C O N C E R T S
 
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MONTPELLIER
27/07/04

(Marco Guidarini © DR)
FESTIVAL DE RADIO FRANCE ET MONTPELLIER

Nino Rota (1911-1979) :
Concerto soirée pour piano et orchestre

Piano : Enrica Ciccarelli
 

Gaetano Donizetti (1797-1848)

Rita ou le mari battu

Opéra-comique en un acte (1841)
Livret de Gustave Vaëz
Version originale en français

Valeria Esposito : Rita
Fabrice Mantegna : Peppe
Evguenyi Alexiev : Gasparo

Dialogues de la version originale adaptés et lus par Guy Carlier

Orchestre Philharmonique de Nice
Direction : Marco Guidarini

Concert donné le mardi 27 juillet 2004
Opéra Berlioz-Le Corum

Universellement connu grâce à ses musiques de films -ceux de Fellini notamment - Nino Rota n'en est pas moins l'auteur d'une oeuvre abondante et variée. Cet ancien lauréat de L'Académie Sainte Cécile de Rome a en effet composé nombre d'ouvrages lyriques parmi lesquels Il Cappello di paglia di Firenze, des ballets, de la musique de chambre, trois symphonies et plusieurs concertos dont celui qui nous était proposé ce soir-là. Créé en 1962, sous la direction de Bruno Maderna, le concerto soirée, rend hommage aux musiques de salon de la fin du XIXème siècle. Résolument tournée vers le passé, la partition, répartie en quatre mouvements, alterne l'humour, la nostalgie et la fantaisie la plus débridée (on n'est pas loin de l'univers d'un Satie), et comporte également quelques réminiscences de musiques de film, Huit et demi notamment.

Enrica Ciccarelli en donne une lecture vive et convaincante. On apprécie la fluidité de son toucher dans le second mouvement andante malinconico et sa virtuosité sans faille dans le quatrième et dernier, can-can, qui lui vaut un triomphe personnel amplement mérité. Elle offrira en bis un prélude pour la main gauche de Scriabine d'excellente facture.

Cependant, le "plat de résistance" de la soirée était constitué par Rita, ou le mari battu de Donizetti. Composée à Paris vers 1841 sur un livret français, cette farce en un acte fut créée à l'Opéra-Comique en 1860, douze ans après la mort du compositeur. Elle conte les aventures d'une aubergiste qui tyrannise son second mari. Le retour au village du premier, qu'elle croyait mort, provoque une série de situations cocasses, à la limite du scabreux, dans l'esprit de la commedia dell'arte. Le titre original, Deux hommes et une femme, était plus explicite.

L'oeuvre, sans prétention, est agréablement troussée et comporte quelques jolis airs, notamment celui du ténor "Je suis joyeux comme un pinson" que Juan Diego Florez a gravé en italien dans un récent récital consacré à Donizetti et Bellini. C'est, du reste, dans sa version italienne que la partition a connu quelques reprises dans le courant du XXème siècle. Au cours de la saison passée, on a pu également l'entendre à Paris en français, le temps d'un concert à l'Opéra-Comique le 15 mars dernier. 

On attendait dans le rôle titre Sumi Jo, mais souffrante, elle fut remplacée par Valeria Esposito qui s'est tirée honorablement de son rôle. Le timbre n'est pas exceptionnel, mais la voix est plutôt bien projetée et le personnage crédible. Cependant, les ornementations, exécutées avec précision, demeurent bien sages. Nul doute qu'avec Sumi Jo on aurait eu droit à un festival de contre notes. Il en est de même pour Fabrice Mantegna qui occulte l'aigu final de son air. Si le ténor sait se montrer tout à fait convaincant en mari battu, la ligne de chant demeure fruste et privée de legato. Finalement, la distribution est dominée par le Gasparo tout en malice d'Evguenyi Alexiev qui remporte un triomphe bien mérité. Triomphe partagé avec Marco Guidarini qui, à la tête de son Orchestre Philharmonique de Nice, s'est montré tout aussi à son affaire dans Rota que dans Donizetti. Sa direction énergique et d'une grande précision laisse augurer d'une belle carrière. A suivre.

On ne peut que regretter l'absence des dialogues parlés, remplacés par des textes écrits et dits par Guy Carlier. Ce sympathique animateur de radio ne manque pas de talent ni d'humour et ses interventions font mouche. Toutefois, les allusions nombreuses au monde de la politique et de la télévision dénaturent quelque peu l'oeuvre et la tirent vers l'opérette de boulevard. C'est efficace, le public s'amuse beaucoup, mais est-ce vraiment dans l'esprit de Donizetti ?

Une soirée sans prétention et somme toute agréable, cependant la création in loco de Rita méritait sans doute mieux.

 

Christian PETER
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