C O N C E R T S
 
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CAEN
09/03/2006
 
© DR

Gaetano DONIZETTI (1797-1848)

L’Elixir d’amour


Melodramma giocoso en deux actes
Livret de Felice Romani
Créé le 12 mai 1832 au Teatro della Canobbiana de Milan

Mise en scène, chorégraphie – Omar Porras
Décors, création des masques - Fredy Porras
Costumes – Coralie Sanvoisin
Lumières – Matthias Roche

Adina – Maïra Kerey
Nemorino – Soner Bülent Bezdüz
Belcore – Nigel Smith
Le Docteur Dulcamara – Till Fechner
Gianetta – Laure Baert

Danseurs : Solaine Caillat, Veronica Endo Olascuaga,
Karine Girard, Linda Gonin, Isabelle Terracher,
Romano Bottinelli, Jérémie Duval, Serge Helias,
Esteban Peña Villagran, Michaël Vessereau

Chœurs de l'Opéra de Nancy et de Lorraine
Orchestre de Caen

Direction musicale: Nicolas Chalvin

Coproduction Théâtre de Caen,
Opéra de Rennes, Opéra National de Nancy et de Lorraine

Caen, 9 avril 2006

Elixir de bonheur

Succès complet pour cette reprise du magnifique spectacle créé à Nancy en février dernier.

La production des colombiens Omar et Fredy Porras est une petite merveille d’originalité et de goût : un peu déstabilisante au début par son originalité (un univers de faunes, de nymphe, … et de basse cours !), cette vision fonctionne en fait parfaitement : un régal pour les yeux et une fête ininterrompue, à tel point que l’on ne sait plus ni qui ni quoi regarder. Pas un instant sans que l’espace scénique ne soit exploité, et de maîtresse façon, pas de gags lourds et vulgaires mais un humour constamment en adéquation avec la musique, avec un sens du détail remarquable qui fait que ces personnages prennent véritablement vie devant nous.

Pour preuve de cette parfaite réussite, les nombreux enfants présents en cette matinée de dimanche restent totalement silencieux, fascinés par le spectacle.

Côté musical, nous sommes également comblés par un plateau jeune, mais très professionnel.

Les ténors turcs se suivent mais ne se ressemblent pas, même quand ils portent tous deux Bülent comme prénom. Le Nemorino du jeune Soner Bülent Bezdüz est en effet une merveille de musicalité, compensant un volume d’émission un peu réduit et un timbre un peu blanc, par une technique belcantiste remarquable, alliant variations dans les couleurs, maîtrise du souffle et, ce qui ne gâte rien, quelques suraigus additionnels. On notera en particulier une « Furtiva lagrima » magnifiquement conduite, ornée d’un ut dièse piano assez original.

Plutôt bien fait de sa personne, le chanteur campe un personnage attachant de gaucherie timide, et évolue sur la scène avec une aisance incroyable : ce n’est certainement pas Luciano qui aurait chanté son grand air au sommet d’un arbre ou qui aurait fait la roue aux saluts !

Maïra Kerey est certainement plus à l’aise que pour sa Musetta  à Paris il y a 3 ans, mais je ne partage pas tout à fait l’enthousiasme de ma consoeur. Les vocalises sont bien en place, les suraigus (jusqu’au mi bémol) impressionnant de puissance et la voix a gagné en grain, rappelant quelque peu celle de Cecilia Gasdia dans le médium, mais le chant est encore trop monochrome, la diction incertaine, et l’actrice reste peu concernée par son personnage.

C’est un peu le contraire pour la Gianetta de Laure Baert, pimpante, espiègle et drôle, chantant fort bien mais au volume vraiment trop juste à ce stade de sa jeune carrière.

Nigel Smith est un Belcore sans vulgarité, bon acteur, bien chantant, irrésistible dans son déguisement de coq imbu de lui-même (saluons son courage en ces temps de grippe aviaire).

Till Fechner, enfin,  est un Dulcamara  vivace et drôle, soutenant sans problème le rythme effréné de ses parties bouffes et campant de manière tout à fait crédible un personnage de vieil escroc.

Venus de Nancy, les chœurs sont impeccables et participent à l’ambiance générale de fête du plateau (nous aurons même droit à un contre-ut inédit à la fin d’un ensemble !).

A la tête de l’excellent orchestre de Caen, Nicolas Chalvin (ancien élève d’Armin Jordan) conduit ses troupes avec efficacité et talent, évitant les pièges de la vulgarité (combien de fois n’avons-nous pas entendu cette musique avec des sonorités d’orphéon de province !) tout en conservant toute la gaîté de cette partition.

La salle bondée, fait un triomphe à cette production magnifique et qu’on aimerait retrouver dans le cadre d’une salle Favart rendue à son répertoire
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Placido Carrerotti
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