C O N C E R T S 
 
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GENEVE

27/09/02


(crédit photo : CTG / Carole Parodi)
Don Carlos
Drame Lyrique en 4 actes de Giuseppe VERDI
(version de Milan, en italien)
Livret de Joseph Méry et Camille Du Locle, d'après Schiller 
 

Direction Musicale : Evelino Pido
Mise en scène : Patrice Caurier et Moshe Leiser
Décors : Christain Fenouillat
Costumes : Agostino Cavalca
Lumières : Christophe Forey

Philippe II : Gidon Saks
Don Carlos : Octavio Arevalo (en alternance avec Kaludi Kaludov)
Le grand Inquisiteur : Askar Adbrazakov
Elisabeth de Valois : Olga Guryakova
La princesse Eboli : Irina Mishura

Orchestre de la Suisse Romande
Choeurs du Grand Théâtre
Choeur Orpheus de Sofia

Genève - 27 Septembre 2002



C'est une rentrée en grande pompe que célèbre Genève avec ce Don Carlos version de Milan qui correspond également au quarantième anniversaire de la réouverture, après incendie et travaux, du Grand Théâtre. Les amateurs de grand spectacle seront comblés, car derrière une esthétique somme toute assez sombre, Patrice Caurier et Moshe Leiser n'ont pas lésiné sur les masses ni les effets et le spectacle, dans sa globalité, fonctionne bien. L'alternance, difficile, des scènes de foules et de scènes plus intimes est bien menée grâce à une scénographie intelligente, des décors sobres (deux parois avec angle) qui permettent à volonté de varier tableaux et perspectives. Ajoutons les superbes lumières de Christophe Forey, qui contribuent pour beaucoup à l'ambiance noire et tendue qui imprègne l'ouvrage. Le début du dernier acte est d'ailleurs un formidable exemple de perspective avec le monologue de Philippe. La seule partie en peu en deçà est la scène de l'autodafé, ce qui, je vous l'accorde, est bien dommage. Visiblement gênés par l'action, c'est le seul endroit où les metteurs en scène font appel à un élément de scénographie supplémentaire. L'histoire devient floue, les personnages perdent en lisibilité, noyés dans une masse de choristes et de figurants déployés autour du roi à la manière d'un RubensÖDommage, car riche en symboles, cette surabondance, en ce point précis de l'action, surprend plus qu'elle ne fonctionne. Finalement, le seul reproche que l'on puisse faire à cette production est de nous replonger dans un univers familier : après tant de mises en scène lyrique, Patrice Caurier et Moshe Leiser se sont peut-être enfermés dans un monde et une esthétique immédiatement reconnaissables. Leur travail, bien fait au demeurant et respectable, ne nous surprend guère. 

(crédit photo : CTG / Carole Parodi)

A la tête de l'Orchestre de la Suisse Romande, Evelino Pido insuffle une dimension hyper dramatisée à la musique, variant les tempi à volonté. Le style est efficace, parfois un peu sec, mais loin du "Verdi-popu" à la façon d'une fanfare locale ! L'ouverture de la scène de l'autodafé est martiale à souhait, le maestro prend son temps pour mieux ménager les effets et laisse respirer les chanteurs, c'est un chef qui a du métier et des idées, sa direction est nette et inspirée. Le plateau est de tout premier plan et c'est l'un des principaux atouts de la soirée : Olga Guryakova (Elisabeth) et Irina Mishura (Eboli) forment un superbe tandem, la douceur et la résignation de l'une (splendides phrases de notes filées et d'aigus pianissimo) répondant à l'engagement scénique et au fabuleux matériau vocal de l'autre. Gidon Saks, très à l'aise en Philippe II, fait de sa prise de rôle un événement, le timbre grave est magnifique et l'acteur endosse à merveille le personnage. Octavio Arevalo (Carlos) et Victor Torres (Rodrigue) sont au dessus de tout reproche. Notons également le frisson donné par Askar Abdrazakov en Grand Inquisiteur, noir et glauque, autoritaire : impressionnant !

Cette soirée confirme, après une très belle saison, que le Grand Théâtre est en de bonnes mains avec sa nouvelle direction, relevant le défi d'une programmation équilibrée entre le répertoire et quelques créations excitantes. 


Loïc Lachenal
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