C  R  I  T  I  Q  U  E  S
 
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Giovanni Battista PERGOLESI (1710-1736)
Stabat Mater - Salve Regina

Nicolo PORPORA (1686-1768)
Salve Regina

Maria Grazia Schiavo (soprano)
Stéphanie d'Oustrac (mezzo)

La Capella de'Turchini
Direction Antonio Florio

Enregistré à l'église Sainte Catherine de Sienne à Naples en janvier 2005.

Eloquentia EL 0505, 1 CD, 63'28.






Qu'un Napolitain comme Florio s'empare du génial et ressassé Stabat Mater fait espérer une version qui bouscule un tant soit peu les oreilles, et qui corresponde en tout cas à ce qui est annoncé dans les intentions : "se mettre au service de l'oeuvre", chanter "con grazia", "sans affectation", mettre en avant "la qualité essentielle, l'humilité", rechercher "l'homogénéité entre les interprètes ". Le fait que ce soit un jeune label, Eloquentia, au vocable prometteur, qui prenne le risque de parcourir à nouveau ce chemin damé par l'abondance, en l'assortissant d'une rareté, le Salve Regina de Porpora, prédispose aussi à la bienveillance. Mais force est d'avouer une certaine déception.

En fait d'humilité, Antonio Florio se place délibérément dans un contexte lyrique, unissant dans une même esthétique la vague napolitaine des années 1725 à l'église et au théâtre. On peut admettre le postulat, mais il lui fait choisir deux voix amples et incisives, parfois même acérées dans leur vocalité : Stéphanie d'Oustrac et Maria Grazia Schiavo, sombre mezzo et soprano à la pureté parfois teintée d'acidité, se révèlent bien peu appareillées dès la sublime entrée en intervalle de seconde sur laquelle débute l'oeuvre. Certes, les deux chanteuses se gardent généralement d'une ornementation excessive, qui aurait fait basculer définitivement l'enregistrement sur la scène du théâtre. Mais le plus gênant est le manque de cohérence des métriques choisies par le chef, alternant tempi exagérément allants et ralentissements appuyés sur les cadences. Florio insiste avec ostentation sur chaque effet dynamique, plus soucieux de démonstration que d'urgence déclamatoire et d'intériorité, faisant attendre en vain une nécessité, une émotion. Bref, une lecture pleine d'artifices, à l'exemple du "Fac ut portem Christi mortem", très retenu mais affecté, blanc d'intention, enveloppe décorative dépourvue de spiritualité, auquel succède un "Inflammatus et accensus" presque primesautier. Plus convaincant, le "Quando corpus morietur", très sobre, semble lui aussi se déliter progressivement par manque d'intention narrative.

A tout prendre, dans un tel parti pris esthétique, la première mondiale que constitue l'enregistrement du Salve Regina de Porpora, écrit pour Venise, se conçoit mieux, tant l'oeuvre ressort du style galant et opératique, directement hérité de l'opera seria. Stéphanie d'Oustrac le conçoit bien ainsi, qui évacue de l'oeuvre toute intention de dévotion, et laisse libre cours à son tempérament théâtral ; une réserve toutefois sur un grain vocal parfois trop assombri et nasalisé. Le Salve Regina de Pergolèse conclut le programme, Maria Grazia Schiavo s'y révélant plus sensible et fervente, ce qui est un mérite avec un orchestre sans grande implication.
 
 

Sophie ROUGHOL


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