C O N C E R T S 
 
...
[ Sommaire de la rubrique ] [ Index par genre ]
 
......
AIX EN PROVENCE

25/07/02

 
Don Giovanni
Opéra de Wolfgang Amadeus MOZART
Livret de Lorenzo da Ponte

Mahler Chamber Orchestra
Choeur de l'Académie Européenne de Musique
Direction Daniel Harding
Clavecin Ronald Schneider

Mise en scène Peter Brook
Eléments scéniques Tom Pye
Lumière Jean Kalman

Don Giovanni : Peter Mattei
Donna Elvira : Mireille Delunsch
Donna Anna : Alexandra Deshorties
Leporello : Gilles Cachemaille
Zerlina : Lisa Larsson
Masetto : Nathan Berg
Don Ottavio : Mark Padmore
Il commendatore : Gudjon Oskarsson
 

Festival d'Aix-en-Provence, 25 Juillet 2002



Un carré coloré posé au milieu de la scène. Disséminés un peu partout, des pupitres d'écoliers multicolores, des tréteaux, des barres de bois. En dehors du carré, mais toujours sur la scène, le continuo (clavecin et violoncelle) et des bancs sur lesquels les chanteurs viennent parfois s'asseoir quand ils ne participent pas à l'action. Voici tout le dispositif scénique imaginé par Peter Brook pour ce Don Giovanni.

Pas de reconstitution historique donc, et place à l'imagination : les tréteaux se muent en fenêtre, en barrière, en portillon - qui n'a jamais joué à ça, enfant ?- les pupitres et les barres de bois se transforment en à peu près tout ce qu'il est possible de concevoir. Le fantôme de Don Giovanni, une fois descendu aux enfers, reviendra sur scène accompagné du commandeur et se mêlera aux vivants, approuvant la décision de Donna Elvira de rentrer au couvent.

Pour parvenir à rendre ce dispositif crédible, à accrocher le spectateur, à le rendre haletant comme s'il découvrait Don Giovanni, il faut un titulaire du rôle titre d'envergure. C'est le cas de Peter Mattei, irradiant, incandescent, foyer d'énergie brûlant tous ceux qui l'approchent. Au point qu'il est permis de penser que cette mise en scène ne fonctionnerait pas avec un autre interprète.

Condamné d'entrée de jeu, pervers, malsain, le Don Giovanni de Peter Mattei fascine d'autant plus que l'interprète possède un physique de rêve, une force herculéenne (il jette une table à bras ) et une voix magnifique. Face à lui, les autres protagonistes sont exactement ce qu'ils se doivent d'être face au libertin : des ombres attirées par la vitalité intense qui en émane.

Mal mise en valeur par une robe vraiment peu seyante, Mireille Delunsch réalise une entrée d'Elvira un peu décevante, mais elle prend peu à peu la mesure de son personnage, et offre un "Mi tradi" de grande classe.

Le très british Mark Padmore apporte au si bien élevé Don Ottavio l'indispensable touche de correction et de distinction - physique et vocale - qui sied au rôle.

Hélas, le reste de la distribution oscille entre l'anodin et le décevant. On le remarque à peine, aimanté que l'on est par Peter Mattei, mais le fait est là : Lisa Larsson, Nathan Berg et Gudjon Oskarsson n'ont ni voix, ni personnalité marquante. L'Anna d'Alexandra Deshorties est quant à elle une véritable déception : le chant est piaillard, l'interprétation quelconque.

Reste le Leporello uniformément comique de Gilles Cachemaille : il est tout à fait crédible dans cette optique unidimensionnelle, vocalement à l'aise, mais peu sûr rythmiquement (se tromper au début de l'air du catalogue quand on a interprété Leporello sur toutes les scènes internationales ?)

C'est la première fois que Daniel Harding est épinglé dans les colonnes de Forumopéra. Fatigue pour cette dernière prestation d'un festival bien chargé et pour lequel il a assumé deux productions ? L'ouverture est trop rapide, trop brutale, elle perd son angoisse et son mystère, et on entend, de-ci de-là, tout au long de la soirée, des décalages auxquels nous n'étions pas habitués de sa part. 


Catherine Scholler
[ Sommaire de la Revue ] [ haut de page ]