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MOZART, Cosi fan tutte – Munich (Staatsoper)

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Spectacle
17 juillet 2023
Une bonne surprise de taille

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Dramma giocoso en 2 actes

Musique de W. A. Mozart

Livret de Lorenzo da Ponte

Création le 26 janvier 1790 au Burgtheater de Vienne

Première dans cette production le 26 octobre 2022 au Bayerisches Staatsoper

Détails

Mise en scène

Benedict ANDREWS

Assistante pour le jeu

Anna BRUNNLECHNER

Décors

Magda WILLI

Costumes

Victoria BEHR

Lumières

Mark von DENESSE

Dramaturgie

Katja LECLERC

Fiordiligi

Louise ALDER

Dorabella

Avery AMEREAU

Guglielmo

Konstantin KRIMMEL

Ferrando

Sebastian KOHLHEPP

Despina

Sandrine PIAU

Don Alfonso

Johannes Martin KRÄNZLE

Cheffe des choeurs

Kamila AKHMEDJANOVA

BAYERISCHES STAATSORCHESTER

Bayerisches Staatsopernchor

Continuo :

Julian PERKINS, Pianoforte

Anja FABRICIUS, Violoncelle

Myron ROMANUL, Cymbales

Direction musicale

Vladimir JUROWSKI

Munich, Nationaltheater, le samedi 15 juillet 2023 à 18h

 

Dans le cadre du Festival d’Opéra d’été (München Opernfestspiele) commencé le 23 juin et qui se termine le 31 juillet, une riche programmation ravit tous les mélomanes de 7 à 77 ans. Notons que le 23 juillet sera donné Aida gratuitement (sur écran géant) sur la place du Nationaltheater, sis Max-Josef Platz, dans le cadre de l’opération « Oper für alle » (19h).

Il est par ailleurs fortement conseillé de découvrir la reprise de la production créée in loco au Bayerisches Staatsoper en automne 2022 de Cosi fan tutte, dans la proposition très réussie de Benedict Andrews sous la direction du grand Vladimir Jurowski (voir les dates en juillet puis la saison 2023-24 sur le site de l’opéra).

Car ce spectacle est tout simplement excellent. Peut-on sans réécriture outrageante ou trahison inutile mettre en scène un Cosi qui puisse nous parler aujourd’hui, au-delà du plaisir de l’écoute d’une partition magnifique ? Oui. Benedict Andrews le prouve, secondé par un quatuor de jeunes chanteurs de premier ordre, eux-mêmes encadrés par deux artistes confirmés. Tous supervisés par le génie de la direction, le charismatique Generalmusikdirektor de l’orchestre, arrivé depuis 2020, en même temps que Serge Dorny.

Plutôt que de s’intéresser au point de vue moral de l’intrigue, qui n’est décidément pas l’affaire de Mozart (la conclusion pleine d’un faux stoïcisme parodiant un Sénèque n’existe que pour faire une fin), le metteur en scène australien va confronter deux sexes, et leurs deux représentations également fausses ou incomplètes de l’amour en donnant aux amants la leçon promise par le sous-titre du dramma giocoso. Au premier acte, les hommes se vantent de la perfection de leurs fiancées en utilisant sarcastiquement le masque sado-maso que Don Alfonso utilise dans ses ébats avec Despina (en perruque rose) et un godemichet, laissant entendre que le « male gaze » c’est avant tout affaire de sexe plutôt que de sentiments (Ils seront bientôt pourtant étonnés de la force de leurs propres sentiments).

Au contraire les filles rêvent encore de princes charmants et de mariage (en témoigne le château de La Belle au Bois dormant version Disney posé sur le plateau qui ne fera qu’enfler littéralement et occuper tout l’espace au deuxième acte). Dorabella, puis Fiordiligi découvriront bientôt que d’autres pulsions les gouvernent, qu’on ne saurait aisément réprimer.

Évidemment, choisissant de minorer la cruauté du dispositif mis en place par les hommes, Benedict Andrews n’aura de cesse de démontrer que l’amour est forcément inconstant car lié aux faiblesses humaines et aux aspirations tant sensuelles que sentimentales des corps. Et c’est ce qui fait, selon lui, sa beauté dans l’instant.

Rappelant donc l’impermanence des choses de la vie, B. Andrews choisit de placer ses personnages dans des lieux banals (en des boîtes qui glissent latéralement ou pas pour dévoiler d’autres espaces). Ce sont un appartement miteux, un mur tagué d’obscénités, un garage pour une flambante voiture de marque allemande (mécène de l’institution). Des lieux qui abriteront de savoureux gags et scènes comiques – car on rit beaucoup (voir par exemple la géniale scène dans – et sur le capot de – la voiture allemande susnommée, au premier acte). Les trouvailles de mise en scène et de jeu comique sont ainsi légion, venant aussi heureusement occuper les quelques petites longueurs d’un 2e acte, assez répétitif parfois (rappelons que l’intrigue est assez mince pour 3h15 de musique). Chaque chanteur déployant constamment un abattage plus que jouissif.

