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Antonín DVOŘÁK (1841-1904)

Rusalka
(Roussalka)


Opéra en 3 actes
Livret de Jaroslav Kvapil
d’après Friederich Heinrich de la Motte Fouqué
(et quelques éléments de La Petite Sirène d'Andersen
et La Cloche engloutie de Gerhardt Hauptmann)

Roussalka : Cheryl Barker
Le Prince : Rosario La Spina
Ježibaba : Anne-Marie Owens
Le Chasseur : Barry Ryan
Le Garçon de cuisine : Sian Pendry
La Princesse étrangère : Elizabteh Whitehouse
Les Nymphes des bois : Sarah Crane, Taryn Fiebig, Dominica Matthews

Opera Australia Chorus
Australia Opera and Ballet Orchestra
Richard Hickox (direction)

Chandos (Chan 10449 (3))
152’ 37’- textes de présentation en anglais, allemand et français,
textes chantés en tchèque et en anglais.




Le monde merveilleux de Roussalka


A peu de choses près, Roussalka fut composée à la même époque que la Jenůfa de Janáček. Pourtant, les deux œuvres sont écrites dans des esthétiques complètement différentes. Quand l’œuvre de Janáček a les deux pieds dans le social-réalisme inspiré du mouvement vériste, Dvořák enracine son opéra dans le romantisme du XIXe siècle. Car Roussalka est un conte qui appartient au monde du merveilleux avec ses nymphes, sa sorcière et son prince. La musique de Dvořák est une totale réussite et on ne peut que déplorer que les autres opéras du compositeur ne soient pas de la même trempe.

Autre réussite : le plateau vocal de cette production venue d’un pays situé bien loin des racines foncièrement tchèques de l’œuvre, l’Australie. Cheryl Barker, en grande forme vocale, défend particulièrement bien le rôle principal. Dommage que le Prince, chanté par Rosario La Spina, peine un peu dans les graves et en fasse globalement un peu trop. Peut-être s’est-il cru dans un opéra italien uniquement destiné à la gloire de sa voix…

Si la prononciation pas toujours idéalement intelligible de la basse Bruce Martin constitue le seul défaut (très relatif) d’une équipe remarquable de second rôles, il faut souligner la prestation d’Anne-Marie Owens, qui campe une Ježibaba digne de tous les superlatifs, et que l’on rêverait d’entendre dans le rôle de la Servante de La femme sans ombre de Richard Strauss. Côté chœur, le travail est également superbe. Personne dans cet enregistrement ne semble dérangé par les importantes difficultés de la langue tchèque. (Un détail cependant : en tchèque, l’apostrophe entre deux mots se prononce comme s’il s’agissait de la lettre « i » ; ce que personne ne fait ici. Cela n’a que peu d’importance au vu de l’effort considérable que chanter dans cette langue demande)

Dans la fosse, l’Australia Opera and Ballet Orchestra n’égale pas les grandes phalanges. Il ne faut donc pas s’attendre au moelleux ou à l’extrême raffinement des grands orchestres européens. Pourtant, il faut souligner le fait que, pour un orchestre d’opéra, l’ensemble s’en tire extrêmement bien. On n’a en effet rien à redire sur la mise en place ou sur la précision de ces musiciens. La direction de Richard Hickox est également digne de tous les éloges. Le chef fait preuve d’un sens presque wagnérien de l’opéra et sait faire danser ses troupes au son des réjouissants passages folklorisants de l’œuvre. Si on eut aimé qu’il eût la main un peu plus légère dans certains passages (le célèbre « Chant à la lune » ou le ballet du deuxième acte manquent d’un soupçon de grâce), on apprécie la capacité du chef à faire chanter cette musique ainsi que l’humour presque british dont il émaille certains moments (l’irrésistible préparation de la potion par Ježibaba au premier acte ! ). S’il n’égale pas Mackerras, pape de l’opéra tchèque qui bénéficie des services d’un Orchestre Philharmonique Tchèque ayant cette musique dans le sang (Decca), Hickox livre sans conteste une interprétation de très haut vol, qui vaut la peine d’être découverte.

Nicolas DERNY


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