C O N C E R T S 
 
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NEW YORK
(Metropolitan Opera)
SLY
ovvéro la leggende del Dormiente Risvegliato

opéra d'E. Wolf-Ferrari
Placido Domingo : Christopher Sly
Maria Guleghina : Dolly
Juan Pons : Le Comte de Westmoreland
Jeffrey Wells : Snare
Tony Stevenson : un page
LeRoy Lehr : le maître de cérémonies
John Fanning : John Plake
Reveka Mavrovitis : Rosalina
Richard Vernon : le sommelier
Roger Andrews : le cocher
Ian Greenlaw : un soldat
Bernard Fitch : un magistrat
Jane Bunnell : l'aubergiste
Glen Bater : le cuisinier
Joel Sorensen : un apprenti
Mark Schowalter : le chauffeur

Orchestre et choeurs du Metropolitan de NY
Direction : Marco Armiliato

New York, 5/04/2002.

Production: Marta Domingo
Set and Costume Designer: Michael Scott
Lighting Designer: Duane Schuler



SLY, MON MARI !

Ermanno. Wolf-Ferrari est aujourd'hui un compositeur bien oublié, dont quelques amateurs ne connaissent que deux comédies "Il Segreto di Susanna" et "I Quattro Rusthegi î. Le besoin pour certains ténors finissants de trouver des oeuvres à la mesure de l'usure de leurs moyens, nous vaut la résurrection de "Sly î, ouvrage monté il y a qualques années pour José Carreras, et tout récemment pour Placido Domingo dont c'est le 119 ème rôle. Allemand par son père et italien par sa mère, Wolf-Ferrari est un homme entre deux cultures : wagnérien de coeur, ayant étudié la composition à Munich, son "Sly î, qui vient après ses premiers ouvrages légers, subit l'influence du vérisme triomphant. L'ouvrage n'étant guère connu, je ne crois pas inutile d'en résumer le livret :

Acte I :

Scène de genre dans une auberge londonienne où quelques buveurs invétérés essaient de boire sans payer leurs tournées (on se croirait au début des Contes d'Hoffmann). Arrive Dolly, maîtresse du Comte de Westmoreland, qui vient se reposer des fatigues de la cours: on remarque sa beauté et sa dignité, peu courante en ces lieux. Le Comte arrive pour la ramener au palais, mais il accepte de rester un peu. Le poète et ivrogne Christopher Sly entre et y va de l'inévitable chanson à boire : il vient d'échapper au flic Snare qui le cherche pour le mettre en prison pour dettes (on entend le chant de Snare qui menace de le capturer). Sly finit par tomber ivre mort et le Comte décide de lui jouer un bon tour: il le fait emmener dans son palais: quand il se réveillera, on lui fera croire que c'est lui le propriétaire des lieux.

Acte II.
Au palais, Westmoreland et ses serviteurs attendent le réveil de Sly. Celui-ci pense d'abord rêver, puis se laisse convaincre par Westmoreland, déguisé en serviteur, qu'il est tombé dans une sorte de coma pendant 10 ans. On lui présente Dolly comme son épouse fidèle et dévouée: il en tombe immédiatement amoureux, of course. Westmoreland met fin au court duo d'amour en reprenant l'air du policer Snare: réveil brutal de Sly, grosse rigolade du Comte. Quand le comte a fini de s'amuser et comme l'autre gueule toujours, il le fait jeter au fond du cellier (faut pas jouer avec l'homme).

Acte III.
Sly est convaincu de l'amour de Dolly, mais la sait au main du Comte: il se suicide avec un tesson de bouteille (un vieux bordeaux, quel gâchis) après que l'ANGE DE LA MORT (Brrrrrrrr) soit venu danser autour de lui (scène burlesque). Arrivée de Dolly: "je t'aime", "pardonne-moi", "ah ! je meure (piano)", "maledizionne (si naturel urlando furioso)".
La routine quoi.. .

Sly" restera difficilement comme un chef d'oeuvre outrageusement négligé : c'est néanmoins un ouvrage solide, attachant, qu'on peut bien entendre une fois ou deux dans sa vie de mélomane. Il faut dire qu'on ne sait pas trop ce qu'on regarde. Le livret est typiquement vériste, mais la musique reste assez classique, plus proche d'ailleurs de la déclamation de Moussorgsky que de Wagner. Les premier et deuxième actes sont dans la veine tragi-comique ; le troisième est franchement noir : le soliloque de Sly contraste avec l'agitation du début (je vous renvoie à la distribution ci-dessus pour les seconds rôles intervenant au premier acte !). Sans doute des écoutes successives permettraient-elles de corriger ce jugement.

Martha Domingo, ancienne soprano-ayant-fait-un-peu-d'études-de-théâtre, s'est mise à la mise en scène il y a une dizaine d'années : elle reconnaît humblement qu'elle le doit au nom illustre de son mari. Sans être révolutionnaire (du moins vue par des européens), et malgré quelques emprunts, cette production n'est pas indigne et tranche avec les productions réalistes récentes du Metropolitan : elle réussit à donner une certaine homogénéité à l'ensemble, dans une approche privilégiant le côté poétique. Pour l'occasion, Placido est en grande forme : le rôle n'est pas très long, la tessiture lui convient (encore que je suis prêt à parier qu'il y a eu quelques aménagements). Pour l'interprétation, on se contentera d'une resucée d'Hoffmann. Maria Guleghina n'est pas trop à l'aise : pour elle, le rôle est au contraire un peu trop grave (par voie de conséquence, elle a du mal à sortir son aigu final). Juan Pons est au contraire très à l'aise, campant un personnage ionique et irresponsable. Marco Armiliato se voit confiée la direction de cet ouvrage assez difficile à mettre en place et s'en tire remarquablement bien.
 
 

Placido Carrerotti
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