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Richard WAGNER (1813-1883)

DIE MEISTERSINGER VON NÜRNBERG
Hans Sachs, Giorgio Tozzi
Veit Pogner, Ernst Wiemann
Kunz Vogelsang, Willy Hartmann
Konrad Nachtigall, William Workman
Sixtus Beckmesser, Toni Blankenheim
Fritz Kothner, Hans-Otto Kloose
Balthasar Zorn, Kurt Marschner
Ulrich Eisslinger, Wilfried Plate
Augustin Moser, Jürgen Förster
Hermann Ortel, Franz Grundheber
Hans Schwarz, Carl Schultz
Hans Foltz, Karl Otto
Walther von Stolzing, Richard Cassilly
David, Gerhard Unger
Eva, Arlene Saunders
Magdalene, Ursula Boese
Un Veilleur de nuit, Vladimir Rudzak

Chœur et Ballet de l’Opéra de Hambourg
Orchestre Philarmonique de Hambourg
Leopold Ludwig direction

Mise en scène, Leopold Lindtberg
Décors, Herbert Kirchhoff
Costumes, Rudolf Heinrich

2 DVD Arthaus, 101 273




Oh ! La galère...


En des temps lointains, à l’époque où l’on ne captait des productions lyriques qu’avec parcimonie, Rolf Liebermann voulut garder mémoire de treize des plus belles réussites de son « principat » hambourgeois. Légendaires (c’est un peu le dahut du petit monde de l’opéra, puisque, finalement, peu de ceux qui en parlaient les avaient vraiment vus) ces films étaient auréolés d’un nimbe qui devait beaucoup au souvenir de ce que le même Liebermann a fait, ensuite, à Paris. Un nimbe et quelques noms : Jurinac pour Wozzeck, Fischer-Dieskau pour la Flûte, Silja pour Fidelio…

Mais voilà, mauvaise pioche avec ces Maîtres. Treize productions, ça porte malheur ! On a tiré le gentil cousin de province. Celui qu’on ne sort qu’à regret en société ; celui qui porte (c’est d’ailleurs l’un des derniers) d’improbables complets pied-de-poule, des gants beurre-frais et des bottines vernies… Le brave garçon, comme on dit chez moi.

C’est très périlleux de monter les Maîtres. Parce que, plus peut-être qu’aucun autre opéra de Wagner, il prête autant aux tunnels qu’à la caricature. Le « saint art allemand » a fait beaucoup de mal à son géniteur et a servi de caution a de biens tristes sires. Carton-pâte et bannières ; barbes postiches poussiéreuses et tout le tralala. Petit examen : avons-nous droit à cela ici ? Pas tout à fait, puisque la production réussi le tour de force périlleux de faire un acrobatique grand écart entre les options contraires du « Nouveau Bayreuth » d’alors : l’épure de Wieland Wagner et l’imagier sur-décoratif et redondant de son frère Wolfgang.

Un peu court pour ce qui est de la souplesse que demande l’exercice M. Lindtberg reste fâcheusement coincé entre les deux. Décors sobres (c’est l’euphémisme pour « rudimentaires »). Rien ne déplaît franchement ; rien ne captive non plus. On aime juste la couleur passée des costumes crypto-renaissants parce que ça donne un (tout) petit frisson archéologique. C’est comme contempler une vieille tunique délavée, fripée et mitée dans un obscur musée de troisième rang ; c’est un témoignage. Comme, aussi, le play-back (plutôt bien maîtrisé, par ailleurs).

Le I défile ; le II ne dérange pas (même s’il est cruellement mal éclairé) ; la Saint-Jean indiffère, avec sa troupe bariolée sur fond blanc-sale. Elle indiffère comme tout le reste en fait, qui n’impose rien, ne raconte guère, ne s’envole jamais… ne décolle même pas. Des Maîtres qui ne carburent à rien : ni au diesel, ni au schnaps, ni même au gros rouge qui tache. Des Maîtres tristes, sans rebond ni mot. Des Maîtres qui font passer ceux du pire Bayreuth pour une réussite d’une franche spiritualité.

Ah ! La vilaine soupe. Voilà, je l’ai dit, même si j’étais finalement plutôt bien disposé en posant ces amères galettes dans mon lecteur. D’ailleurs pourquoi continuer à parler de Maîtres ici ? C’est absolument tout sauf magistral ! Ecoutez l’appel de cuivres ridicule (pas même fanfaronnant) qui suit le quintette du III ! Ecoutez cela et rien d’autre en fait. Parce que personne ne le mérite vraiment dans ce contexte. Ni Tozzi qui récite quelque chose qui ressemble fort à l’annuaire de Munich ; ni Blankenheim qui fait un Beckmesser piteux, pathétique, crapaud infâme qui croasse dans un marais fangeux ; ni toute la troupe qui les entoure; ni Cassilly qui s’engorge sur la moindre tenue et n’instille qu’une poésie extrêmement minimale à ce rôle qui, bien compris, est l’un des plus lumineux du répertoire wagnérien ; ni, enfin, Arlene Saunders, fifille (vieille fifille) gentiment popote.

Un mot pour Leopold Ludwig : solide. Et un grand coup de chapeau au David si bien chantant, si frais et fine-mouche de Gerhard Unger. Un apprenti quadragénaire, je sais ; mais qu’il domine bien son sujet. Dommage qu’on le trouve déjà (et tellement mieux entouré) chez Kubelik et Kempe !

Pour les compulsifs.


    Benoît BERGER

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