad. Cette petite ville-côtière de la péninsule de Bjäre, au bord de la mer d’Öresund (entre la Suède et le Danemark) célèbre depuis 2018 Birgit Nilsson à travers un festival estival qui porte son nom. L’édition 2026, du 2 au 8 août, culminera avec une représentation en plein air du Vaisseau fantôme de Richard Wagner portée par une distribution prestigieuse : Elisabet Strid, Christopher Maltman, Stanislas de Barbeyrac, Günther Groissböck… (plus d’informations).
Båstad vu du ciel avec, au centre de la photo, le cours de tennis de Bāstad, transformé en théâtre de plein air chaque été durant le Birgit Nilsson Festival © Johan-Lilja
En 2019, la fondation a été placée sous l’égide de l’Académie royale de musique de Suède (Kungl. Musikaliska Akademien) et a adopté son appellation actuelle (Birgit Nilsson Stiftelse). Son rayonnement ne se veut pas moins international, car les défis qu’elle relève n’ont pas de frontières. Au moment où la musique classique et l’art lyrique font face à de nouvelles problématiques – évolution des publics, renouvellement du répertoire, numérisation, contraintes économiques, écologistes et sociétales –, l’un de ses enjeux est d’ouvrir davantage encore les horizons : encourager la création contemporaine, soutenir la transmission, accompagner les institutions innovantes, favoriser une diversité d’approches…
Ainsi, l’héritage de Birgit Nilsson ne se résume pas à une voix d’exception, mais à l’élan qu’elle inspire encore à ceux qui façonnent l’opéra de demain.