C O N C E R T S 
 
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PARIS, SAINT DENIS
STADE DE FRANCE

22/06/02

Requiem
de Giuseppe VERDI

Adrianne Pieczonka: soprano
Tea Demurishvili: mezzo soprano
René Pape: basse
Tito Beltran: ténor

Orchestre et Choeur National de France

Direction Jean Claude Casadesus

Stade de France

St Denis, le 22 juin 2002


MON CURÉ CHEZ LES FOURMIS
 

Après l'Aida de septembre 2002, pouvait-on imaginer un spectacle encore plus incongru dans le cadre gigantesque du Stade de France ? C'est le pari tenté et tenu pour ce spectacle, intitulé un peu pompeusement "Opéra Céleste" et qui allie partition de Verdi et "laser-show-pour-boîte-de-nuit-branchée".

Au centre : orchestre, solistes et choeurs sont placés dans une gigantesque boule ajourée tournant imperceptiblement sur elle même (elle achève un cycle complet à la fin du Requiem : mon Dieu qu'c'est-y-beau !).

Pourquoi la boule tourne-t-elle ? Mystère, puisque de toute façon il est impossible de distinguer les interprètes (l'illustration ci-dessus est strictement conforme à ce que je voyais de ma place : imaginez ceux qui étaient plus loin !).

Tout autour de la pelouse, 48 écrans "géants" (tout est relatif, là encore, voyez l'illustration !) et "recto verso", projettent gros plans des solistes , citations de la partition ou illustrations visuelles.

Enfin, la pelouse elle-même, transformée en écran géant, accueille des projections psychédéliques qui suivent et illustrent la musique : effets visuels kaléidoscopiques, image géante du plafond de la Chapelle Sixtine, constellations en mouvements, nuages, etc.

L'effet est assez réussi et capte l'attention pendant les 20 premières minutes, mais, à la longue, ce clip géant finit par lasser.

D'un autre côté, ce n'est pas pire qu'assister au même Requiem, coincé derrière un pilier de Notre Dame ou noyé au fond de la Basilique St Denis !

Par rapport à Aida, la sonorisation est très largement améliorée : le son provient de la boule elle-même et non plus du toit (cet effet accentuait la distanciation avec le spectacle et les chanteurs qui s'agitaient au ras du sol).

Il est tout de même paradoxal de réunir dans un stade 50.000 personnes pour, au bout du compte, regarder la télévision, écouter la sono, contempler des images sur une pelouse, tout ça à des tarifs supérieurs à ceux d'une représentation à l'Opéra Bastille !

A quand le Concerto pour piano de Tchaikovski, avec accompagnement de feux d'artifice, ou Le Voyage d'Hiver avec canons à neige et lâcher de ballons ?!

Ce qui est dommage, c'est qu'un tel spectacle s'apprécierait bien davantage dans un lieu à taille plus humaine, tel que Bercy (voire le Parc des Princes, c'est dire !). Ici, nous sommes totalement perdus.
Il est vrai que Bercy n'accueille "que" 10.000 spectateurs (et le Parc 40.000), ce qui n'assure pas la même rentabilité !

Dans ce spectacle hybride, la qualité musicale passe au second plan pour le spectateur, et c'est dommage car la distribution, sans être exceptionnelle, se tient globalement.

Avec une technique moyennement assurée, Adrianne Pieczonka alterne quelques beaux moments avec des passages où elle semble déchiffrer le bottin.

Tea Demurishvili est le maillon faible : graves difficiles, voix parfois dans les joues.

René Pape est ici un LUXE : beauté du chant, technique parfaite, rigueur de l'interprétation ... tout juste pourrait-on lui reprocher un léger manque d'investissement dramatique ; difficile, il est vrai, de ressentir une ferveur religieuse dans un tel environnement.

Tito Beltran, bon petit ténor lyrique, déçoit un peu : le timbre reste beau, mais il peine parfois dans l'aigu ; c'est pourtant un habitué du Duc de Mantoue ou d'Edgardo .

A la tête d'un orchestre et de choeurs irréprochables, Jean Claude Casadesus assure une direction honnête et efficace, sans grande personnalité toutefois.

L'écoute du public est étonnamment attentive et l'accueil, sans être délirant, est chaleureux.
Puisse cette soirée en inciter un grand nombre à découvrir l'opéra pour de vrai !
  


Placido Carrerotti
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