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Thomas TALLIS (v.1505-1585)

Œuvre intégrale

Chapelle du Roi
Direction Alistair Dixon

Brilliant Classics BRIL93612

10 CD Slim box : 71:52 - 70:32 - 64:37 - 66:41
77:53 - 77:33 - 62:45 - 63:22 - 75:15 - 26:44 - DDD
Enregistrements 1996-2000
Sans livret mais CD ROM comportant les notes en anglais
et textes chantés en latin avec traduction anglaise.




Prenez le Tallis !

Thomas Tallis fut un des plus compositeurs les plus renommés de la Renaissance. A sa mort, son élève Byrd ne déclara t–il pas : « Tallis est mort, et la musique se meurt » ? En effet, sa musique chorale - qui constitua la majorité de ses œuvres - laisse inlassablement admirer une science du contrepoint et de la polyphonie poussée à son paroxysme, et une diversité des harmonies doublée d’une réelle inventivité des thèmes.

L’intégrale de la Chapelle du Roi (à ne pas confondre avec La Chapelle Royale de Philippe Herreweghe soit dit en passant) a été originellement publiée chez Signum, avec des enregistrements mûris sur 5 ans. Les CDs 1 à 8 nous transportent chronologiquement depuis les balbutiements de jeunesse, déjà d’une facture très fine dans l’écriture contrapuntique mais encore assez convenue (Ave Dei), à la Chapelle de Mary Tudor puis de la Reine Vierge où s’exprime pleinement le Tallis grandiose de la maturité, alliant profondeur et équilibre. Le Spiem in alium qui atteint quarante voix réelles est à cet égard époustouflant, le Laudate Dominum d’une poignante intériorité. Les Offices divins (cycle des heures canoniques) sont plus simples, avec des passages en plain-chant, et des moments lumineux (Audivi vocem de coelo). On aurait cependant pu se passer des versets joués par un petit orgue déglingué du XVIIème siècle, joliment coloré mais qui semble à la limite de l’asphyxie (Alleluia : per te Dei genitrix), si les musicologues n’étaient aussi ravis de faire fonctionner l’un des plus vieux instruments de la perfide Albion, celui de la Chapelle de Knole.

Tout au long de ce voyage biographique, La Chapelle du Roi (et l’Ensemble Charivari Agréable qui interprète les rares pièces instrumentales) se révèle exemplaire. Alistair Dixon privilégie la transparence du chœur, et met particulièrement en valeur la verticalité de l’écriture. La douzaine de chanteurs fait montre d’une implication qui force le respect, d’autant plus que cette musique-là ne souffre pas la médiocrité dans l’interprétation, tant les fugues, passages en imitations et autres chausse-trappes abondent. Ce n’est donc pas un mince compliment que de dire que la Chapelle rend Tallis intelligible et émouvant. Seules les deux Lamentations de Jérémie sont un peu placides et par trop mesurées, souffrant de la comparaison avec l’expressivité et des couleurs du Hilliard Ensemble. Car c’est là le principal reproche qu’on adressera à cette intégrale : celui de la cohérence de la lecture, qui risque de confiner à la monotonie. Ce Tallis fervent, lisse, sans cesse la main sur le cœur et les yeux rivés vers les clefs de voûte ne se départit jamais de son bonnet et de son ample robe… Franchement, et pour être un peu trivial, on s’amuse quand même beaucoup plus à la même époque dans les Danses paysannes et chansons populaires allemandes du XVIème siècle dirigée par Thomas Binley (Teldec), mais chacun ses goûts entre l’autel et la taverne. Aussi, en dépit de l’excellence de la lecture de Dixon, nous recommandons l’écoute de cette intégrale à petites doses, afin d’en savourer les saveurs subtilement renouvelées.


Viet-Linh NGUYEN

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