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Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)

La clemenza di Tito


Opéra en 3 actes

Tito, Jonas Kaufmann
Sesto, Vesselina Kasarova
Vittelia, Eva Mei
Servilia, Malin Hartelius
Annio, Liliana Nikiteanu
Publio, Günther Groissböck

Mise en scène Jonathan Miller

Chœur et orchestre de l’Opéra de Zürich
Direction Franz Welser-Möst
Opéra de Zürich juin 2005

 DVD EMI




Un Mozart sanguin

Avec sa troupe extrêmement performante, sa politique d’alternance et ses stars en quasi résidence (José Cura, Cecilia Bartoli ou Vesselina Kasarova y ont élu domicile), la scène lyrique de Zürich est un modèle du genre. Son directeur, le puissant Alexander Pereira, a transformé en quelques années cette honorable maison d’opéra en un lieu incontournable où l’événement et la qualité artistique ne font qu’un. Pour s’en convaincre, voici une production de La clemenza di Tito de Mozart captée en juin 2005.

A la Rome antique, le metteur en scène Jonathan Miller préfère l’Italie des années trente, les personnages évoluant dans un décor unique (une impressionnante tour posée sur une tournette) en costumes fièrement coupés et en élégantes robes du soir. Si l’ensemble résolument sombre peut paraître austère, le jeu tenu et serré des protagonistes illustre avec acuité le propos. L’époque qui suggère la montée du fascisme est suffisamment trouble pour servir de cadre au complot ourdi contre Tito, dont le pardon final n’en sera que plus inattendu aux yeux de son peuple.

Generalmusikdirektor, Franz Welser-Möst impose un Mozart sanguin, à l’écriture fougueuse et aux accents parfois rageurs, qui met en valeur le retour du compositeur vers le passé (l’opéra seria), avec un plaisir que l’on devine réel et facétieux, comme un signe de perpétuel recommencement. Les dialogues parlés, établis pour l’occasion par Iso Camartin, préférés aux récitatifs accompagnés, qui ne seraient pas de la main de Mozart, surprennent tout d’abord, avant de parfaitement s’intégrer au rythme et aux tonalités du spectacle. Dans le rôle de l’empereur magnanime, Jonas Kaufmann fait grande impression. Sa prestation qui allie l’autorité à la fragilité, passe de l’assurance au doute, traduit toutes les ambiguïtés du personnage dont la grandeur d’âme contraste avec les pratiques de son temps. De plus, le timbre fauve, la séduisante vocalité et la présence racée déployés par le ténor, sont autant d’éléments qui le hissent d’emblée parmi les plus grands titulaires. Le Sesto de Vesselina Kasarova est l’un des plus inspirés et des mieux chantants du moment, la cantatrice ciselant avec son ardeur habituelle cette musique dont elle connaît chaque détail et jouant avec une éclairante sobriété les affres endurées par cet homme. Habituée à des rôles plus légers, Eva Mei constitue une très heureuse surprise en Vittelia. Sa voix longue et pleine jusque dans les phases les plus tendues de la partition (terzetto « Vengo, aspettate, Sesto » au 1er acte, rondo « Non più dei fiori »), en accord avec son jeu aristocratique, confèrent à ce personnage l’envergure attendue. Malin Hartlius campe une délicieuse Servilia, Günther Groissböck un honnête Publio, tandis que l’italien rudimentaire de Liliana Nikiteanu (Annio) s’avère handicapant dans les récitatifs.



François LESUEUR

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