C O N C E R T S 
 
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PESARO
19/08/03
Le Comte Ory

Opéra de Giaocchino ROSSINI

Juan Diego Florez : Ory 
Alastair Miles : le Gouverneur
Marie-Ange Todorovitch : Isolier
Bruno Pratico : Raimbaud
Stefania Bonfadelli : la Comtesse
Marina de Liso : Ragonde
Rossella Bevacqua : Alice

Jesus Lopez Cobos : direction musicale
Lluis Pasqual : mise en scène

19 août 2003
Pesaro Teatro Rossini


Le Comte Ory n'est pas une nouveauté pour les plus fidèles festivaliers de Pesaro, puisque cette oeuvre avait déjà été donnée par le Rossini Opera Festival en 1984 avec Blake et Gasdia, dans une production de Pizzi, reprise en 1986 avec Matteuzzi et Devia.

On ne peut s'empêcher de penser que cette nouvelle réalisation a d'abord été montée pour Juan Diego Florez, vedette incontestée de l'édition 2003 du festival. Le ROF semble en effet très attaché au ténor péruvien et le revendique parfois même avec paternalisme en le désignant par "nostro Florez" depuis ses débuts en 1996 au Palafestival, en remplacement de Bruce Ford dans Matilde di Shabran. Le chant et le jeu de Florez sont vaillants et sa voix souple, belle et puissante (surtout dans le théâtre Rossini, aux dimensions plutôt modestes). Le timbre est toujours aussi clair et agréable, et sa diction française tout à fait correcte.

Le rôle du Gouverneur est tenu par la grande (au moins par la taille) basse anglaise Alastair Miles,  beaucoup plus à l'aise dans les graves profonds que dans ses incursions vers l'aigu. Sa voix fait toujours preuve d'une bonne agilité, et en dandinant légèrement son corps un peu raide dans les vocalises, il amène le sourire sur certains visages dans la salle.

La mezzo française Marie-Ange Todorovitch est très expressive, comme à son habitude : bonne diction, vivacité d'exécution, mais des duretés très nettes dans l'aigu, où la voix semble vraiment dérailler.

Connaissant ses mimiques vocales, on pouvait appréhender la diction de Bruno Pratico, grand habitué et même certains soirs coqueluche du festival, mais ce fut plutôt une bonne surprise. Sa prestation reste toutefois assez discrète et oblige par moments à tendre l'oreille.

Reste le cas de la très jolie, et de voix et de physique, soprano Stefania Bonfadelli, qui ne possède pas la plasticité et la virtuosité exigées par le rôle de la Comtesse, distribué habituellement à des coloratures (Devia, Massis, Mei, Gasdia, il y a quelques années,...). Bonfadelli en semble consciente (ce qui est déjà un bon début pour progresser) et remplace certains passages d'agilité prévus par la partition par de jolis aigus, plus espacés, de sa composition, ce qui fait à peu près passer la pilule, la musicalité étant toujours au rendez-vous.

A la tête de l'orchestre du Comunale de Bologna, Jesus Lopez Cobos soigne sa direction, lui confère du relief, mais sans excentricité.


La principale faiblesse de cette production reste à mon sens la mise en scène, en décalage complet avec l'essence de l'ouvrage. Alors que le Comte Ory est traditionnellement une farce, riche en grivoiseries, chansons à boire et multiples déguisements, or, le traitement qu'en propose Lluis Pasqual n'amène que tristesse et désolation. Un intérieur bourgeois 19ème, façon Traviata, un sol noir et brillant, une dizaine de gros lustres suspendus avec des ampoules de 20 W : autant d'éléments inquiétants qui semblent peser sur le spectacle et tempèrent fortement l'enthousiasme des spectateurs. Le premier acte démarrant avec un billard et une table de jeu sur scène, on songe à un nouveau traitement du type "théâtre dans le théâtre" et il est dommage qu'il sombre dans le glauque. Pourquoi, dans ce cas, ne pas aller jusqu'au bout de la démarche en imaginant, par exemple, un rapprochement Comte Ory - Comte Dracula ?! Hormis le fait que l'on s'habitue à tout, la déception est moins importante au 2ème acte, avec les choeurs des fausses religieuses, ainsi que le magnifique trio final, scènes qu'il est difficile de rater totalement.
 
 
 

François Jestin
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