C O N C E R T S 
 
...
[ Sommaire de la rubrique ] [ Index par genre ]
 
......
FRIBOURG
03/01/04

(© Opéra de Fribourg)
Arthur HONEGGER (1892-1955)

LES AVENTURES DU ROI PAUSOLE

Opérette en trois actes
Livret d'Albert Willemetz d'après le roman de Pierre Louÿs

Nouvelle production de l'Opéra de Fribourg
Coproduction avec l'Opéra Théâtre de Besançon

Pierre Villa-Loumagne (Le Roi Pausole), 
Anouschka Lara (La Blanche Aline), 
Vincent Vitoz (Taxis), 
Sébastien Droy (Giglio), 
Claudia Mauro (Mirabelle), 
Myriam Boucris (Diane à la Houppe), 
Jeanne Marie Lévy (Dame Perchuque),
Guillaume Crausaz (Le Métayer), 
Lauranne Jaquier (Thierrette), 
Mathias Reusser (Le Brigadier), 
Marie-France Baechler, Joelle Delley,
Monika Käch, Anne-Laure Kénol,
Véronique Rossier, Catherine Torriani (Les six Reines)

Vincent Vitoz (mise en scène) 
Philippe Léonard (décors)
Jean-François Castaing (costumes) 
Alain Hocine (chorégraphie) 
Thierry Fratissier (lumières) 

Orchestre de Chambre de Genève
Laurent Gendre, direction
Choeur de l'Opéra de Fribourg
Marc Bochud, chef de choeur

Fribourg
31 décembre, 3*, 9, 11,
15, 17 et 18 janvier 2004



Fribourg en Champagne !

Depuis bientôt vingt ans, à chaque Saint-Sylvestre, une équipe de mordus d'opéra monte une oeuvre lyrique dans un théâtre improvisé. Par rapport aux premiers spectacles, pourvus d'un budget de quelques dizaines de milliers d'euros, le dernier en date frise le grand luxe avec six cent mille euros ! Ville sans théâtre oblige, c'est dans l'aula de l'Université que l'Opéra de Fribourg prend ses quartiers lyriques. Un hémicycle garni de gradins aux sièges peu confortables surplombe une scène sans profondeur. Au plafond, une rampe de lumières éclaire le plateau. Entre la scène et les gradins, quelques mètres d'un demi-cercle servent de fosse à l'orchestre. Malgré ces conditions spartiates, chaque nouveau spectacle s'avère surprenant de qualité et de vivacité et enthousiasmant de générosité. Cultivant l'originalité de sa programmation - les dernières saisons ont vu des raretés comme Le Triptyque de Puccini, le Songe d'une Nuit d'été de Britten ou L'Étoile de Chabrier, 2005 verra une nouvelle production de La Pietra del Paragone de Rossini - l'Opéra de Fribourg, en coproduction avec l'Opéra Théâtre de Besançon, a choisi de mettre Arthur Honegger à l'affiche. Et le moins qu'on puisse dire c'est que la réputation de la fondue fribourgeoise au vacherin pâlit devant cette pétillante lecture du Roi Pausole : c'est Fribourg en Champagne !

C'est endetté et en proie à de graves difficultés que l'Arthur Honegger du Roi David, de la Symphonie des Psaumes, de Pacific 231, de Jeanne au bûcher, accepte de mettre en musique cette opérette. Mais l'admirable livret en vers d'Albert Willemetz l'a magnifiquement inspiré. Le compositeur suisse signe l'une de ses oeuvres les plus abordables en même temps que parmi les plus charmantes. Pour preuve, il suffit d'entendre l'Orchestre de Chambre de Genève sous la direction de son délicat mentor, Laurent Gendre. Sous sa baguette, l'orchestre scintille comme la comédie grivoise qui se déroule sur scène. Dirigeant avec souplesse, exacerbant l'humour de la partition, le jeune chef d'orchestre soutient les protagonistes dans le dédale de cette pièce croustillante. Galvanisant instrumentistes et chanteurs à la faveur d'une écoute réciproque et complice, il réussit aussi à créer l'homogénéité au sein d'une distribution de solistes aux talents variés. 


(© Opéra de Fribourg)

Sur scène, le théâtre boulevardier déborde de toutes parts. Artisan de ce véritable feu d'artifice, le metteur en scène Vincent Vitoz ficelle l'ouvrage de clins d'oeil et de références contemporaines. Ainsi son Roi Pausole est un parfait Monsieur Hulot. Vêtu de rouge, le pantalon trop court, le chapeau mou bordé d'une couronne, son Pausole se révèle touchant de bonté. Le conseiller Taxis est un Mazarin de comédie, Giglio un nouveau Marlon Brando et les femmes de chambre d'excitées soubrettes toutes droites sorties de Benny Hill. Mais Vitoz, lui, sait faire jaillir le rire et flirter avec l'indécence sans jamais tomber dans la vulgarité. Il "burlesque" sans grotesque, rythme l'action en réfrénant le geste pour que jamais le comique visuel ne supplante la finesse d'un texte immensément cocasse.

Tout le plateau gravite autour de Pierre Villa-Loumagne (Le Roi Pausole), extraordinaire de présence. Jouant de sa voix en excellent musicien et en parfait comédien, il imprègne son personnage d'une naïveté irrésistible. A ses côtés, Vincent Vitoz change de casquette pour incarner Taxis. Superbement détestable, il porte ce personnage éminemment antipathique vers des sommets de bouffonnerie. Par contre, en séducteur, Sébastien Droy (Giglio) convaincrait davantage si sa jolie voix avait une autre puissance. Chez ces dames, le niveau est globalement assez bon. Toutefois, si l'opérette n'est évidemment pas là pour révéler les Callas de demain, il est dommage que le bel instrument de Myriam Boucris (Diane à la Houppe) souffre d'une prononciation française approximative, qui dessert la gouaille du personnage. A noter, l'aisance sur scène et la fort jolie voix de Lauranne Jaquier (Thierette), une artiste à suivre. 

On pourra regretter que les "petits" rôles n'aient pas été confiés à des artistes plus expérimentés, qui auraient assuré la totale réussite de cette soirée. L'impréparation tant vocale que dramatique de certains interprètes entraîne un important déséquilibre. De même, l'exiguïté du plateau n'autorise guère les grandes envolées des danseurs de l'Atelier Ruda Béjart Lausanne. Moins dévoreuses d'espace, mais sans doute aussi mieux synchronisées, celles-ci auraient gagné en efficacité.
 
 

Jacques SCHMITT


Prochaines reprises :

Genève
Bâtiment des Forces Motrices
Le 24 janvier 2004 à 20h.

Düdingen
Podium
Les 28 et 29 janvier 2004 à 19h30

Lausanne
Théâtre de Beaulieu
Le 3 février 2004 à 20h. 

Besançon
Opéra Théâtre
Le 8 février 2004 à 20h
 
 

[ Sommaire de la Revue ] [ haut de page ]