C O N C E R T S 
 
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STRASBOURG
12/02/03
 

© Alain Kaiser
 

Arabella

Direction musicale - Dietfried Bernet
Mise en scène - Brigitte Fassbaender
Décors, costumes, éclairages - Dietrich von Grebmer

Graf Waldner - Günther Missenhardt
Adelaide - Ute Trekel-Burkhardt
Arabella - Angela Denoke
Zdenka - Henriette Bonde-Hansen
Mandryka - Yuri Batukov
Matteo - David Kuebler
Graf Elemer - Stefan Vinke
Fiaker-Milli - Christine Buffle
Kartenaufschlägerin - Daniela Denschlag

Chúurs de l'Opéra national du Rhin
Orchestre Philharmonique de Strasbourg

Nouvelle production

Strasbourg, Opéra, 12 février 2003


C'est la grande Brigitte Fassbaender, désormais metteur en scène depuis qu'elle a mis un terme à sa carrière de chanteuse en 1995, qui proposait sa conception d'Arabella pour cette nouvelle production de l'Opéra du Rhin.
Le fait qu'une femme se penche sur cette histoire féminine, si ce n'est féministe, pouvait augurer du meilleur. Ce fut pratiquement le cas.
La vision de Brigitte Fassbaender est relativement classique (à peine l'action est-elle transposée des années 1860 aux années 1900), sobre, légère, elle dégage une douceur et une nostalgie délicieuses qui conviennent particulièrement bien à l'ouvrage.
L'action, essentiellement psychologique, réclame surtout une direction d'acteurs qui puisse traduire les sentiments et les pensées des personnages. Mission parfaitement réussie. Chaque personnage est ici soigneusement dessiné, la gestuelle venant souligner tel épanchement (magnifique duo Arabella/Mandryka au deuxième acte), tel doute (Mandryka brisé par la jalousie au troisième acte), tel désir (Zdenko hésitant à prendre la main de Matteo au premier acte). Si l'on ajoute que chaque chanteur possède le physique du rôle et a su entrer dans son personnage (le père, bonhomme; la mère aux grandes allures; Matteo, angoissé; Elemer, boute-en-train naïf etc.), que les décors et costumes affichent un raffinement sans ostentation, on aura compris quel plaisir il y avait à voir ce spectacle.
Brigitte Fassbaender a su en outre rendre magiques les moments élégiaques où le temps semble s'arrêter (duo des deux soeurs au premier acte, scène entre Mandryka et Arabella au deuxième, scène finale...) et a réussi à traduire sans excès le climat décadent de cette Vienne de la fin du XIX° siècle, le bal du deuxième acte étalant le grotesque, la facilité et la mesquinerie de ces nobles et bourgeois (méprisant les femmes légères mais qui n'hésitent pas à rentrer avec l'une d'elles à l'hôtel...). Malgré tout, on pourra s'interroger sur la présence un peu encombrante d'un personnage à tête d'ours durant les actes II et III. Certes, Mandryka dit avoir été blessé par un ours lors d'une chasse, le prétexte semble tout de même un peu léger pour nous infliger l'animal durant presque tout le spectacle...

Angela Denoke incarnait sa première Arabella. Le phrasé est extrêmement soigné, tout comme la diction, le vibrato est maîtrisé (on le devine plutôt large), la voix peut paraître un peu ìblancheî par moments, pourtant, on est séduit par la chanteuse et surtout par la comédienne qui réussit à camper une Arabella très douce et féminine. Une incarnation particulièrement touchante.
Touchante, la Zdenka/Zdenko d'Henriette Bonde-Hansen l'est tout autant. Elle comble par un chant radieux et une incarnation très sensible du personnage.

© Alain Kaiser

 

Le Comte Waldner de Günter Missenhardt est excellent à tous points de vue. La voix d'Ute Trekel-Burchardt (Adélaïde) est entachée d'un fort vibrato, les aigus sont criards, mais l'actrice est parfaite.
Yuri Batujkov, en Mandryka, ne possède pas un fort volume, mais il comble par une voix très agréable, une ligne de chant superbe et une diction excellente. Son physique, un peu pataud, convient en outre à merveille à ce personnage un peu gauche. 
Les autres prétendants d'Arabella sont idéalement différenciés tant par la caractérisation scénique que par le choix des voix. David Kuebler est un très bon Matteo. La voix, solide, est certes un peu acide, mais elle convient particulièrement bien aux éclats du troisième acte. Stefan Vinke affiche une voix claironnante, un peu nasale, qui s'accorde tout autant au personnage extraverti d'Elemer. Gerardo Garciacano en Dominik, Pawel Lawreszuk en Lamoral et Daniela Denschlag en diseuse de bonne aventure sont parfaits.
Christine Buffle incarne une Fiakermili convaincante. On pourra trouver la voix un peu dure, mais aigus et vocalises sont en place et l'abattage finit par emporter l'adhésion.

La réussite du spectacle doit aussi énormément à l'excellente direction d'orchestre de Dietfried Bernet qui dirige d'une main de maître cette exigeante partition. L'Orchestre Philhamornique de Strasbourg s'est montré particulièrement virtuose.

L'art de la distribution est difficile, l'Opéra du Rhin vient de nous montrer, une fois de plus, qu'il excelle dans ce domaine, tout comme dans celui de réunir une équipe que l'on sent solidaire.
 
 

Pierre-Emmanuel Lephay


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Prochaines représentations :

à Strasbourg: 16, 22 et 24 février à 20h  (Renseignements: 03 88 75 48 23)
à Mulhouse: 28 février 20h, 2 mars 15h (Renseignements: 03 89 36 28 28)

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