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Wolfgang Amadeus MOZART (1756-1791)

IDOMENEO

Idomeneo : Luciano Pavarotti
Idamante : Frederica von Stade
Ilia : Ileana Cotrubas
Elettra : Hildegard Behrens
Arbace : John Alexander
Gran Sacerdote : Timothy Jenkins
La voce : Richard J. Clark
Deux crétins : Loretta Di Franco et Batyah Godfrey
Deux troyens : Charles Anthony & James Courtney


Choeurs et Orchestre du Metropolitan Opera de New-York
Direction : James Levine

Production : Jean Pierre Ponnelle
Lumières : Gil Wechsler

Captation vidéo : Brian Large

New-York, 6 novembre 1982


2 DVD-VIDEO NTSC 073 423-4 |G|H 2|
STEREO: PCM / SURROUND: Dolby Digital 5.1 & DTS 5.1




DE SUEUR ET DE SANG


Révélée en 1982, cette production d’Idomeneo constituait également la création de l’ouvrage au Metropolitan. Pour l’occasion, l’institution new-yorkaise avait réuni une brochette de stars : certains de ces grands noms ne sont pas particulièrement réputés en tant que références mozartienne, mais nos appréhension sont vite levées à l’écoute de ce magnifique DVD.

A tout seigneur tout honneur, Luciano Pavarotti est tout simplement royal en roi de Crète torturé par le destin. Son timbre magnifique allié à une exceptionnelle capacité de coloration, la qualité d’un phrasé authentiquement italien, d’une voix homogène sur toute la tessiture (sans ces sonorités nasales dans l’aigu qui handicapent tant de ténors), compensent des vocalises parfois un peu savonnées et des trilles très discrets, d’autant que la version utilisée est celle simplifiée par Mozart (l’air « Torna la pace » souvent coupé est ici conservé). Visiblement motivé et superbement dirigé par Ponnelle, Luciano se révèle également un acteur crédible. Bref, du grand art.

A ses côtés, Frederica von Stade est un Idamante tout en finesse et en émotion retenue. Le chant est soigné, l’incarnation pleine de justesse et de sensibilité. Là encore, du grand art.

Hildegard Behrens choquera assurément les oreilles chastes : l’émission est plutôt chaotique, les graves rauques et souvent détimbrés. Qu’importe. L’engagement, la présence, sont tels que ces défauts relatifs passent au second plan : son Elettra est tout simplement l’une des plus bouleversantes incarnations qui soit. Génialement filmée par Brian Large, qui alterne les plans du visage ou de la gestuelle, Behrens fait passer un tel frisson qu’on sent les larmes poindrent devant la douleur de cette femme en délire. Les puristes objecteront, avec raison, que l’Elettra de Mozart n’est pas l’Elektra de Strauss. Pourtant, quand Behrens s’effondre à la conclusion de son dernier air « D’Oreste, d’Aiace », on se lèverait de son fauteuil pour se joindre à l’ovation du public du Metroplitan.

Face à cette démesure, l’Ilia d’Ileana Cotrubas fait un peu pâle figure, sans pour autant gâcher le spectacle. A ce stade de sa carrière, la cantatrice roumaine a un peu de mal à contrôler son vibrato et à garder la justesse dans les notes de passage. Ses qualités dramatiques bien connues compensent cette fatigue vocale et le personnage reste émouvant.

James Levine dirige avec passion et grandeur une phalange et des chœurs au zénith. C’est du Mozart dans la grande tradition, très éloigné des préoccupations musicologiques de l’école « baroque ».

Jean-Pierre Ponnelle signe là une de ses plus belles productions : des décors d’une relative simplicité, des costumes somptueux et surtout une direction d’acteurs absolument remarquable : une leçon pour beaucoup de metteurs en scène actuels.

Le repiquage DVD est d’une qualité remarquable. Je dois d’ailleurs confesser que je préfère nettement ces captations anciennes, bien éclairées, sans défaut de synchronisation, finalement plus vivantes que les réalisations en haute définition actuellement effectuées. Les gouttes de sueur qui perlent au front de Luciano à la fin de « Torna la pace » font aussi partie du spectacle.

Les inconditionnels de musique baroque, d’instruments anciens ou de voix blanches sans vibrato seront peut-être choqués par cette production incontestablement rétrograde : tant pis pour eux, la vérité est parfois ailleurs et cet Idomeneo est incontestablement une remarquable réussite.



   Placido Carrerotti

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