Quand les désirs et les illusions amoureuses s’emballeront, un magnifique champ de roses remplacera un temps les lieux prosaïques de notre modernité. Ah, naïveté des humains !
De surcroît B. Andrews renouvelle cet art du déguisement (moderne ici) à la mode au théâtre au XVIIIe siècle. Cosi fan tutte est bien cet opéra à transformations où les personnages jouent plusieurs rôles – à coup de pantalons en cuir, de santiags rock, de treillis, de robes de princesses et autres lunettes noires pour soirées de samedis enfiévrés.

Le quatuor de chanteurs des rôles principaux est formidable. La Fiordiligi de Louise Alder déploie un chant tout en naturel, souplesse et virtuosité. Elle est parfaitement émouvante en héroïne qui résiste presque jusqu’au bout. Son grand air (« Per Pietà, ben mio, perdono ») est un miracle fort applaudi. La soprano anglaise se joue avec une apparente facilité des difficultés (longueur, registres) de ce terrible passage et enchante par ses vocalises à la ligne experte. La Dorabella de la mezzo Avery Amereau fonctionne admirablement avec sa sœur de plateau. Son timbre cuivré, sensuel aux riches couleurs sert un très beau chant et le tempérament de l’artiste a vraiment tout le feu et le délire du personnage. Tout en exagération amusante (« Smanie implacabili ») telle une furie ou en encouragements à tromper les fiancés, la mezzo est des plus convaincantes. On regrettera des fesses un peu trop exhibées avant le faux mariage, choix peu féministe (pour une chanteuse) ?

Le Ferrando de Sebastian Kohlhepp offre une interprétation bien adaptée à cette amusante production sans être inoubliable. Manque sans doute chez lui ce canto sul fiato attendu pour le rôle. Mais ce style conviendrait-il à cette proposition ? Il sait en tout cas s’affirmer dans le drame. Le baryton Konstantin Krimmel est un Guglielmo quasi idéal, forte tête parfaitement bouffe, qui brûle les planches. Leurs ensembles à tous, primordiaux chez Mozart, sont parfaitement homogènes. Si Johannes Martin Kränzle est un Don Alfonso un peu fatigué au début du spectacle, il tient jusqu’au bout avec de plus en plus de fermeté et de technique son rôle de cynique. La Despina de Sandrine Piau déploie la vis comica qui l’a aussi rendue célèbre dans ce personnage de soubrette (ici tout droit sortie du roman d’Octave Mirbeau). Elle est tout simplement irrésistible, même si quelques difficultés se font entendre ici ou là (en cause parfois la projection de la voix, mais l’intelligence de la soprano supplée à tout).

Dans la fosse, les sortilèges d’un discours musical subtil, allègre ou bouleversant, sont passionnément dispensés grâce à un orchestre en état de grâce mozartienne absolue. N’est-il pas dirigé par un maître dont on sent que les musiciens suivraient la crinière léonine jusqu’en enfer ou au paradis ?  On sait que le chef russe a attendu une certaine maturité pour diriger Mozart. Travaillant finement l’agogique du récit, il sait idéalement en faire surgir l’énergie, en soigner l’élégance. Vladimir Jurowski révèle la profondeur et la gravité fervente sous la légèreté et facilité apparentes du marivaudage musical. C’est l’apanage des grands. Il peut, il est vrai, compter sur d’excellents pupitres (Appels des bois chantants, frissons grâce aux cordes raffinées ou incisives, ironie des cuivres brillants, entre autre très bon continuo pour les récitatifs).

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Musique de W. A. Mozart

Livret de Lorenzo da Ponte

Création le 26 janvier 1790 au Burgtheater de Vienne

Première dans cette production le 26 octobre 2022 au Bayerisches Staatsoper

Détails

Mise en scène

Benedict ANDREWS

Assistante pour le jeu

Anna BRUNNLECHNER

Décors

Magda WILLI

Costumes

Victoria BEHR

Lumières

Mark von DENESSE

Dramaturgie

Katja LECLERC

Fiordiligi

Louise ALDER

Dorabella

Avery AMEREAU

Guglielmo

Konstantin KRIMMEL

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Sebastian KOHLHEPP

Despina

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Don Alfonso

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Kamila AKHMEDJANOVA

BAYERISCHES STAATSORCHESTER

Bayerisches Staatsopernchor

Continuo :

Julian PERKINS, Pianoforte

Anja FABRICIUS, Violoncelle

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Munich, Nationaltheater, le samedi 15 juillet 2023 à 18h

 

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