C O N C E R T S
 
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PARIS
13/05/2007
 
Jun Märkl
 © DR

Richard WAGNER (1813-1883)

LA VOIX DE WAGNER


Tristan und Isolde, Prélude et Mort d'Isolde
Wesendonck Lieder
Der Ring des Niebelungen, Extraits symphoniques

Deborah Polaski, soprano
Orchestre National de Lyon
Jun Märkl


Paris, Salle Pleyel, le 13 mai 2007

Lire aussi la critique de Benoit Berger :
Auditorium de Lyon, le 10 mai 2007



De passage à Paris, l’Orchestre National de Lyon, s’est vaillamment illustré dimanche 13 mai, dans un programme entièrement consacré à Wagner. Chef attitré de la phalange lyonnaise depuis 2005, le munichois Jun Märkl disposait également d’une invitée de marque en la personne de Deborah Polaski, soprano dont la voix d’airain est depuis longtemps associée à celui du compositeur : elle détient, en effet, le record de Brünnhilde interprétées à Bayreuth. Sans qu’aucune césure ne vienne briser l’arc tendu dans la première partie de ce concert, le public s’est d’abord laissé emporter par la beauté sombre et les entrelacs mélodiques exposés dans le prélude de Tristan et Isolde. Inutile de chercher ici les splendeurs sonores d’un Berliner Philharmoniker, hypnotiques et majestueuses, ou encore la présence d’un maestro de la trempe d’un Simon Rattle, ou d’un Esa-Pekka Salonen, pour ne citer qu’eux. La tenue générale et la sincérité déployées dans ces pages sont manifestes, mais l’ensemble manque de liant, de chaleur et pâtît de décalages fréquents entre cuivres et cordes.

Basse d’intonation et fâchée avec le diapason (Der Engel), la voix de Deborah Polaski s’est rapidement chauffée pour affronter dignement le célèbre cycle de mélodies, composé pour Mathilde Wesendonk entre 1857 et 1858, par son chevalier servant. Abordant ces lieder avec douceur et nostalgie, la cantatrice a privilégié la pudeur à l’ampleur, la retenue à l’effet et enchaîné ainsi de la manière la plus naturelle sur une mort d’Isolde extasiée, au lyrisme ardent et diffus. On aurait aimé l’entendre encore, pourquoi pas dans l’immolation de Brünnhilde, mais la soprano, que l’on retrouvera à la rentrée prochaine dans Ariane et Barbe-Bleue de Paul Dukas à la Bastille, s’est retirée pour laisser la place à l’orchestre.

Dirigés avec une belle énergie, mais aussi une certaine sécheresse et une absence de vibrato, les extraits symphoniques du Ring ont, en partie, répondu à nos attentes. Sens de la narration (de l’origine à l’anéantissement), gestion des forces (le bien et le mal), déchaînement visuel (le Rhin s’entend autant qu’il se voit, comme les flammes qui lèchent le rocher de Brünnhilde, ou la mort qui vient faucher Siegfried), montrent avec quel soin le chef s’est acquitté de sa lourde tâche. Jun Märkl, cela se sent, a de l’ambition pour « son » orchestre : si celle-ci semble à ce jour surdimensionnée, ou encore prématurée par rapport au résultat obtenu, il est probable que l’effet produit sur ces pupitres soit dans un avenir très proche, détonnant. A suivre donc.


François Lesueur
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