C O N C E R T S
 
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PARIS
17/10/2006
 
© MN Robert (2004)
Jean-Philippe RAMEAU (1683-1764)

LES PALADINS

Comédie-ballet en trois actes (1760)
Livret de Duplat de Monticourt

Scénographie, Conception vidéo : José Montalvo
Mise en scène, Chorégraphie : José Montalvo & Dominique Hervieu
Costumes : Dominique Hervieu
Lumières : Philippe Berthomé
Maquillages : Suzanne Pisteur

Atis : Topi Lehtipuu
Argie : Stéphanie d'Oustrac
Nérine : Sandrine Piau
La Fée Manto : François Piolino
Orcan : João Fernandes
Anselme : René Schirrer
Un Paladin : Leif Aruhn-Solén

Centre Chorégraphique National de Créteil et du Val-de-Marne
Compagnie Montalvo-Hervieu

Orchestre et Chœurs Les Arts Florissants
Direction : William Christie

Paris, Théâtre du Châtelet, le 17 octobre 2006

La Téci au Châtelet !

Cette production des Paladins est la reprise presque identique (à un changement dans la distribution près) de la production de 2004 chroniquée sur ce même site. L’adage « à spectacle identique, critique identique » devrait donc pouvoir s’appliquer… et pourtant ce n’est pas entièrement vrai, deux ans ont passé entre temps !

La production avait créé son petit effet à sa création avec à la clef une (mini) controverse. Le traitement de choc appliqué par le duo Hervieu/ Montalvo, à base de projections vidéos, de danses modernes allant du break-dance à la capoeira, et de jeu de dédoublement (1) était-il adapté au très baroque Rameau ? La réponse semble aujourd’hui appeler un oui massif, les quelques huées de l’époque ayant laissé place à une vraie ovation… L’effet de surprise est donc passé en deux ans !

Il n’empêche qu’au-delà de la véritable réussite visuelle du spectacle, persistent quelques bémols :la trame narrative (déjà assez ténue il vrai dans le livret) est très difficile à suivre pour qui n’a pas lu le synopsis préalablement… Les danses sont plus représentatives des états d’âmes des personnages que d’une pseudo action et les vidéo plus ouvertement comiques qu’en rapport avec l’action : seules les scènes du palais magique chinois sont clairement illustrées fidèlement par la vidéo. Il n’empêche que l’on ne peut, au final, qu’être grisé par l’énergie électrisante des danseurs mais aussi des chanteurs qui se mêlent sans hésiter aux chorégraphies.


© MN Robert (2004)

Concernant la distribution, le seul changement est le remplacement de Laurent Naouri par João Fernandes. C’est l’heureuse surprise du spectacle, ce chanteur alliant une prononciation excellente et une voix homogène et bien timbrée à un vrai sens comique.

Contrairement à l’impression de Placido Carrerotti à l’époque, le grande triomphatrice de la soirée est sans conteste Stéphanie d’Oustrac. Le problème de diction soulevé à l’époque ne m’a pas semblé problématique. En revanche que de plaisirs : le timbre charnu de la mezzo demeure mais on découvre une facilité et une légèreté dans l’aigu qu’on ne lui connaissait pas jusqu’à aujourd’hui (2) … Cette Argie flamboyante n’a aucun mal à éclipser la pâle Nérine Sandrine Piau décidément bien décevant sur scène : la voix sonne étriquée et sans aucune projection… Quelle déception pour cette artiste pourtant si attachante au disque !

Chez les hommes, René Schirrer demeure aussi décevant qu’il y a deux ans : la voix est usée aux deux bouts, l’absence de grave et d’aigus étant remplacés par des aboiements du plus mauvais goût. Topi Lehtipuu ne semble pas au soir de cette représentation très à l’aise avec la tessiture très aiguë du rôle. Si la diction reste correcte et la présence scénique réjouissante, la voix manque de brillant et semble fatiguée au terme du spectacle. Cette fatigue est également très marquée chez la fée Manto de François Piolino qui semble, après une entrée très séduisante, être constamment au bord de l’accident dans l’aigu, ce qui semble inquiétant pour un rôle aussi court…

Enfin un mot des Arts Florissant et de William Christie. L’orchestre m’a semblé plutôt brillant et la direction animée. Dommage que des cuivres catastrophiques viennent massacrer notamment le final (3)

Au final cette production a bien évolué depuis sa création. Si en deux ans l’effet de surprise a disparu, il reste une production très réussie dans laquelle chanteurs et danseurs par leur énergie communicative prouvent qu’une réinterprétation moderne et audacieuse, ne trahit pas en rien l’esprit de Rameau.



Antoine BRUNETTO


Notes

(1) Il y a deux séries de dédoublements : dédoublement chanteurs-danseurs (chaque chanteur a son double dansant) et chanteurs-vidéo (les danseurs et les chanteurs jouent avec leur image vidéo).

(2) On se souvient notamment de Nuits d’été de Berlioz chantées dans le foyer du Châtelet avec Topi Lehtipuu et Ludovic Tézier et d’une « Absence » pas totalement irréprochable dans les parties aiguës…

(3) On se demande d’ailleurs si les Arts Florissants ne partagent pas leurs cornistes avec les Talens Lyriques au vu des résultats aussi désagréables à quelques jours d’intervalles dans les Paladins et Giulio Cesare. Au moins s’ils jouaient faux avec panache, comme le remarquait un ami… Mais ce n’est même pas le cas ! Nous ne saurions que trop leur conseiller de recruter des musiciens compétents ou à défaut d’acquérir des instruments modernes…

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