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Giacomo PUCCINI (1858-1924)
 

LE VILLI

Opéra en deux actes
Livret de Ferdinando Fontana

Anna : Mélanie DIENER
Roberto : Aquiles MACHADO
Guglielmo : Ludovic TEZIER
Récitante : Sylvie DAVID

Choeurs de Radio France
Orchestre Philharmonique de Radio France

Direction : Marco GUIDARINI

Directeur artistique : René Koering

Enregistré à Radio France le 6 décembre 2002
dans le cadre des Figures d'Italie

1 CD Naïve 22186 04958




Naïve poursuit sa fructueuse collaboration avec Radio France (*) en publiant simultanément les deux premiers opéras de Puccini (Le Villi et Edgar) si judicieusement programmés la saison dernière dans le cadre des Figures de l'Italie, avec des distributions qui regroupaient des artistes confirmés et quelques uns des espoirs les plus sûrs du chant actuel. 

Créé le 31 mai 1884 au Théâtre dal Verme à Milan, Le Villi avait pourtant failli ne jamais voir les feux de la rampe. En effet, l'année précédente, le jeune compositeur, à peine sorti du conservatoire, décide, sur les conseils d'Amilcare Ponchielli dont il fut l'élève, de participer à la première édition du célèbre concours organisé par l'éditeur Sonzogno pour couronner un opéra en un acte. En quelques mois, l'oeuvre est achevée, mais le jury ne la retient pas. C'est alors que Boïto l'entend au cours d'une exécution privée : convaincu de sa valeur, il use de son influence pour la faire représenter. L'accueil est enthousiaste et vaut au jeune maestro d'être remarqué par Verdi et engagé par un autre grand éditeur, Ricordi, qui le persuade d'étoffer sa partition. La nouvelle mouture en deux actes - que l'on entend ici  - voit le jour à Turin le 26 décembre de la même année avec autant de succès.

L'ouvrage révèle une maîtrise de l'orchestration peu commune dans un premier opéra, comme en témoignent le prélude du premier acte et celui qui précède la scène de Guglielmo (n°8) au second. Elle recèle également nombre de pages d'une haute inspiration telles l'air d'Anna "Se come voi piccina" (n°3), que bien des cantatrices ont inscrit à leur répertoire, et surtout la longue scène de Roberto au début du deux (No 9), aux affects contrastés, théâtralement captivante. Il n'est pas jusqu'au choeur final qui annonce déjà le compositeur de Turandot.

Loin du vérisme ambiant, le livret, qui conte les amours d'Anna et Roberto contrariées par l'inconstance du jeune homme, s'appuie sur une légende fantastique d'outre-Rhin selon laquelle les esprits des jeunes filles mortes après avoir été abandonnées dansent autour de l'amant infidèle jusqu'à provoquer sa perte. Ce thème, on le sait, avait déjà inspiré bien des musiciens, notamment Adolphe Adam pour son ballet Giselle.

L'enregistrement qui paraît aujourd'hui comble une lacune de taille. Si l'on excepte quelques rares et éphémères captations sur le vif, comme celle de Martina Franca (1994), avec le jeune Cura (Nuova Era), l'ouvrage n'a pas eu les honneurs du disque depuis la version gravée en studio par CBS, à la fin des années 70, sous la direction de Lorin Maazel, dans le cadre d'une intégrale des opéras de Puccini et avec dans les principaux rôles Placido Domingo, Renata Scotto et Leo Nucci.

La distribution en tout point homogène ne souffre pas de la comparaison avec son illustre devancière. Les qualités vocales et dramatiques de Ludovic Tézier sont désormais connues. Le baryton français, déjà à l'affiche d'Ivan IV de Bizet paru l'an passé chez le même éditeur, confère au rôle de Guglielmo toute l'austérité pathétique que requiert cet emploi de père désespéré.

 Mélanie Diener prête à la douce Anna son timbre clair et lumineux qui charme dès son air d'entrée, interprété avec pudeur et sensibilité. Au deuxième acte, son apparition en esprit assoiffé de vengeance, à mille lieues du dramatisme (trop ?) exacerbé de Scotto, emporte l'adhésion grâce à la fraîcheur juvénile de son chant qui fait ici merveille.

Juvénile, le Roberto d'Aquiles Machado ne l'est pas moins. Véritable révélation de cet enregistrement, le ténor vénézuélien campe avec bonheur un personnage ardent et tout à fait crédible. Sa voix ensoleillée ne manque ni de séduction ni d'ampleur et sa grande scène au deux, théâtralement époustouflante, est un véritable sommet.

Notons la justesse et l'intelligence des interventions de la récitante Sylvie David, bien éloignée de la grandiloquence emphatique de Tito Gobbi chez Maazel.

L'ensemble est dirigé avec fougue et conviction par Marco Guidarini qui sait tirer mille couleurs chatoyantes d'un Orchestre de Radio France à son zénith. La scène finale notamment, véritable course à l'abîme menée à train d'enfer, est la plus fantastique -dans tous les sens du terme - jamais entendue. 

Un disque qui comblera les inconditionnels de Puccini et permettra à l'ensemble des mélomanes de découvrir une facette moins connue du compositeur toscan.
 
 

Christian  Peter

 
 
 



Dans la même Collection en collaboration avec Radio France, signalons :
Edgar de Puccini
Pelléas et Mélisande de Debussy
Ivan IV de Bizet



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