C O N C E R T S 
 
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NEW-YORK
18/01/03
Don Giovanni

Opéra de Wolfgang Amadeus MOZART

Donna Anna: Barbara Frittoli
Donna Elvira: Carol Vaness
Zerlina: Nicole Heaston
Don Ottavio: Michael Schade
Don Giovanni: Dmitri Hvorostovsky
Leporello: Richard Bernstein
Masetto: Oren Gradus
Commendatore: Kurt Moll


(Barbara Frittoli) 

Choeurs et Orchestre du Metropolitan Opera
Direction : Sylvain Cambreling

Mise en scène : Franco Zeffirelli
Lumières : Wayne Chouinard
Costumes : Anna Anni & Sylvia Nolan
 

New York, Metropolitan Opera, 18 janvier 2003


C'est un certain ennui qu'il aura fallu surmonter pour suivre les aventures de l'infatigable séducteur samedi soir au Met. La mise en scène de Franco Zeffirelli n'est pas étrangère à cette pénible impression : est-ce l'effet de la énième reprise ? Toujours est-il que cette production semble bien vieillie, usée et fatiguée : toute notion de direction d'acteurs y semble désespérément absente, et les chanteurs, condamnés à errer sur l'immense scène new-yorkaise, rappellent les pires moments de l'époque pré-callasienne. Quant aux costumes et décors alla Cecil B. de Mille, s'ils forcent un moment l'admiration ("Man ! the Commander's statue, it's quite something, huh ?"), à la longue, ils se révèlent lassants , voire très gênants pour la compréhension de l'oeuvre.
Ainsi, ce n'est pas sans une certaine surprise, teintée de consternation, qu'on voit apparaître les paysans de la noce au moins aussi bien habillés que les nobles ! Or, comment comprendre certaines dialogues entre le Don et Zerlina ("Io so che raro colle donne voi altri cavalieri siete onesti e sinceri"  -"E un impostura della gente plebea ! La nobilità ha dipinta negli occhi l'onestà") si l'on débarrasse l'oeuvre de toute référence à la position sociale des protagonistes ? En d'autres termes, comment Don Giovanni peut-il de manière crédible faire rêver à la vie de château... une grande bourgeoise ? 

Dans la fosse, ce n'est guère mieux : l'orchestre du Metropolitan Opera semble se diriger tout seul malgré les gesticulations du maestro, et c'est bien là le problème : la lecture est routinière, énervée (au sens propre du terme), sans aucun relief ni surprise. Des huées bien audibles accueilleront d'ailleurs Sylvain Cambreling aux saluts. 

Vocalement, c'est un peu mieux, mais il est dommage que seuls les rôles secondaires soient vraiment irréprochables dans cette production. La prestation de Carol Vaness est en effet entachée d'un vibrato ostensible dans les aigus. Dmitri Hvorostovsky dans le rôle-titre est en effet un peu falot, confronté à de graves problèmes de projection pendant toute la soirée : depuis le deuxième balcon on a l'impression d'entendre sa prestation à travers des boules Quies ! A entendre Richard Bernstein, on se prend alors à penser que le valet aurait avantageusement pris la place de son maître : la voix est belle, la projection ample, sans aucune vulgarité. Le même commentaire s'applique au Masetto d'Oren Gradus, et, dans un registre différent, à Michael Schade, qui incarne un très fin et très musicien Don Ottavio. Mais la vraie star de la soirée c'est tout de même Barbara Frittoli qui, dans le rôle d'Anna, sauve par sa prestation ce Don du naufrage total. Interprète très sensible, son "Non mi dir bell'idol moi" est quasiment parfait : le timbre est de toute beauté, charnu à souhait, et les vocalises parfaitement en place. Pour finir, Nicole Heaston, qui débutait ici au Met, fait très bonne impression en Zerlina. Le vétéran Kurt Moll, quant à lui, joue toujours les Commandeur de luxe pour le plus grand plaisir du public new-yorkais.
 
 

Rémi Bourdot
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